Thierry Dethoor (Excedence) "Nous ne contrôlons pas les collections que nous vendons. C'est parfois un avantage."

Excedence.com est le site de déstockage du groupe 3 Suisses. Comment fonctionne-t-il ? Quels sont ses objectifs ? Réponses de son directeur.

JDN. Qui est Excedence ?

Thierry Dethoor. En 1997, le groupe 3 Suisses a créé Cogemag, la Compagnie générale des magasins, pour commercialiser les excédents de certaines de ses enseignes, 3 Suisses France, Becquet, Blanche Porte et l'Espagnole Venca pour les principales. Les produits vendus vont donc du vêtement au gadget électronique en passant par la maison. La marque qui les vend, Excedence, dispose aujourd'hui de 22 magasins, d'un site marchand depuis 2005 et d'un canal solderie qui vend en lots les excédents d'excédents à des acheteurs africains ou asiatiques.

"Notre objectif est d'écouler au plus vite les excédents des 3 Suisses. Si nous sommes rentables, tant mieux."

Autrement dit, lorsque vous manquez d'excédents à vendre, c'est bon signe pour les enseignes ?

Oui, c'est qu'elles achètent mieux ou écoulent mieux. Notre objectif est d'écouler le plus vite possible les excédents de ces enseignes pour libérer de la place dans leurs entrepôts pour leurs produits plus frais.

Et à l'inverse, si vous allez bien, c'est que vous avez des choses à vendre et donc que les enseignes se portent mal ? Avez-vous vocation à croître ?

Le groupe a plusieurs façons d'écouler ses stocks : le coin "bonnes affaires" sur 3Suisses.fr, les catalogues "pricelist" envoyés en fin de saison pour présenter ce qui reste des collections, les soldes et les soldes flottants... La cellule achat estime le niveau des stocks et les répartit sur les différents canaux. S'il y en a vraiment beaucoup, cela arrive chez nous. Ensuite, si nous arrivons à être rentables, tant mieux. Pour l'instant c'est le cas, mais pas de beaucoup, car nous dépendons entièrement de ce que nous envoient les enseignes.

A combien s'élève votre chiffre d'affaires ?

Points de vente et Internet confondus, Cogemag réalise un chiffre d'affaires annuel d'environ 25 millions d'euros. Le site Excedence.com est le premier magasin, de loin, et notre croissance s'accélère : elle sera à deux chiffres en 2009. En effet, nous progressons dans nos process, notamment d'approvisionnement, ce qui nous permet de proposer un catalogue plus fourni. Sachant aussi que comme il n'y a pas de date fixe à laquelle les enseignes nous confient leurs excédents, cela peut faire bouger assez significativement notre chiffre d'affaires. Lorsque nous nous sommes lancés, beaucoup ne pensaient pas qu'un site de déstockage d'un groupe comme 3 Suisses avait sa chance. Au final, nous marchons plutôt bien !

Vous ne contrôlez pas les collections que vous vendez. Quelles sont les conséquences sur votre activité ?

Nous ne contrôlons en effet ni la profondeur, ni la largeur de gamme. L'une des conséquences est que nous ne pouvons pas être présents sur les comparateurs de prix car le modèle au CPC nous coûterait beaucoup trop cher. Pour chaque produit qui serait cliqué, il y aurait trop de risques que l'internaute ne trouve pas sa taille, son coloris, et que nous ne l'ayons payé pour rien. En revanche nous allons bientôt aller voir Twenga, son fonctionnement au CPA nous convenant beaucoup mieux.

"Nous ne pouvons pas être présents sur les comparateurs car le modèle au CPC nous coûterait trop cher"

Une autre conséquence, plus évidente, est que les collections que nous commercialisons sont souvent en retard d'un an ou d'un an et demi par rapport aux enseignes qui nous les fournissent. En ce moment, les collections printemps-été arrivent dans notre entrepôt. Nous pouvons vendre dès maintenant les produits de mi-saison mais les autres devront attendre six mois.

Quelles sont les autres caractéristiques de votre métier ?

Certains inconvénients inhérents à notre activité peuvent devenir des avantages commerciaux. Par exemple, comme nous n'avons pas toujours toutes les tailles, il serait trop compliqué de gérer des prix différents en fonction de la taille. Une jupe en 36 et en 56 sera donc vendue à un prix unique, ce qu'apprécient beaucoup les clients. Dans le même ordre d'idée, comme nos stocks ne sont pas très profonds, nous nous sommes imposé de les afficher en temps réel, sans quoi les clients auraient passé leur temps à voir leurs commandes invalidées.  

Mais surtout, nous avons développé une logistique extrêmement réactive : les excédents arrivant en permanence, la rotation de nos stocks est très rapide. Sur une année, nous voyons passer des volumes beaucoup plus importants qu'une grosse enseigne. Enfin, notre fonctionnement en PME - nous ne sommes que huit - nous permet une réactivité et un dynamisme qui sont pour beaucoup dans notre réussite.  

Vous avez récemment reçu un prix Qualiweb pour la qualité de votre relation client par e-mail...

Nous avons en effet fini troisième de la catégorie VAD, derrière Yves Rocher et Pierre Ricaud, et 18e site le plus accueillant sur les 310 audités. Nous en sommes d'autant plus fiers que nous estimons que le principal facteur de succès d'Excedence est sa relation client. Comme nous n'avons pas de budget communication, nous misons tout sur la fidélisation.

Nous menons en particulier une enquête de satisfaction systématique à l'issue de la commande ainsi qu'à la réception des achats. La première remonte des problèmes techniques ou de navigation, tandis que la seconde porte davantage sur la qualité des produits ou les questions de livraison. Cela nous donne une idée très précise de nos points forts et de nos points faibles. Par exemple, il nous est un jour apparu que les clients en avaient assez de passer du temps à chercher leur taille, parfois pour rien. Nous avons donc fait en sorte que les tailles disponibles s'affichent directement sur les fiches produits et ajouté la taille dans les critères de recherche de notre moteur.

Sans budget communication, comment vous faites-vous connaître ?

"Nous envisageons de centraliser nos bases clients avec les magasins Excedence"

Les gens ne nous connaissent qu'au travers de notre base clients et du site, qui affiche le logo 3 Suisses. Grâce à cette référence au groupe, nous sommes bien positionnés sur Google. A l'inverse, et contrairement à LesAubaines.fr qui est complètement intégré à LaRedoute.fr, Excedence.com ne figure pas sur 3Suisses.fr.

Vous venez aussi de lancer un blog...

Il s'agit de Kilucru.fr, ouvert mi-août. Nous ne voulions pas faire un blog de marque car il nous semble très difficile de savoir parler de sa marque, qui plus est régulièrement. Regardez par exemple celui de Nike, qui ne reçoit plus que 5 000 visites par mois, tout le trafic ayant été reporté sur Facebook... Kilucru.fr porte donc sur le thème des économies faciles. Si sa taille est modeste, c'est surtout parce que nous sommes très peu nombreux. Mais l'important était de commencer et les débuts sont encourageants.

Quels sont vos projets pour les mois à venir ?

Pour l'instant, le site est complètement déconnecté des magasins. Nous n'avons pas de politique produit ou de politique de prix communes. Nous pourrions commencer par centraliser nos bases clients pour pouvoir mutualiser nos e-mailings. Côté CRM, nous allons bientôt ajouter au site des pages de témoignages. Nous ne pouvons pas proposer des avis consommateurs car la durée de vie des produits est chez nous bien trop éphémère. Nous avons donc choisi de remonter des éléments des enquêtes de satisfaction, pour que des clients potentiels puissent se faire une meilleure idée de notre service.