Les entreprises font face à un risque réel de saturation du réseau électrique. Comment se prémunir ?

Les datacenters consomment désormais autant d'énergie qu'une petite ville. Alors que les entreprises confient à leur informatique les clés de leur activité, comment peuvent-elles se mettre à l'abri d'une pénurie d’électricité ?

Au fil des ans et des technologies, les datacenters sont devenus des bâtiments très énergivores. Il n’est plus rare de voir se développer des projets consommant jusqu’à 30 mégawatts d’énergie électrique, soit l’équivalent d’un trentième d’une tranche nucléaire ou encore d’une ville de 20 000 habitants...
Dès le dépôt de leur permis de construire, les hébergeurs réservent auprès d'ERDF des quantités d'énergie souvent bien supérieures à leurs besoins. En effet, une partie de cette énergie ne sera jamais consommée mais est nécessaire pour assurer la redondance de l’alimentation du site et pour en assurer le développement sur le long terme. L’énergie réservée auprès d’ERDF ne pouvant plus être vendue à d’autres hébergeurs, bien évidemment. Dans certaines zones d’Ile-de-France, nous sommes ainsi dans une situation de saturation « virtuelle » du réseau électrique. L’énergie est ainsi devenue « le nerf de la guerre » pour tous les acteurs de ce marché, en croissance de 25 % par an rappelons-le, il est donc important de réagir.

La taille des projets de datacenters a aussi sensiblement évolué. Il y a quelques années, les centres de données permettaient de fournir environ 1 000 m² de salles informatiques. Ils se déploient aujourd'hui sur près de 10 000 m², d'où un besoin de puissance électrique en forte croissance. De plus, afin d’anticiper les futurs besoins de leurs clients, les hébergeurs ont pris l’habitude (bonne ou mauvaise) de réserver plus d'énergie qu’il n’en faut. Ainsi, malgré le rapport qualité/prix exceptionnel du réseau électrique français, cet enchainement d’événements conduit à une pénurie d’énergie « disponible » face à laquelle il est important d’agir.
Outre le sujet cité précédemment à propos du mode de réservation électrique, l’un des principaux leviers pour régler la pénurie énergétique est l’amélioration directe du rendement des datacenters.

Pour cela, les quatre axes de développement que nous avons identifié sont les suivants:
* la conception du projet,
* ses équipements techniques,
* le taux d’utilisation des ressources système,
* l’implication de l’utilisateur final.

Dès les premières esquisses, l’architecte commence à définir la forme du bâtiment, compacité, orientation, surface et positionnement des salles informatiques et des locaux techniques. Cette étape de conception a un impact primordial sur le résultat final de l’opération. En effet, les choix faits à ce stade conditionneront l’aptitude bioclimatique du bâtiment. Il est donc important que, dès cette phase, des échanges aient lieu entre le maître d’ouvrage, l’architecte et les bureaux d’études. Et ce, dans le but d’associer efficacement qualité architecturale, performance énergétique, logique économique et respect du programme de l’opération.
Le choix des équipements techniques influence aussi grandement le rendement énergétique global d’un centre informatique. Agir sur la réduction de la consommation directe des ressources IT présente en effet un double intérêt : réduire les consommations électriques des salles informatiques et réduire les consommations associées de climatisation. Il est indispensable d’investir dans des équipements techniques de dernière génération. Ces équipements, ne nécessitant pas forcément de surinvestissement, ont l’avantage de fournir un haut rendement énergétique tout en assurant une sécurité de fonctionnement optimale. Cela passe par le choix d’onduleurs performants ou encore plus directement par l’utilisation de serveurs appropriés. Par exemple, il est important d’imposer aux clients de datacenters un cahier des charges les obligeant à utiliser des cold corridors et les interdisant de disposer de plus de 10% de serveurs informatiques âgés de plus de 5 ans.

Il est également primordial de définir dès le début du projet les besoins du client et d’en dimensionner les équipements techniques en conséquence. Le surdimensionnement des installations est une des principales causes du manque d’efficacité de la plupart des datacenters. La définition des besoins du client passe aussi par le niveau de sécurité et de disponibilité des données qu’il faut adapter en fonction du type de données stockées. Par exemple, une architecture technique ultra redondée, et donc fortement consommatrice d’énergie, n’aura que peu d’intérêt face à un besoin de stockage d’archives pouvant se permettre une micro-panne par année.
Le taux d’utilisation moyen d’un datacenter est estimé à 56%.
Ainsi, pour améliorer son rendement énergétique, il est indispensable de mettre en place des solutions de consolidation et de virtualisation des serveurs et du stockage. Ces techniques qui permettent de faire fonctionner plusieurs systèmes virtuels sur un seul et même système physique peuvent réduire jusqu'à 80% la facture énergétique des utilisateurs.

Enfin, il est également indispensable que les hébergeurs impliquent leurs clients dans leur démarche de développement durable. Pour cela, les hébergeurs doivent revoir les méthodes usuelles de facturation des consommations électriques en facturant à leurs clients leurs dépenses énergétiques réelles. Il est ainsi nécessaire de proposer aux utilisateurs un système de monitoring qui leur permet de connaître leurs consommations en temps réel et d’en optimiser les dépenses énergétiques en conséquence. Ils sont alors directement associés et gagnants dans la démarche vertueuse d’amélioration du rendement énergétique du datacenter. Des logiciels de supervision leur sont ainsi proposés afin d’optimiser le nombre de serveurs en fonctionnement à chaque instant.
En effet, on peut clairement comprendre qu’une banque éteigne une partie de ses serveurs de trading au beau milieu de la nuit, même si ce n’est que très peu le cas pour le moment…
Nous n’avons pas la prétention de pouvoir résoudre cette pénurie d’énergie, mais nous nous imposons l’ensemble des principes évoqués en vue de réduire la consommation électrique de nos clients, au profit d’une efficacité énergétique optimale de nos installations et d’une facture électrique réduite pour tous.