Vite, employons plus de femmes dans le numérique !

Le déséquilibre des genres dans les professions liées au numérique est toujours aussi alarmant et ce, en dépit des initiatives qui se multiplient pour y remédier. Pourquoi ne pas profiter de l’émergence des nouveaux métiers liés à la data pour convaincre les entreprises des avantages d’une féminisation du secteur numérique ?

Big data, Data analytics et Data sciences sont aujourd’hui plus que jamais au centre de l’attention de nombreuses entreprises. Parmi les écueils auxquels elles se heurtent, l’un des plus importants est sans conteste celui du recrutement de personnes qualifiées pour mettre en œuvre les nouvelles applications liées à la transformation digitale. 

L’attention grandissante que tous les secteurs d’activité prêtent à la diversification de leurs équipes se révèle particulièrement pertinente dans l’industrie numérique, laquelle demeure essentiellement… masculine. En France, l’enquête réalisée par Syntec Numérique fait apparaître un taux de féminisation de 27.1% dans le secteur du numérique, contre 46.7% tous secteurs confondus[1].

Il existe pourtant un très grand nombre de raisons objectives pour que les entreprises du numérique fassent une plus grande place aux femmes dans leur activité, et particulièrement lorsqu'il s’agit de Big data. Cinq de ces raisons méritent d’être soulignées :

Le Big data manque de talents

La question se pose avec toujours plus d’acuité : pourquoi se priver de 50% de la population, quand le secteur du numérique se débat déjà dans ses problèmes de recrutement ? 

La France espère créer 137 000 emplois grâce au Big data d’ici 2020[2]. Il y aura très certainement plus d’emplois dans ce secteur que de personnes qualifiées. Même si les chiffres diffèrent à ce sujet, on pense notamment manquer de data scientists au point que certains cabinets de recrutement n’hésitent pas à sélectionner des candidats… à la formation. On peut ainsi s’attendre à ce que les industries souffrent de plus en plus, à l’avenir, du manque de compétences disponibles sur le marché.

Dans une simple perspective pratique, employer plus de femmes et travailler activement à une meilleure représentation féminine dans les métiers du Big data, (mais aussi dans l’enseignement des disciplines afférentes) pourrait très certainement augmenter le nombre des personnes susceptibles d’être embauchées et contribuer à l’expansion d’un domaine en pleine croissance. L’arrivée des femmes sur un marché encore essentiellement masculin ne peut qu’entraîner une émulation nouvelle qui favorise l’augmentation de la qualité et du nombre des candidatures. De ce fait, on est en droit de s’attendre à plus de créativité et à plus d’innovation pour les entreprises où la data est reine. 

Deux perspectives valent mieux qu’une

Si les différences entre hommes et femmes ne sont pas aussi prononcées que des siècles de misogynie l’ont laissé entendre, il existe clairement des différences d’approche intellectuelle des problématiques entre les genres. 

Peu importe au final qu’elles soient induites par la culture ou bien qu’elles relèvent de différences physiologiques, l’expérience montre que les femmes abordent différemment les problèmes et ne font pas appel de la même façon à leur mémoire. Une différence qui signifie pragmatiquement que les réponses qu’elles fournissent à des problèmes donnés, ne sont pas obligatoirement les mêmes que celles des hommes. Les différences de réponse entre genres peuvent être particulièrement intéressantes lorsqu’il s’agit d’analyse et de traitement de données. Sans se complaire dans le cliché qui décrit les femmes comme “plus intuitives”, deux façons de réfléchir ne peuvent qu’améliorer les résultats d’une équipe et offrir deux fois plus de chances de trouver une solution pertinente ou penser des applications inédites.

Deux histoires apportent plus à l’entreprise

Les entreprises ne peuvent ignorer que leurs produits ou services s’adressent parfois spécifiquement aux femmes. Leur comportement d’achat, la relation client qui s’établit avec elles compte dès lors pour beaucoup dans l’avenir de l’activité de ces sociétés. Dans un marché genré (ou bien encore dans le cadre d’une médecine genrée), qui mieux que les utilisateurs finaux peuvent juger des critères pertinents ? Les femmes sont des clients et leurs attentes ont une histoire et des spécificités dont les hommes ont une vision réduite. Lorsque l’on demande un avis à un expert, on le choisit généralement parce qu’il maîtrise sa discipline et qu’il en mesure tous les enjeux. Se priver des femmes, c’est se priver d’une autre expertise, d’une autre maîtrise, ce qui, dans un marché extrêmement concurrentiel s’avère être un choix imprudent.

Une opportunité pour changer les stéréotypes

Aujourd’hui, le Big data et l’analyse des données n’en sont qu’à leurs débuts en termes d’usages métiers. Aussi les experts ont-ils encore de nombreux champs d’applications à explorer ; ceci permet d’espérer que l’équilibre hommes-femmes existant actuellement évolue vers une plus grande présence de ces dernières ; le modèle n’étant pas encore construit, les mauvaises habitudes n’étant encore ni caractéristiques ni immuables. Il existe donc une véritable chance pour que les stéréotypes ne s’installent pas.

S’assurer qu’à un stade de développement de carrière précoce, il y ait, dans les industries du numérique un réel équilibre des genres dans les postes liés à la data, c’est aussi s’éviter de reproduire le déséquilibre qui handicape aujourd’hui les industries traditionnelles. Il reste à encourager plus largement l’accès des femmes au numérique… par l’exemple.

En finir avec l’image masculine du numérique

Etant donné le constat alarmant actuel concernant le manque de représentation des femmes mais également de diversité dans ce secteur, en finir avec les stéréotypes devrait être une priorité stratégique. Selon l’American Association of University Women, il y aurait d’autant plus urgence, que si l’on remonte aux années 90, on constate que le pourcentage de femmes travaillant dans le secteur technique a décru, alors même que ses effectifs augmentaient de façon significative[3].

Dans ce contexte, le développement des métiers liés au BIg data peut être un puissant levier de changement quant à la représentation des femmes dans le numérique. Il n’est pas trop tard pour saisir cette occasion d’apporter plus de diversité et de créativité dans un secteur d’activité qui reste aujourd’hui un indéniable moteur de croissance pour la France.

[1] Syntec Numérique – Conjoncture et perspective 2016

[2] source : economie.gouv.fr