Piratage : Christine Albanel et l'UFC-Que Choisir s'affrontent par sites Web interposés

D'un côté, Jaimelesartistes.com, site de promotion de la loi anti-piratage du ministère de la Culture ; de l'autre, Ça-va-couper.fr, site de l'UFC-Que Choisir dénonçant cette loi. Lequel va l'emporter sur l'autre ?

Jeudi 30 octobre au soir, le projet de loi Création et Internet, visant à lutter contre le piratage des œuvres sur Internet via un mécanisme de riposte graduée pouvant conduire jusqu'à la suspension de la connexion, a été adopté à une très large majorité par les sénateurs. Le même jour, dans l'après-midi, deux sites dits de "sensibilisation des jeunes" sur cette loi ont été mis en ligne sur la Toile française : l'un vantant les mérites de la réponse graduée, l'autre dénonçant ses "conséquences désastreuses".

Deux ans après Lestelecharegements.com, site de débat autour du téléchargement et des droits d'auteurs sur Internet mis en ligne à l'occasion de l'examen de la loi Dadvsi (loi sur le droit d'auteur et droits voisins dans la société de l'information, votée en juin 2006), le ministère de la Culture et de la Communication a décidé de repartir en campagne contre le piratage via un site Internet, Jaimelesartistes.com.

"Devant l'ampleur du piratage des œuvres culturelles par Internet, et sans attendre l'adoption du projet de loi, Christine Albanel, ministre de la Culture et de la Communication, a décidé de sensibiliser les jeunes aux conséquences de cette pratique illégale pour les artistes et les métiers de la culture, et à la nécessité de réguler les échanges de musique ou de films en ligne", indique le ministère dans un communiqué.

Sans ambiguïtés, Jaimelesartistes.com vise à défendre et promouvoir auprès des jeunes le projet de loi Création et Internet, et notamment son volet répressif. "La mise en place d'une réponse graduée au piratage, essentiellement préventive et pédagogique, permettra de préserver et de développer l'offre de musique, de films, de programmes audiovisuels et de jeux vidéos", explique le site.

Accessible en français, en anglais, en espagnol et en allemand, le site propose notamment un décryptage en dix questions du projet de loi, un lexique, quelques vidéos de politiques et une présentation avec liens des offres légales d'œuvres culturelles en ligne.

La campagne J'aime les artistes sera relayée par des e-mails de sensibilisation, des diffusions de messages radio, des bannières sur les sites les plus fréquentés par les jeunes et des actions de marketing de rue sur les lieux de concert.

Le même jour était mis en ligne un site d'un autre genre, d'un autre bord : Ça-va-couper.fr, mettant en scène, au travers de quatre vidéo, le personnage peu sympathique et menaçant de Dédé, un (faux) agent de l'Hadopi (Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet) qui traque les internautes pirates. Chaque vidéo rappelle les différentes étapes de la réponse graduée : avertissements par e-mail, puis par lettre recommandée, et enfin la sanction ultime, la suspension de l'accès Internet.

Derrière cette campagne se cache l'UFC-Que Choisir qui a délibérément choisi d'abandonner sa communication institutionnelle pour adopter un ton humoristique, afin de toucher les jeunes. Premier buzz en ligne de l'association de défense des consommateurs, Ça-va-couper.fr se veut également une campagne de sensibilisation de l'opinion publique "aux conséquences désastreuses" du projet de loi Création et Internet, explique Cédric Musso, directeur adjoint des études et de la communication de l'UFC-Que Choisir.

Le site propose des liens vers des contenus du site Internet de l'association : une synthèse du projet de loi Création et Internet, une présentation du projet en dix questions et surtout les six principaux griefs de l'UFC-Que Choisir contre ce texte, qualifié de "répressif", "liberticide", "techniquement irréaliste", "onéreux mais non rémunérateur pour les artistes" et "contraire au droit communautaire".

Ça-va-couper.fr a été entièrement réalisée en interne par l'UFC-Que Choisir. Le site ne bénéficie d'aucun relais marketing - hormis un e-mail de teasing envoyé à une base de journalistes le 30 octobre. L'association compte en effet sur l'effet "buzz" : un module de "dénonciation" permet d'envoyer l'adresse du site à ses amis. Le site propose également aux internautes de "rester connectés, c'est-à-dire de laisser leurs e-mails pour être informés des évolutions de la loi et des actions futures de l'UFC-Que Choisir qui n'exclut pas, après la sensibilisation, de lancer une campagne de mobilisation des consommateurs.