Rachat de TeliaSonera : France Télécom jette l'éponge

Les deux groupes ne sont pas parvenus à s'entendre sur les modalités financières de l'offre de rachat, jugée insuffisante par TeliaSonera. Retour sur l'échec de cette fusion.

France Télécom a annoncé, lundi 30 juin dans un communiqué, avoir retiré son offre amicale de rachat de l'opérateur scandinave TeliaSonera, faite le 5 juin dernier, faute d'un accord avec sa cible sur les conditions financières de l'opération. Un échec pour l'opérateur télécoms français pour qui cette acquisition faisait sens d'un point de vue stratégique.

L'opération avait toutefois mal commencé dès le départ, puisque l'information de l'intérêt de France Télécom pour TeliaSonera avait été révélée dans la presse française le 16 avril dernier, alors qu'aucune discussion n'avait encore été engagée entre les deux groupes. Une "fuite" qui a fait perdre plus de 6 milliards d'euros de capitalisation boursière en deux jours à France Télécom.

Après avoir tergiversé pendant plus d'un mois, France Télécom avait finalement présenté le 5 juin un projet d'offre non contraignante en numéraire et en actions, valorisant TeliaSonera autour de 27 milliards d'euros, auxquels s'ajoutait une reprise de dette de 4,5 milliards d'euros. TeliaSonera avait immédiatement rejeté sa proposition, la jugeant insuffisante sur le plan financier. Deux semaines plus tard, France Télécom avait laissé entendre qu'il pourrait relever la part en cash de son offre mais que sa marge de manoeuvre était "extrêmement limitée".

Selon le Wall Street Journal, France Télécom négociait encore dimanche 29 juin avec l'opérateur suédo-finlandais afin de trouver un accord. "Malgré l'intérêt marqué en faveur de ce projet, le dialogue ouvert avec le conseil d'administration de TeliaSonera n'a pu aboutir à un accord sur les paramètres financiers", annonce le lendemain France Télécom. De son côté, TeliaSonera prend acte dans un communiqué de la décision du Français et précise que les deux groupes "n'ont pas pu se mettre d'accord car il n'y a pas eu d'amélioration de l'offre."

répartition activités ft et teliasonera
Répartition géographique des activités de France Télécom et de TeliaSonera © Idate, "Vers une fusion France Télécom / TeliaSonera ?"

Pour France Télécom, qui compte devenir un acteur majeur des télécoms en Europe, le mariage avec TeliaSonera faisait pourtant sens d'un point de vue stratégique.

Géographiquement tout d'abord. A travers les filiales de France Télécom dans quatre des principaux pays européens (France, Royaume-Uni, Espagne et Pologne) ainsi qu'en Belgique, et celles de TeliaSonera dans tous les pays scandinaves et baltes (Suède, Finlande, Danemark, Norvège, Lituanie, Lettonie, Estonie), c'est la moitié de la population de l'Union européenne que le nouvel ensemble aurait couvert, analyse Didier Pouillot, responsable de la "Practice Economie des télécoms" à l'Idate, dans une lettre d'information publiée le 18 juin et intitulée "Vers une fusion France Télécom / TeliaSonera ?".

D'un point de vue des synergies stratégiques également. Les deux opérateurs ont en effet une vision similaire du métier d'opérateur convergent fixe et mobile. La combinaison des deux groupes aurait permis à terme "des économies d'échelle en matière de R&D, en particulier sur la partie désormais essentielle de développement d'offres produits", explique la lettre de l'Idate.

Enfin, la fusion aurait permis de créer un acteur européen de premier plan, avec un chiffre d'affaires annuel 2007 agrégé de 63 milliards d'euros, au coude à coude avec deutsche Telekom (62,5 milliards d'euros) et devant Telefonica (56,4 milliards d'euros). En parc de clients, le nouvel ensemble aurait représenté 126,8 millions d'abonnés à la téléphonie mobile (source: chiffres publiés sur le premier trimestre 2008 par les deux groupes) et 14,4 millions d'abonnés Internet haut débit.

Une opération pleine de promesse qui n'aboutira pas cette fois. France Télécom minimise cependant l'échec de son offre, indiquant dans un communiqué que "ce projet n'est pas indispensable à la mise en œuvre de sa stratégie". Le retrait du projet devrait, dans tous les cas, permettre au titre de France Télécom, qui a chuté de 21 % depuis la publication de la fuite le 16 avril dernier, de remonter.