Internationalisation des licornes françaises

Avec plus de trois ans d'avance, la France a dépassé les 25 licornes. Un phénomène qui traduit la capacité des startups dans leur ensemble à s'internationaliser.

Avec plus de trois ans d'avance, la France a dépassé les 25 licornes. S'il faut se réjouir de l'accélération de l'écosystème français des startups, il est intéressant de constater que ce phénomène traduit plutôt la capacité des startups dans leur ensemble à s'internationaliser.

Le modèle SaaS simplifie l’exportation de nos jeunes pousses, mais c’est tout aussi vrai pour leurs concurrents étrangers.

Dans les prochaines années la concurrence va s’accélérer avec l’arrivée de nouveaux acteurs sortants de leur marché natif. Face à un tel afflux, l’être humain a tendance à se replier sur lui-même et cultiver un certain protectionnisme. C’est ce qu’on peut constater actuellement en France. Et si le protectionnisme n’était pas la solution ? 

Fuite des talents et des startups françaises à l’étranger : un constat sans appel

Pour se développer à l’étranger, les startups françaises font face à un environnement concurrentiel important et qui dépassent le semble enjeu « produit ». Les startups françaises font face à trois défis :
Un des enjeux majeurs pour les startups est d’arriver à recruter des profils talentueux et la concurrence est féroce. Des salaires importants peuvent attirer les profils talentueux à l’étranger. En France, pour la partie recherche, cet effet est atténué avec la mise en place du CIR (crédit impôt recherche). Il est d’autant plus important si le salarié est un "jeune docteur". La mise en place de ce dispositif favorise leur première embauche en CDI suite à l'obtention de son diplôme. L'État permet aux entreprises de doubler le montant des dépenses de personnel éligibles au crédit impôt recherche ce qui permet de conserver une partie des chercheurs en France.

Le nombre d’investisseurs capables de se projeter dans des projets early stage est encore très faible en France par rapport aux autres pays. Si les chiffres de financement des startups explosent, il s’agit en réalité d’une explosion du ticket moyen des projets matures mais on constate à l’inverse une quasi-stagnation pour le montant investi en early stage. C’est pourquoi certaines entreprises partent à l’étranger très tôt pour lever des fonds. De plus, les stratégies des fonds d’investissement français sont gouvernées par les règles d’investissement de leur LPs très procycliques avec donc peu de chances de voir apparaître un outsider. 

Même si la France est un marché intéressant, il reste très petit en comparaison des États-Unis ou de la Chine et surtout la maturité d’adoption d’un nouvel usage est souvent décalée de 2 ou 3 ans. Les startups françaises doivent donc compenser un marché domestique plus petit et en décalage en comparaison avec les start-up américaines qui ont déjà pu éprouver leur solution sur leur marché.

L'internationalisation, enjeu indispensable à la croissance

Pour réussir à vendre sur un marché étranger, il est essentiel de savoir quels sont les marchés prioritaires et d’appréhender au mieux les besoins, les valeurs et les habitudes de consommation. Pour y arriver, il est essentiel d’avoir une réflexion tournée vers  l’international dès le lancement, ceci est valable pour les entreprises qui disposent d’un modèle Saas, peu importe leur localisation.

L’internationalisation est souvent une question de survie car les revenus générés en France par les startups ne sont pas nécessairement suffisants. Les secteurs les plus concernés par cette internationalisation sont le luxe et le digital. Les moins concernés sont les secteurs de l’assurance, de la finance ou les contraintes réglementaires sont fortes. 

Le choix du pays d’implantation dépend donc d’une sélection de critères dont la taille du marché, le taux de croissance, la présence de la concurrence, bien sûr la demande potentielle, etc. Évidemment, on peut s’interroger sur les conséquences d’une désertification des licornes "françaises" comme par exemple avec Dataiku et Aircall qui sont devenues américaines. Même si la R&D reste souvent en France et donc continue de créer des emplois, le transfert de pouvoir et décisionnel peut avoir des implications fortes.

Les solutions pour un nouveau départ

Pour aider ces entreprises à vendre à l’étranger tout en restant en France, le rôle des incubateurs, des VC et fonds early stage de la BPI est capital. 
Récemment une dizaine de pays européens s’est engagé à créer un fonds dédié au financement des startups en hypercroissance et près de 3,5 milliards sont déjà sécurisés. L'objectif de cette nouvelle enveloppe est d’avoir une vingtaine de fonds européens dotée d'un milliard d'euros qui pourront investir dans ces start-up en forte croissance qui ont déjà bien entamé leur internationalisation. A ce jour, il existe très peu de fonds de croissance de cette taille sur le Vieux Continent, alors que les Etats-Unis en dénombrent 40.

Des initiatives sont donc en cours mais elles doivent être renforcées. La dernière décennie a marqué un rattrapage de la France dans son retard sur le développement des startups. L’enjeu aujourd’hui est d’être en avance et de nombreux sujets d’avenir peuvent permettre aux startups françaises de se positionner comme précurseur.