Stéphanie Tramicheck (Pinterest) "Non, Pinterest ne cherche pas à devenir un site d'e-commerce"

La DG France de Pinterest revient sur les débuts des "buyable pins" lancés aux Etats-Unis le 30 juin sur mobile. Un canal qui pèse 80% du trafic de la plateforme.

JDN. Aux Etats-Unis, Pinterest a lancé le 30 juin des "buyable pins" sur iOS, c’est-à-dire des boutons Acheter sur les épingles. Selon Forrester, vous prévoyez que 60% des épingles seront bientôt achetables. Combien en existe-t-il pour l’instant ?

Stéphanie Tramicheck, DG France de Pinterest © S. de P. Pinterest

Stéphanie Tramicheck. Tout d’abord, à ma connaissance, cet objectif de 60% d’épingles achetables ne vient pas de Pinterest. Nous avons travaillé en amont avec des partenaires comme Macy’s, Neiman Marcus, Demandware et Shopify, ce qui nous a permis d’afficher au lancement 30 millions d’épingles avec ce nouveau bouton d’achat bleu qui s’ajoute donc au bouton "re-pin" [sur un total de 45 milliards d’épingles, ndlr].

Il pointe vers une page de checkout, toujours sur Pinterest mais fournie par le marchand. On y renseigne par exemple la couleur et la taille, puis on paie avec Apple Pay ou par carte bancaire via Stripe ou Braintree.

Un concurrent comme Fancy, qui essaie lui aussi de déclencher l’achat d’impulsion sur mobile, n’a toujours pas décollé. Pourquoi Pinterest y parviendrait-il mieux ?

Les utilisateurs de Pinterest étaient frustrés de ne pas pouvoir acheter. Une récente de Millward Brown sur nos utilisateurs actifs aux Etats-Unis a montré que 93% ont déjà utilisé Pinterest pour préparer un achat et que 87% ont déjà acheté un produit après l’avoir vu sur Pinterest. Notre plateforme est très efficace pour provoquer ce passage à l’action, en particulier dans la mode et la beauté. Jusqu’ici, il demeurait pas mal de freins, surtout sur mobile. Ce bouton simplifie beaucoup les choses.

Que les utilisateurs veuillent pouvoir acheter est une chose, encore faut-il qu’il y ait assez d’épingles achetables, de produits en stock et de stocks pas trop faibles…

C’est la raison pour laquelle nous intégrons les flux de Demandware et Shopify, qui gère les flux de centaines de milliers de marchands petits et gros. De cette façon, les stocks sont à jour.

Entre les produits épinglés par les particuliers et ceux postés par des marques ou marchands mais qui ne sont plus en vente (et qui sont les plus partagés puisque les plus anciens), la proportion des épingles achetables n’est-elle pas condamnée à rester basse ?

D’une part, ce bouton d’achat est dynamique et n’apparaît bien sûr que si l’article est en vente. Il est même possible de créer des alertes, par exemple pour être prévenu si le prix d’un produit épinglé a baissé. D’autre part, les marchands qui font bien leur travail peuvent très bien faire pointer l’épingle d’un ancien produit vers un produit similaire qui est lui en vente. Enfin, faire découvrir des produits est précisément l’une des grandes compétences de Pinterest, qui sait donc mettre en avant les articles achetables.

S’il y a des ventes, cela incitera les marques à acheter des épingles publicitaires

Prévoyez-vous de vous rémunérer sur les ventes générées par les "buyable pins" ?

Non, nous ne prenons aucune commission sur les ventes et excluons d’adopter à l’avenir un modèle de marketplace. Nous nous disons que s’il y a des ventes, cela incitera les marques à acheter des épingles publicitaires. Or nous avons déployé une offre publicitaire très complète pour répondre à leurs besoins : au CPM, au CPC et maintenant au CPA pour les "buyable pins", qui à eux trois composent ce que nous appelons le tunnel de conversion du futur. Nous sommes un média. Notre mission consiste à aider les gens à découvrir, sauvegarder et partager, ainsi qu’à aider les marques à remplir leurs objectifs de business en restant dans cet esprit. Si nous sommes bons dans notre mission, le business suivra. Et monétiser notre service nous permettra de l’accomplir mieux encore, en embauchant et en étoffant nos fonctionnalités. Mais nous ne chercherons pas à devenir un site d’e-commerce.

Pinterest s’est lancé en France il y a deux ans. Quel bilan tirez-vous ?

En 2014 nous avons multiplié par trois le nombre d’utilisateurs actifs dans l’Hexagone et ils ont ajouté 32 millions d’épingles. Globalement, le nombre d’épingleurs étrangers a été multiplié par 3,5 en 2014. Ils représentent maintenant 40% des épingleurs de Pinterest.

Les épingles achetables et ce tunnel de conversion du futur sont pour l’instant réservés aux Etats-Unis. Quand arriveront-ils en France?

Peut-être en 2016. Mais il y a encore beaucoup de choses à faire sur ces produits avant de les internationaliser. Dans un premier temps, nous allons porter les "buyable pins" sur Android, puis sur le Web fixe. En France, notre mission est d’abord de développer l’audience.

Ces derniers mois, l’audience fixe de Pinterest en France était légèrement inférieure à 2,5 millions de VU, selon Médiamétrie//Netratings. Comment allez-vous la développez ?

Tout d’abord attention, ces chiffres ne prennent pas en compte le mobile, qui représente la majorité de notre trafic : 80% au niveau global et bien plus de 50% en France aussi. Pour le développer encore, nous travaillons beaucoup sur ce qui se passe en France et plaît aux consommateurs français. Et comme il n’y a pas que Paris, nous allons aussi en région et organisons par exemple des soirées à Nantes, Lyon, Strasbourg ou Bordeaux. Nous adaptons les fonctionnalités pour qu’elles soient mieux utilisables par les épingleurs français, nous adaptons aussi les contenus et tout ce qui est important pour les marques et les influenceurs.