Haro sur les augmentations individuelles !

La cour de cassation a jugé qu’il était désormais nécessaire d’objectiver les raisons pour lesquelles une augmentation individuelle doit être donnée. Quelles leçons vont devoir en tirer les entreprises ?

Décidément, la jurisprudence sur l’égalité de traitement salarial prend une place de plus en plus importante dans le paysage social français.

En 2011, j’avais réalisé pour le compte des cabinets Kurt Salmon et Fromont Briens un sondage d‘opinion auprès de décideurs sur cette thématique (que vous pouvez retrouver ici).

Le résultat était sans équivoque. Plus de 80 % des sondés jugeaient le sujet comme allant devenir important dans les prochains mois, mais paradoxalement, ni étude d’impact financier, ni analyse juridique approfondie n’étaient réellement menés par les participants.

4 ans plus tard, alors que les arrêts se multiplient, l’opinion a bien changé.

On ne peut plus augmenter le salaire d’un individu, on doit justifier pourquoi on n’augmente pas salaire d’un autre !

Dans une décision récente, la Cour de cassation a jugé qu’il était désormais nécessaire d’objectiver les raisons pour lesquelles une augmentation individuelle doit être donnée. Rien de moins.

Les individus doivent être appréciés au sein de la collectivité qui les compose et non plus en tant que simples individus, spécifiques et indépendants. Pour certains, les augmentations individuelles ne le seraient donc plus.

Les augmentations individuelles sont le plus souvent basées sur une enveloppe financière globale à répartir.

Cette décision devrait être sans grande conséquence pour les entreprises qui ont instauré des schémas cohérents d’augmentations individuelles. Mais elles ne sont pas légions ! Alors que l’on observe que les programmes de rémunération variable sont de plus en plus fréquents, construits autour de critères objectifs de vente, de chiffres d’affaires, de fidélisation, on constate aussi que les augmentations individuelles sont le plus souvent basées sur une enveloppe financière globale à répartir.

Dans l’esprit de nombre de décideurs, l’augmentation individuelle (AI) est le pendant logique de l’augmentation générale (AG). L’enveloppe globale d’augmentation est répartie entre ces deux familles. Souvent même, les non cadres sont soumis aux AG et les cadres aux AI.

L’utilisation des AI sera toujours possible demain mais périlleuse. Donner 3% à un  salarié et 0% à un autre expose l’entreprise à devoir verser in fine 3% à chacun …

Le casse-tête du manager face à son enveloppe d’AI

Prenons un exemple simple et courant. Le manager que vous êtes doit répartir entre ses équipes l’enveloppe d’augmentation individuelle qu’on lui a donnée.

Vous avez sous votre responsabilité une assistante, trois vendeurs et cinq techniciens. Vous décidez de vous attaquer en premier lieu à la situation de votre assistante.

Pour attribuer une augmentation à votre assistante vous optez pour 

  1. ce que bon me semble, dans la mesure où je n’ai pas à la comparer avec d’autres assistantes car je ne manage qu’une seule assistante 
  2. comparer la performance de votre assistante avec les autres assistantes de mon entreprise pour m’assurer que les critères d’évaluation et de mesure sont compatibles ;
  3. verser une prime exceptionnelle (mais qui malheureusement ne sera pas récurrente de par sa nature) ;
  4. envoyer un e mail à votre n+1 pour lui demander de prendre ses responsabilités

Inutile d’illustrer la règle pour les vendeurs et les techniciens, vous l’avez parfaitement comprise.

 

Augmentations générales, rémunération variable, épargne salariale, ainsi que toutes autres mesures non discriminantes vont devoir être mises en place afin de contenir le risque financier.