Régis Granarolo (Munci) "La sous-traitance en cascade est un coûteux dysfonctionnement endémique"

Si l'association professionnelle des informaticiens fustige les pratiques de certaines SSII, elle reconnaît aussi certaines améliorations sur le front de l'emploi IT.

JDN Solutions. Votre partenaire IDirect.fr a publié récemment une étude et un dossier sur les conditions de la sous-traitance chez les informaticiens indépendants. Quelles en sont les conclusions saillantes ?

Ce sondage a été réalisé auprès des adhérents de la coopérative des informaticiens indépendants iDirect.fr. Si des aspects de la sous-traitance étaient déjà connus, ce sondage met en lumière tous ses travers et quantifie ses coûts, élevés. Le phénomène n'est pas nouveau, mais il a pris de l'ampleur.

Selon ce sondage, les marges moyennes réalisées par les intermédiaires sont de 27,48 %, mais elles peuvent aussi être nettement plus abusives. La sous-traitance en cascade entraîne la multiplication d'intermédiaires le plus souvent à très faible valeur ajoutée.

Les résultats de ce sondage montrent que ces dysfonctionnements endémiques ont un coût élevé pour les entreprises clientes mais aussi pour nos confrères. Les entreprises clientes ne sont pas les seules victimes, car ces dérives sont aussi préjudiciables pour les indépendants et les petites structures. Les appels d'offres leur sont en effet plus défavorables qu'aux grandes structures, plus visibles.

Il serait pourtant possible d'appliquer certaines dispositions des marchés publics au secteur privé. En France, la possibilité d'une loi cadre allant dans ce sens était est d'ailleurs proposée dans le rapport Volot, qui a pour but de mieux fixer les relations interentreprises et la sous-traitance. De telles dispositions législatives existent déjà en Italie et en Espagne. Malheureusement, les arbitrages qui viennent d'être rendus ce matin par le Ministre, M. Estrosi, ne vont pas dans ce sens : ce sont des engagements a minima qui ont été annoncés (ce matin au MIDEST) sans aucun caractère contraignant pour les donneurs d'ordre...

"La création nette d'emploi n'est pas assurée pour 2010"

Les SSII annoncent beaucoup de plan de recrutements. Faut-il y voir une bonne nouvelle pour l'emploi du secteur IT ?

Nous sommes agréablement surpris par les nombreuses campagnes de recrutement des SSII. Elles ont anticipé la croissance, alors qu'elle était sans doute plus en retard précédemment. Reste à voir si cette dynamique est durable.

Par ailleurs, certains signes moins enthousiasmants ont été soulignés. Les derniers chiffres de Pole emploi font état d'un nombre de chômeurs en informatique en hausse et l'Insee annonce que l'activité de ce secteur pourrait se tasser dans les prochains mois. Pour 2010, la création nette d'emploi n'est même pas assurée par le Syntec. Mais les chiffes réels sont difficiles à obtenir, car les études sont souvent partielles.

Quant à l'offshore et à la menace que cela représente pour l'emploi, nous sommes un peu moins alarmistes qu'avant. Nous observons des retours en arrière et donc de la réinternalisation. Une tendance qui pourrait se confirmer pour les prochaines années pour favoriser, plutôt, le développement des centres de service en province (tout aussi économiques que l'offshore au final...). Mais c'est un sujet sur lequel nous restons vigilants.

En cette année de reprise, avez-vous noté des signes encourageants pour les salariés IT?

Nous notons une amélioration quant aux efforts de formation proposée aux salariés. Ce qui a eu, en revanche, pour mauvaises conséquences de raréfier certains fonds dédiés (Fafiec), pour la plupart épuisés depuis cet été. Ce qui pénalise, là encore. surtout les petites entreprises.

Dans certaines SSII, nous constatons aussi un meilleur encadrement RH, avec plus d'entretiens de carrière. La mobilité professionnelle est ainsi favorisée et certaines gestions d'intercontrat ont fait aussi des progrès.

Même si le nombre de licenciements reste trop important en SSII, nous avons noté cependant moins de licenciements abusifs. C'est sans doute l'effet de la nouvelle possibilité de rupture conventionnelle.

Régis Granarolo, a fondé le Munci en 2003. Il en est le directeur général depuis 2008. Ingénieur informaticien de formation, il compte plusieurs années d'expérience en SSII comme ingénieur d'études/développement et chef de projet. Il a aussi été employé dans les télécoms, comme ingénieur réalisateur, et dans une PME, en tant que directeur informatique. Il est actuellement consultant en système d'information (informatique décisionnelle, veille informationnelle, moteurs de recherche, GRH/RSE). La création de son entreprise est en cours.