Retargeting Mobile : info ou intox ?

Pour poser un cadre sur des termes parfois obscurs, le programmatique est un mode d’achat automatique permettant d’acquérir une impression publicitaire - et non plus un lot de mille impressions - à un prix dynamique.

Pour ce faire, il est possible de cibler un utilisateur en prospection - c’est à dire lorsque ce dernier n’a pas présenté d’intérêt particulier pour la maque annonceur, bien que son profil puisse être affinitaire avec celle-ci – ou en retargeting – reciblage en français – qui intervient, au contraire, lorsque l’internaute a suscité un intérêt pour la marque annonceur, permettant ainsi de retoucher cet internaute sur un autre site que celui de sa marque.
Jusqu'à présent, les annonceurs mobile, éditeurs d’applications et de sites, étaient contraints d’orienter leurs budgets média vers de l’achat Display traditionnel, peu transparent et bien souvent sous-performant, dans une logique unique d’acquisition d’utilisateurs.
L’émergence de l’achat programmatique révoque ce postulat. Le ciblage devient intelligent, au grand plaisir des annonceurs, permettant alors de personnaliser le message adressé à un utilisateur mobile.
Le programmatique permet aussi, bien que ce point soit souvent négligé, le renouveau du mode de facturation au CPM (Coût Par Mille impressions), qui avait progressivement laissé place au CPC (Coût Par Clic) puis au CPI (Coût Par Installation), régressant de fait sur la transparence qu’un annonceur pouvait espérer sur sa campagne. Si l’achat programmatique apporte une transparence sur les apps et URL, il l’apporte également sur les coûts pratiqués.

Limites du ciblage publicitaire mobile

Qu’il s’agisse de Display traditionnel ou de programmatique, le mobile reste un nouveau levier, dont les barrières technologiques limitent fortement la croissance qui lui est attribuée chaque année.

1. Web vs. in-app

Contrairement au web, le mobile est un double écosystème, partagé entre le monde applicatif et la webosphère. Chaque annonceur y voit sa stratégie propre, à raison, et fragmente d’autant plus ce marché.

2. Identification d’audience

Conséquence malheureuse de cette première remarque, la double sphère mobile complique l’identification des utilisateurs entre les deux canaux. En effet, il est aujourd’hui difficile, voir même impossible sur de nombreux supports, d’identifier un utilisateur unique entre son surf in-app et web mobile. Conséquence : il devient difficile d’adapter intelligemment une fréquence d’exposition publicitaire personnalisée par utilisateur. Mal régulée, la publicité qui se veut pourtant intelligente, régresse sur la tendance du matraquage publicitaire.

3. Cross-device : un casse-tête

Impossible d’y échapper, le cross-device fait parler de lui sur tous les supports depuis plus d’un an. Il est en effet de bon ton de polémiquer sur l’identification d’un utilisateur entre ses différents supports (desktop, mobile, tablette, etc.), bien qu’il soit aujourd’hui presque impossible d’identifier un utilisateur sur des supports distincts. A date, la meilleure solution réside dans l’identifiant unique, mais pour cela, il faut attendre le renouveau des géants du marché – notamment Google – qui peinent à avancer, se heurtant aux différentes législations en terme de partage des donnés privées.

4. Tracking mobile

Qu’il s’agisse de Display traditionnel ou de programmatique, le tracking mobile a toujours été au centre des discussions. Secret de polichinelle autour de la véracité du Fingerprint ou encore limites techniques du cookie sur mobile, le tracking mobile fera encore couler beaucoup d’encre en 2014, soyez en certains.

Limites du retargeting mobile

Pour recibler un utilisateur 1st party sur mobile, il faut pouvoir l’identifier. Google et Apple, les deux géants du marché, ne facilitent pas la tâche aux annonceurs et leurs prestataires technologiques.
Etat des lieux :

I. Web mobile

Partant du postulat que 95% des utilisateurs d’iOS (iPhone et iPad confondus) naviguent sur le web mobile à partir du navigateur Safari, le reciblage publicitaire se trouve fortement entravé par l’impossibilité d’utiliser des cookies – par défaut. Des solutions annexes se développent, dans une logique de respect de la confidentialité des utilisateurs, mais celles-ci sont aujourd’hui marginales et partiellement efficaces, la vraie révolution est toujours attendue.
  • Android
Contrairement à Safari, les devices sous Android acceptent les cookies. Il faut néanmoins souligner que peu d’éditeurs autorisent les cookies sur Android, faute de support technologique, ce qui induit un paradoxe évident entre disponibilité du trafic et capacités techniques.

 II. Retargeting in-app

Dénominateur commun aux deux plateformes iOS et Android, les cookies ne sont pas supportés sur les applications mobiles. De fait, il est nécessaire d’utiliser des solutions de ciblage annexes, offertes par les plateformes OS elles-mêmes. On parle de Device ID anonymisés - identifiants propres à chaque device. Cet identifiant unique permet aux marketeurs d’isoler efficacement un utilisateur parmi la masse, pour créer des segments d’audience, comme tel aurait été le cas avec un cookie.
  •  iOS
Le device ID d’Apple se nomme IDFA (ID For Advertisers). Cet identifiant unique remplace l’UDID, précédent système de tracking décrié pour son non-respect des normes de confidentialité en vigueur. Via cet identifiant unique, il est donc possible de recibler efficacement un utilisateur. Les places de marché programmatiques (adexchanges) sont généralement assez transparentes avec l’IDFA puisque celui-ci est disponible sur près de 70% du trafic in-app.
  • Android
Le device ID d’Android se nomme Android_ID. Outre les problématiques qu’il rencontre avec la protection de la vie privée des utilisateurs – contrairement à l’IDFA, l’Android ID ne possède pas d’opt-out permettant à l’utilisateur de s’opposer aux messages véhiculés par celui-ci - il ne facilite en aucun cas le retargeting puisque cet identifiant unique n’est pas si unique qu’il n’y paraît.
A travers la très large diversité des devices, il faut aussi distinguer la diversité des systèmes d’opération, multipliant les variables Android_ID, compliquant – bien que n’empêchant pas, pour certains prestataires technologiques performants - la démarche de reciblage. Google annonce cependant lancer un nouvel identifiant très prochainement qui devrait répondre aux nouveaux besoins du marché, dont la problématique cross-device, du moins espérons le !

Conclusion

Le retargeting mobile est certes efficace mais néanmoins aujourd’hui limité, pour tout l’écosystème. Forts de discours purement marketing, les acteurs mobiles ont bien souvent tendance à négliger ces barrières.
Que nous parlions targeting ou retargeting, les outils, la méthodologie ou encore le tracking ne seront pas les mêmes. Le ciblage en achat programmatique s’étend de la notoriété - lorsque le format s’y prête - à l’acquisition d’utilisateurs actifs, car ciblés efficacement via des moyens inexploitables sur le Display traditionnel. Quant au retargeting, il s’agit tout bonnement d’un réengagement de l’utilisateur déjà visiteur du site mobile de l’annonceur ou possesseur de l’application, dans le but de maximiser le ROI et réduire la déperdition dans le temps - notamment la désinstallation d’apps.
Si vous avez déjà engagé des campagnes d’acquisition massives d’utilisateurs sous le modèle d’apps de recommandations, le retargeting est en effet un outil incontournable. Les budgets engagés sur des leviers tels que la recommandation d’app méritent des moyens efficaces pour soutenir ces efforts chèrement payés.
Toutes choses étant relatives, l’achat programmatique n’est réellement efficace que dans la mesure ou l’annonceur prend la peine d’auditer les différents acteurs de l’écosystème. Toutes les technologies ne se valent pas, et encore moins le capital humain aux commandes de ces algorithmes. C’est pourquoi le choix d’un partenaire technologique va être déterminant dans la capacité de l’annonceur à surmonter – ou par ailleurs à ne pas surmonter - les limites d’un écosystème extrêmement fragmenté.