Diego Magdelénat (Pickup Services) "Les consignes automatiques n'ont de sens qu'en complément de points relais"

Pickup Services comptera 500 Pickups Station fin 2015. Son PDG détaille sa stratégie pour ces consignes automatiques, qui prennent le relais au-delà de 50 colis par jour.

JDN. Vous avez commencé à déployer des consignes automatiques Pickup Station en novembre dernier. A combien en êtes-vous ?

Cofondateur et PDG de Pickup Services © S. de P. Pickup Services

Diego Magdelénat. A un peu plus de 130 consignes en France, que nous porterons à 500 fin 2015 puis à 1 000 fin 2016. Et d'autres pays sont prévus. Mais les Pickup Stations s'inscrivent en complément de notre réseau de relais, sinon cela n'a pas de sens.

Vous ne croyez pas aux réseaux de consignes autonomes ?

Pas du tout. Car pour être présent sur tout le territoire, il faut plusieurs formats, capables de gérer différentes volumétries. Si le nombre de colis n'est pas suffisant, les consignes ne sont pas intéressantes. Nous avons donc trois formats.

Les relais prennent pour la plupart 10 à 40 colis par jour. Nous en avons 22 000 dans 15 pays, dont 7 800 en France, ce qui fait de nous le premier réseau de points de retrait. Les consignes Pickup Station prennent le relais jusqu'à 100 ou 120 colis par jour. Au-delà, les Pickup Stores montent à 500 colis par jour. Pour l'instant nous expérimentons ce format dans trois gares SNCF : la gare Saint-Lazare, celle d'Ermont-Eaubonne et celle d'Evry-Courcouronnes.

Comment fonctionnent ces Pickup Stores ?

Ce sont des solutions pour des points très particuliers. Par exemple, la gare Saint-Lazare enregistre 450 000 passages par jour : une consigne ne suffirait pas. Les Pickup Stores prennent la forme de boutiques où des équipes vous délivrent vos colis. Mais nous y commercialisons aussi des produits – café, chocolat, vin…- et des services – pressing, relais postal…- qui nous permettent d'agrémenter leur business model. Alors que dans les relais, les petits commerçants font des ventes auprès des utilisateurs de Pickup pour générer un complément de revenu, les Pickup Stores font l'inverse.

Quels emplacements favorisez-vous pour les Pickup Stations ?

D'abord les gares, où nous avons installé les 100 premières. Notre objectif prioritaire est de nous placer sur le chemin de retour des gens qui sortent du bureau. Nous développons donc notre partenariat avec la SNCF, dont les usagers expriment une attente importante vis-à-vis de tels services. La même logique nous pousse à investir d'autres sites intermodaux, comme les gares de tramways.

L'arrivée des Amazon Lockers en France est une bonne chose.

Nous voulons aussi en installer au coeur des villes pour absorber les volumes que ne peuvent plus gérer certains relais saturés. Dans ce cas, nous visons plutôt les bureaux de poste, soit dans un sas accessible à des horaires plus étendus, soit en extérieur, contre le bureau de poste. Enfin nous envisageons des partenariats avec des universités, certains hôpitaux, nous expérimentons avec la RATP et nous discutons avec la grande distribution. Par exemple, nous avons implanté des relais dans des Système U et Casino. Si la volumétrie s'accroit, on pourra les compléter ou les remplacer par des consignes.

Y a-t-il des innovations notables dans les casiers eux-mêmes ?

L'armoire dont les portes sont contrôlées par un ordinateur central, c'est une technologie qui existe depuis 15 ans. Depuis, elle n'a pas évolué de façon significative. Saisir un code manuellement ou scanner un code-barre pour ouvrir un casier ne crée plus d'effet waouh depuis longtemps. Ce que nous avons ajouté avec notre partenaire Neopost est une balance dans chaque casier. Dans chaque casier on sait s'il y a un colis et quel est son poids exact. S'il ne correspond pas avec le poids enregistré précédemment dans le hub du transporteur, cela déclenche une alerte. Même chose si un utilisateur dit avoir retiré sa commande alors qu'il y a toujours un poids : une alerte se déclenche, car il a sûrement mis quelque chose à la place.

Proposez-vous dans vos consignes un service de retours produits ?

Pas pour l'instant. La sécurité reste plus facile à maîtriser sur les flux descendants. Nous ne ferons dans un certain nombre de consignes en fonction du besoin identifié localement, mais nous ne travaillons pas là-dessus actuellement. Pour le moment les retours peuvent passer par nos relais, y compris avec des procédures complexes comme l'échange de smartphones que nous faisons pour le compte d'Orange.

 

Proposez-vous d'autres types de services ?

Une consigne n'apporte pas grand-chose de plus qu'un point de retrait

Pas à ce stade, même si nous réfléchissons à plusieurs possibilités. Cela dépend aussi du pays que l'on considère. Par exemple, en Europe du Nord et en Allemagne, les réseaux de points relais sont principalement utilisés pour les retours, tandis qu'en France 80% des flux relèvent de la livraison. Nous adaptons donc notre offre de services aux besoins locaux.

De quel œil voyez-vous l'arrivée des Amazon Lockers en France ?

C'est une bonne chose. Comme on son temps Kiala pour les points relais, cela devrait contribuer à évangéliser le marché et créer une dynamique autour de ce métier. Mais rien de plus à mon avis, dans la mesure où il n’existe pas de différence fondamentale entre une consigne et une autre.

N'est-ce pas tout de même une bonne nouvelle pour vous, dont les clients e-commerçants vont vouloir s'aligner sur leur concurrent Amazon ?

Je n'y crois pas vraiment, car dans le fond une consigne n'apporte pas grand-chose de plus qu'un point de retrait. Or prenez Cdiscount, il en a déjà énormément, pour couvrir le hors-domicile. Alors peut-être y a-t-il un attrait marketing de la consigne, qui plaît au consommateur parce qu'elle paraît plus nouvelle, plus technologique. Un certain nombre de marchands, qui utilisent déjà massivement les relais, montrent d'ailleurs de l'intérêt pour les consignes. Mais en réalité, les relais font déjà tout aussi bien.

Les horaires plus larges que ceux des points relais sont quand même très attractifs !

Oui et non. Sur cette question il faut faire attention aux mythes. Dans la tranche 23h-6h du matin, il ne se passe rien, tout le monde est d'accord là-dessus. La tranche 19h-21h, en revanche, est vraiment stratégique. Mais la rendre utilisable n'est pas propre à la consigne. Certains de nos relais sont ouverts à ces heures-là, les Pickup Stores aussi. Quant aux consignes, tout dépend en réalité de l'endroit où elles sont implantées et de ses horaires d'ouverture.

En réalité, le relais a un gros intérêt : il revient beaucoup moins cher. Une consigne coûte cher à implanter, beaucoup plus qu'un point de retrait, quel que soit l'opérateur. Comme nous nous efforçons de proposer la meilleure solution au meilleur prix partout, nous intégrons nos consignes à notre réseau global, au même tarif. Mais seule une grosse volumétrie nous permet de la rentabiliser. Et ce n'est pas pour rien que nous n'avons pas repris le modèle de local en propre de Cityssimo.