IA et emplois : véritable menace ou simple peur du changement ?

L'IA est fréquemment ressentie comme une menace sur les emplois. Les entreprises voient-elles l'IA comme un moyen de remplacer leurs salariés ? Quels sont les cas d'usage ? Etat des lieux.

Entre les effets de la pandémie, la crise politique en Ukraine, l’inflation et l’instabilité généralisée, l’économie mondiale reste dans l’incertitude. Selon les prévisions du Fonds Monétaire International, la croissance mondiale devrait ralentir, passant de 3,4% en 2022 à 2,9% en 2023, avant de remonter à 3,1% en 2024. La croissance de 2023 restera inférieure à la moyenne historique (2000–19) de 3,8%.

L'IA facteur de croissance économique

L’IA, comme technologie de rupture, ne suit pas la tendance générale. En effet, en 2018, une modélisation économique de McKinsey estimait que l’intelligence artificielle pourrait entraîner une croissance du PIB mondial de 1,2% par an jusqu’en 2030. Évalué à 68,8 milliards de dollars américains en 2022, le marché pourrait atteindre 459,3 milliards de dollars américains en 2030, soit un taux de croissance annuel moyen de 26,8%. Global Industry Analysts identifie les secteurs avec les taux de croissance les plus élevés : la manufacture à 51,9% de croissance entre 2020 et 2027, la santé avec  35,9% de croissance sur la même période et le marketing avec 26,8%  de croissance.

Une adoption en croissance ? Oui mais...

Bien que l’adoption de l’IA à l’échelle mondiale soit 2,5 fois plus élevée aujourd’hui qu’en 2017, elle s’est stabilisée au cours des dernières années. Le nombre d'entreprises ayant utilisé l'IA a même baissé en 2022 par rapport à 2021, selon McKinsey. Dans un rapport intitulé "The state of AI in 2022- and a half decade in review", qui présente les résultats d’un sondage réalisé auprès d'environ 1 500 sociétés, Mckinsey dévoile qu'en 2022, seules 50% d'entre elles ont utilisé l'IA sur une fonction ou une activité, contre 56% en 2021 et même 58% en 2019 (il faut prendre en considération l’effet de la pandémie, qui a déterminé une chute de 8 points entre 2019 et 2020). Les cas d’usage se sont multipliés surtout dans l’automatisation robotique des processus (39%) et la vision par ordinateur (34%), avec un avancement remarquable de la compréhension du texte en langage naturel pour 33% des entreprises.

Les secteurs spécifiques dans lesquels les entreprises voient la plus-value de l’IA ont aussi évolué. Aujourd'hui, les effets les plus importants sur les revenus signalés se trouvent dans le marketing et les ventes, le développement de produits et de services, la stratégie et la finance d’entreprise, les répondants signalant les avantages les plus élevés en termes de coûts dans la gestion de la chaîne d’approvisionnement. La valeur nette réalisée grâce à l’IA reste forte et largement cohérente, environ un quart des répondants déclarant qu’au moins 5% de l’EBIT de leur organisation était attribuable à l’IA en 2021.

Le développement d’une nouvelle génération de systèmes d’IA génératifs semble séduire les entreprises avec la promesse d’une efficacité et d’une productivité augmentées, d’une réduction des coûts et des nouvelles opportunités de croissance. McKinsey répertorie déjà les possibles applications de l’IA pour les entreprises surtout pour des tâches répétitives, qui peuvent être facilement automatisées ou pour le traitement des grands volumes de documentation.

Pour certains acteurs, l’arrivée de ChatGPT va profondément changer le monde du travail, notamment pour les métiers qui se basent sur le texte écrit.  Mais selon le World Economic Forum, la problématique du remplacement des professionnels par des systèmes d’IA reste plus complexe et bien plus nuancée. Actuellement, si 60% des emplois comportent au moins certaines tâches susceptibles d'être automatisées, seuls 5% d'entre eux sont menacés d'une automatisation totale. Cela n’empêche pas les start-ups qui misent sur la technologie derrière ChatGPT de profiter de son succès pour lever des fonds auprès des investisseurs en proposant des usages en création de contenu, marketing, santé ou éducation.