Digitalisation et durabilité : le secteur de l'assurance face à des dynamiques de transformation jumelles

Entre digitalisation et durabilité, le secteur de l'assurance se trouve face à deux changements fondamentaux qui peuvent être considérés comme des dynamiques de transformation jumelles.

Si la première dynamique est déjà sur les rails depuis plusieurs décennies, la seconde est venue s’ajouter aux enjeux du secteur de l’assurance depuis un peu plus de deux ans. Elles sont pensées de manière intégrée afin d'identifier la façon dont elles peuvent être mutuellement bénéfiques. La digitalisation et la durabilité étant des enjeux qui touchent à tous les secteurs de l’entreprise sans distinction, les deux se retrouvent en concurrence sur le plan des compétences et des budgets. Selon une étude d'IBM, les entreprises qui parviennent à penser conjointement leur stratégie numérique et leur transformation en matière de durabilité réussiront à créer des situations gagnant-gagnant. Il est également recommandé de tirer les enseignements de l’opérationnalisation de la digitalisation, portant notamment sur la technologie nécessaire, la gouvernance, les modèles de données et la gestion du changement.

Où en sont les assureurs aujourd’hui ?

Alors que les assureurs sont encore en train de construire et de développer leurs capacités numériques, ils doivent répondre à de nouvelles exigences de durabilité, impulsées par le renforcement à la fois des dispositifs légaux et des attentes des clients, collaborateurs et investisseurs en ce sens. L’étude « Assurance et finance durable 2021 » de France Assureurs a montré la volonté des assureurs français de maintenir leur dynamique d’investissement en faveur de la transition écologique et de développer leurs politiques d’investissement responsable sur l’ensemble des sujets ESG. A cette occasion, le secteur a mesuré, pour la première fois, son exposition directe au pétrole et au gaz, attestant de la prise de conscience croissante et en cours sur ces préoccupations.

La durabilité fait pourtant partie intégrante du cœur de métier des assureurs et, avec l'augmentation des risques naturels due au changement climatique, se révèle dans l'intérêt même du secteur.

La durabilité dans l’informatique et par l’informatique

Mettre en place une infrastructure et des processus informatiques durables est une question importante. Pour cela, les assureurs doivent identifier ce qu'ils peuvent améliorer au sein de leur système informatique, en réduisant par exemple les émissions liées à l'IT et la consommation d'électricité, puisque, par définition, une informatique durable présente une efficacité énergétique élevée. Si l’on prend l’exemple du cloud computing, il offre un grand potentiel d'économie d'énergie, mais aussi un risque d’effet boomerang, car l'énergie économisée est à nouveau consommée ailleurs - c’est ce qu’on appelle le paradoxe de Jevons.

Mais l'informatique peut faire bien plus encore : elle soutient les modèles commerciaux durables et la mise en œuvre de la durabilité de diverses manières, notamment avec les nouveaux modes de travail virtuels et à distance. Autre exemple avec le reporting RSE, qui nécessite d'énormes quantités de données, dont certaines sont déjà disponibles ou doivent être expressément collectées. Les applications analytiques modernes génèrent, à partir de cet océan de données, des connaissances nécessaires au reporting et à la gestion de la stratégie de durabilité. De nombreux modèles commerciaux innovants et durables, comme le covoiturage et d'autres modèles de partage, par exemple pour les vélos et les machines, reposent sur des processus numériques et une infrastructure numérique cloud. Dans ce cas, l'informatique est un moteur de la durabilité.

Améliorer la gestion des sinistres par la durabilité

Afin de rendre la gestion des sinistres plus durable, il est recommandé aux assureurs d’identifier l’endroit et la façon dont ils peuvent appliquer des critères RSE (Responsabilité sociétale des entreprises, qui couvre les aspects sociaux, environnementaux et la gouvernance) dans l’ensemble de leur processus - par exemple dans le règlement des sinistres, la gestion des déchets, ou encore le respect des droits de l'homme. Le "réemploi" et la "réparation" font leur entrée dans le domaine des sinistres et les concepts d'économie circulaire permettent aux assureurs de régler les sinistres de manière durable et pérenne.

La prévention des sinistres joue également un rôle de plus en plus important, notamment dans l'assurance contre les éléments naturels. Les nouvelles technologies aident par exemple à collecter automatiquement les données des sinistres. À l'aide d'algorithmes, les assureurs associent de manière automatisée des photos satellites et aériennes à d'autres données commerciales et en tirent un avertissement de risque ou une première estimation approximative des coûts.

Susciter l’enthousiasme et l’implication des collaborateurs

Des initiatives comme celle de la Climate School d'AXA aident à sensibiliser les collaborateurs au changement de mentalité. En tant que solution numérique en marque blanche, cette dernière fournit des contenus d'apprentissage en ligne à des entreprises comptant plus de 10 000 collaborateurs. En formant, informant et entraînant leurs collaborateurs et en les rassemblant derrière une cause commune, les assureurs déploient des forces insoupçonnées. Ainsi, chacun peut comprendre les défis et les opportunités de cette transformation double et se former de manière ciblée. En outre, de telles formations permettent aux assureurs non seulement d'assurer leurs clients, mais aussi de les soutenir activement dans leur dynamique de transformation. Cela réduit les malentendus et établit la durabilité comme un élément central de la culture d'entreprise.

Pour que cette dynamique de double transformation soit un succès, elle doit être voulue et soutenue par la direction de l'entreprise, qui est à la fois un modèle et une interface entre le business et l'IT. Il s'agit de façonner soi-même son avenir et de considérer l’impératif de durabilité comme une opportunité plutôt que comme une contrainte. L'utilisation appropriée et intelligente de nouvelles technologies aide à briser le mécanisme de silo et à créer des synergies intersectorielles - par exemple grâce aux tableaux de bord de durabilité, construits sur des plateformes cloud, et qui permettent d’établir des rapports RSE partagés par toute l’entreprise.