Si la loi Evin condamne par défaut la publicité pour l'alcool sur Internet,
jamais le législateur ou l'exécutif ne se sont réellement penchés sur le statut
particulier de ce média en matière de publicité pour l'alcool.
Composé de textes, d'images et de sons, le Web relève à la fois de la radio, de
la télévision ou de la presse écrite. Or aucun de ces trois supports de publicité
ne bénéficie du même statut au regard de la loi Evin.
La télévision avait par exemple été d'emblée exclue des médias autorisés
à vanter les boissons alcoolisées lors de l'élaboration de la loi, au début des
années 90. "Un des objectifs de ce texte était d'éviter que les jeunes soient
exposés à ces messages publicitaires", rappelle Claude Evin. L'impact de la vidéo
par rapport à la photo avait également tranché en faveur d'un bannissement de
la télévision et du cinéma. La presse écrite a au contraire obtenu le droit
de diffuser de la réclame pour l'alcool, à l'exclusion des publications destinées
à la jeunesse. Certaines stations de radio ont enfin obtenu le sésame publicitaire,
mais seulement pour certaines tranches horaires, fixées par décret.
La loi du 12 janvier 1991, dite loi Evin ©
DR
Quel statut doit s'appliquer à Internet dans le cas d'une modification de la
loi Evin ? "Cette question constitue un casse-tête car Internet ne se définit
pas nécessairement par opposition aux autres médias", explique Thibaut Verbiest,
avocat associé au cabinet Ulys. "Dans l'affaire Heineken, le tribunal a d'ailleurs
estimé qu'il s'agissait d'un média à part entière." L'ANPAA préconise qu'en
cas d'ajout du Web dans la loi Evin, seuls quelques sites puissent être autorisés
à diffuser de telles publicités, notamment ceux en rapport direct avec l'alcool,
tels des sites d'e-commerce de vins ou des sites spécialisés.
Reste que cette solution comporterait encore quelques incertitudes : un site
de recettes de cuisine serait-il autorisé à vanter une boisson alcoolisée ?
Quid des sites de partage de vidéos (s'apparentant à de la télévision) hébergeant
des clips sur de l'alcool ? Le casse-tête reste posé.