ENQUETE 
Mercredi 21 novembre 2001
Zebank dans l'impasse

3. Février 2001 : place au recrutement actif

Un récit en 5 volets
1. Novembre 2000
Le temps presse
2. Décembre 2000
Le lancement commercial
3. Février 2001
Place au recrutement actif
4. Mai 2001
Zizanie et "cash-burning"
5. Octobre 2001
A la recherche d'un adossement

La marche forcée sur le recrutement client se reflète dans la mise en place de plusieurs dizaines d'opérations commerciales et promotionnelles en parallèle. Entre la carte Visa Premier gratuite, les chèques cadeaux à 100, 500 puis à 1 000 francs et les offres de parrainage à 250 francs, le télescopage commercial entre les différentes initiatives devient inévitable.

Certains partenaires supports de ces opérations vont menacer de se retirer après avoir découvert que l'hyperbanque proposait ailleurs des offres plus alléchantes. D'autres partenaires vont renégocier leur commission (à la base entre 150 et 400 francs par compte ouvert) en s'apercevant que le client qui ouvre un compte chez Zebank touche lui, en guise de bienvenue, un montant deux fois plus élevé que leur propre marge.

En aval de ces opérations commerciales, se trouve la gestion des dossiers d'ouverture de compte. Un des points sensibles soulignés par l'audit d'Arthur Andersen. La réglementation française bancaire en vigueur est à ce sujet très précise. Un établissement détenteur d'une licence d'exploitation doit demander deux documents à son futur client afin d'ouvrir une numéro de compte : une photocopie de sa pièce d'identité et un original de quittance justifiant d'un domicile fixe en France.

Si dans le cadre d'un réseau bancaire traditionnel cette procédure est sécurisée par un contact "physique" entre le conseiller et le futur client, dans le cadre d'une banque dématérialisée les problèmes potentiels grimpent en flèche. Entre les dossiers incomplets et les photocopies indéchiffrables reçues par courrier, les taux de déchet sur certaines opérations de recrutement auraient atteint chez Zebank les 70 %.

Autre problème : le dépôt d'ouverture de compte, normalement de 1 000 francs. Au fil des opérations commerciales grand public, de plus en plus de dossiers d'ouverture transmis par courrier vont arriver sans dépôt ou avec des chèques de dix francs, un franc voire zéro franc. "Nous n'avons rencontré ce genre de problèmes de qualité de dossiers clients que sur une seule opération commerciale en juin dernier, rétorque Olivier de Montety. La banque est un secteur d'activité très structuré et les procédures chez Zebank sont à ce sujet très précises."

Olivier de Montety

Homme clef de Zebank, Olivier de Montety a rejoint le projet dès le début, en 1999, sous l'impulsion de Chahram Becharat. Le président d'Europ@web veut alors lancer un courtier en ligne face au succès rencontré par les brokers aux Etats-Unis. En planchant sur ce projet, l'équipe de base (constituée d'anciens de Paribas, de la Banque Morgan et de Fimatex) imagine finalement une banque en ligne dotée d'un ensemble de produits financiers.

Avant de rejoindre Zebank, Olivier de Montety travaillait depuis 1988 pour le Groupe Fimat, propriété de la Société générale. Entré en tant que broker junior, il y fera carrière jusqu'en 1999. Alors qu'il est directeur des marchés dérivés d'indices et de la clientèle individuelle, il est ainsi nommé responsable du développement.
En 1995, Olivier de Montety participe au lancement du courtier en ligne Fimatex. Il dirigera Fimatex en France jusqu'en 1999 avant de rejoindre, sur le départ, Zebank.

"Dans la logique de recrutement à tout prix, les procédures de base du monde bancaire n'ont pas été respectées, souligne pourtant un ancien salarié de Zebank. Les dossiers ont été traités à la va-vite plutôt que de réclamer les pièces manquantes, de peur de faire fuir les nouveaux clients." Ces failles dans les procédures de contrôle vont attirer des clients aux motivations très particulières. Des fichés "Banque de France", qui n'ont théoriquement plus le droit d'ouvrir un compte dans un établissement bancaire, vont tenter de profiter de l'aubaine pour réintégrer une banque traditionnelle. Parmi ses refus, Zebank aurait ainsi brassé jusqu'à 63 % de clients "fichés".

D'autres clients, qui flairent la bonne affaire, vont tenter de cumuler les opérations commerciales à 1 000 francs en ouvrant plusieurs comptes, sans dépôt d'ouverture. Cette situation va émouvoir certains responsables de l'hyperbanque qui, dans plusieurs notes internes, soulignent les dangers de ce laxisme sur la vérification des dossiers d'ouverture. En pratique, une telle situation peut aboutir sur un retrait de l'agrément bancaire du Comité des établissements de crédit et des entreprises d'onvestissement.

La stratégie d'expansion commerciale est dans le même temps soutenue par plusieurs projets de développement menés en interne. Zebank explore ainsi la mise en place d'un réseau de DAB (distributeurs automatiques de billets) ou étudie un accord avec la société américaine Paypal qui propose une solution de paiement en ligne par mails. Une grande partie de l'équipe de l'hyperbanque va également travailler pendant un mois, en février 2001, sur un projet "révolutionnaire" initié par Philippe Jaffré.

Baptisé ZeCompte, ce projet veut mettre en place le premier compte courant français rémunéré, à 3 % net d'impôts. Une offre interdite par la réglementation bancaire mais qui peut offrir à Zebank un produit d'appel remarqué. Pour contourner la législation, la banque imagine un montage financier basé sur un dépôt à terme et un découvert en compte. Après plusieurs semaines de développement, le projet ZeCompte sera finalement abandonné. Les conseillers juridiques estimant que les risques encourus face au CRBF (Comité de la réglementation bancaire et financière) sont trop importants.

D'autres projets vont être mis de côté au fil du temps, à l'instar des développements internationaux de la banque en ligne. Les deux bureaux européens de Zebank, lancés courant 2000 en Espagne et au Royaume-Uni, vont être fermés début 2001 sur l'ordre direct de Bernard Arnault qui souhaite que Zebank se focalise sur le marché français pour aller plus vite. Jusqu'à 50 personnes travailleront au bureau londonien de Zebank dans le but d'aller chasser sur les terres d'Egg, la banque virtuelle britannique. En quelques mois d'existence, les deux filiales européennnes auraient "brûlé" 23 millions d'euros (150 millions de francs).
(Lire la suite >>
4. Mai 2001 : Une trésorerie consommatrice)

Un récit en 5 volets
1. Novembre 2000
Le temps presse
2. Décembre 2000
Le lancement commercial
3. Février 2001
Place au recrutement actif
4. Mai 2001
Zizanie et "cash-burning"
5. Octobre 2001
A la recherche d'un adossement

[Ludovic Desautez, JDNet]

 
 
Accueil |Haut de page
 
 

  Nouvelles offres d'emploi   sur Emploi Center
Chaine Parlementaire Public Sénat | Michael Page Interim | 1000MERCIS | Mediabrands | Michael Page International