(Article modifié le 28/09/06) Faîtes vos jeux, rien ne va plus. Un vent de panique semble
souffler depuis vendredi 15 septembre sur le petit monde des
bookmakers en ligne. La raison de cette agitation ? L'arrestation
vendredi dernier, à La Turbie (Alpes Maritimes), par
la section judiciaire de la sous-direction des courses et jeux
des renseignements généraux, des deux dirigeants
du site de paris sportifs d'origine autrichienne Bwin (ex Betandwin),
Norbert Teufelberger, président de la société,
et Manfred Bodner, son directeur général.
Celle-ci a eu lieu alors que les deux dirigeants de la société
étaient en train de présenter à la presse
leur nouveau contrat de sponsoring avec l'un des clubs les plus
en vu de la ligue 1 de football : l'AS Monaco. Les policiers
ont agi sur commission rogatoire du juge Jean-Marc Cathelin,
celui-ci ayant été saisi depuis le 7 novembre
2005 d'une information judiciaire contre X pour "tenue
illicite de jeux de hasard, loterie illicite, publicité
de loterie prohibée et prise de paris illicites sur des
courses de chevaux". Cette action fait suite aux plaintes
de la Française des Jeux et du PMU, les deux organismes
qui, selon la législation française, sont les
seuls habilités à organiser des jeux d'argent
on et offline en France (lire l'article
du 10/05/06).
Si l'action
est spectaculaire et a de quoi marquer les esprits à
quelques semaines des arrestations de David Carruthers, directeur
général du site britannique de paris sportifs
en ligne BetOnSports (lire l'article
du 28/07/06), et de Peter Dicks, dirigeant du site SportingBet,
faut-il pour autant en conclure que tous les acteurs du paris
en ligne peuvent désormais être inquiétés
s'ils posent le pieds sur le sol français ?
Selon Thibault Verbiest, Avocat aux Barreaux de Paris et de
Bruxelles et membre du cabinet Ulys, il ne faut pas dramatiser.
Cette action serait la suite logique de la procédure
menée depuis début 2005 par la Française
des Jeux et le PMU contre Bwin, celle-ci visant essentiellement
le réseau d'affiliation du site de paris sportifs. "Le juge en charge de l'affaire a profité de cette conférence de presse, très
médiatisée, pour entendre ces deux personnes, explique Thibault Verbiest.
C'est pour cela qu'il n'a pas déposé un mandat
d'arrêt, mais un mandat d'amener." Selon toute vraisemblance, les deux dirigeants de Bwin seront relâchés." Du moins si la
direction des courses et des jeux, qui est en quelque sorte
la police des jeux en France, n'a pas engagé de procédure
de son côté.
Par ailleurs, cette action n'a semble-t-il pas frappé au hasard. Elle vise l'un des sites de paris sportifs
les plus actifs en matière de marketing et de communication. Car outre l'accord avec l'AS Monaco, Bwin
a noué par le passé plusieurs autres partenariats
de ce genre : parmi ceux-ci figure un accord avec les clubs
de Saint-Etienne, d'Auxerre, du Mans et de Bordeaux en France,
ainsi qu'avec le Milan AC et le Werder de Brême. Ce dernier
accord ne lui a d'ailleurs par porté chance. Le Club
allemand a en effet été contraint en août
dernier, de retirer le nom de Bwin sur son maillot, suite à
une procédure juridique engagée par le Land de
Saxe à l'encontre du site de paris sportifs pour non
respect du monopole de l'Etat allemand en matière de
jeux de hasard. Une action qui lui a également coûté
sa licence d'exploitation.
Si l'on en croit Thibault Verbiest, cette action serait donc
ciblée et n'aurait pas vocation à s'étendre
à l'ensemble de la profession. Car si la Française
des Jeux a décidé d'agir, elle reste prudente.
Rien ne sert d'enflammer un secteur qui pourrait bien se mobiliser
et déposer un recours devant la cours européenne
de justice. Car en effet, si les droits de chacun apparaissent
clairement définis à l'aulne du droit français,
il en va tout autrement lorsque l'on considère le droit
européen. Au nom de la libre concurrence, la cours européenne
de justice a, en novembre 2003, donné raison à
un bookmaker anglais qui prenait des paris en Italie pour les
transmettre ensuite au Royaume-Uni, et ce contre le monopole
de l'Etat Italien (lire l'article
du 14/11/03).
Christophe Dhaines, directeur marketing online d'Unibet France,
site qui sponsorise non pas une équipe de Football,
mais une équipe cycliste qui a participé au
dernier Paris-Roubaix, ne cache d'ailleurs pas son agacement.
"Nous sommes frappés de l'aggressivité
de cette opération, confie-t-il, qui si elle s'étend
à d'autres acteurs, nous conduirait, au sein de l'European
Betting Association, à mettre en oeuvre des opérations
de lobbying au niveau de la communauté européenne."
La détente est donc loin d'être à l'ordre
du jour dans le secteur des paris en ligne pour les mois à
venir, d'autant que le décret confirmant le monopole
de la Française des Jeux et du PMU sur les jeux en
ligne en France expire en 2008.
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