Comment l'open source devient une clé de la transformation digitale du CAC40

Comment l'open source devient une clé de la transformation digitale du CAC40 Lors de l'Open CIO Summit 2016, plusieurs DSI d'organisations de niveau CAC40 ont témoigné de leur utilisation de l'open source. Ils placent ces technologies au cœur de leur processus de transformation numérique.

Empowering Open Innovation (ou "stimuler l'innovation ouverte", en français) : tel était le thème du Paris Open Source Summit 2016. Comme chaque année, l'événement, qui s'est tenu les 16 et 17 novembre aux Docks de Paris, accueillait l'Open CIO Summit. Un après-midi de témoignages auquel ont pu participer pour cette nouvelle édition quelque 70 décideurs informatiques. Les échanges ont notamment porté sur la place de l'open source dans les stratégies d'innovation IT et de transformation digitale des entreprises et administrations. 

Le JDN a pu participer à l'Open CIO Summit 2016, qui s'est tenu à huis clos. Plusieurs DSI issus de groupes du CAC40 ont pu intervenir. Pour préserver la confidentialité des débats, en voici un compte-rendu anonymisé. 

L'open source pour mieux recruter

Première idée largement partagée par les DSI sur scène : la mise en œuvre d'une usine de développement (élément ô combien stratégique à l'heure de la transformation digitale) ne peut se faire sans "un recours massif à l'open source". Pourquoi ? Tout simplement parce ce que les logiciels libres représentent un moyen d'attirer les profils. "L'open source est un domaine où il est plus facile de recruter, car il nécessite des compétences standards, universelles, assez simples à évaluer", note un DSI. Et un autre d'ajoute : "et en plus, en général, l'open source attire les bons développeurs."

La culture open source : un levier pour motiver les équipes IT

Mais d'un point de vue RH, une politique open source n'aurait pas seulement l'avantage de faciliter les recrutements. Appliquer les modes de fonctionnement issus de l'open source pourrait également contribuer à mobiliser les équipes IT. "Mutualiser le développement de composants en vue de les utiliser pour plusieurs projets est un facteur de motivation pour ceux qui les créent. Cette organisation permet en effet de s'inscrire dans un processus d'intelligence collective de création de valeur qui transcende l'entreprise. C'est très stimulant", constate l'un des témoins. Quelques-uns des DSI présents confient avoir déjà mis en place une telle démarche de gouvernance dans l'optique de mettre en commun des développements internes. Quant à la contribution à des projets open source externes, elle semble rare. L'une des sociétés représentées s'est néanmoins engagée dans cette voie - en lien avec Red Hat.

L'open source : un moyen pour optimiser la valeur du cloud 

Le remplacement de la base Oracle par des technologies open source est évoqué par plusieurs intervenants, avec pour principale motivation la réduction des coûts. Les serveurs de données MySQL et PostgreSQL sont cités parmi les alternatives mises en œuvre. Certains des DSI sur scène ont cependant reconnu qu'Oracle pouvait être conservé pour des applications stratégiques, du fait notamment d'un besoin de "réassurrance" des directions métier utilisatrices. Côté bases NoSQL, Cassandra fait la quasi-unanimité.

Docker : des avantages "indéniables" pour négocier le virage de la transformation digitale

En matière de Big Data, les briques open source Hadoop et Spark sont elles aussi déployées. Certaines entreprises présentes s'adossent à ce type de technologie pour des traitements massifs de données dans des domaines aussi variés que l'IoT, la gestion de la chaîne logistique (sur des périmètres mondiaux) ou encore la personnalisation de la relation client. "Grâce à ces composants, nous avons été capables de créer des services que ne proposent pas encore nos grands concurrents américains", affirme même un DSI.

Trois grands groupes représentés lors de cette 7e édition de l'Open CIO Summit se sont lancés dans la mise en place de cloud privé à partir de briques open source. Tous ont fait le choix d'OpenStack, preuve que ce framework libre est désormais devenu la norme dans ce domaine. "Nous avons deux clouds privés. Le premier, sous VMware, est résiliant et très automatisé. Le second s'adosse à OpenStack et KVM. Son coût est environ la moitié du premier. L'objectif étant de l'aligner sur les prix d'Amazon Web Services, avec une tarification interne fine et par option", détaille un DSI. "Ce cloud OpenStack n'offre pas le même niveau d'automatisation, et implique une gestion via API. Pour éviter cette phase manuelle de gestion des ressources, nous étudions la possibilité d'utiliser des containers."

Ce n'est pas l'unique mention qui a été faite des containers lors du débat. Un autre DSI, là encore d'une grande entreprise française, a également évoqué cette technique de virtualisation légère. "Nous avons validé le choix de containers standardisés, sous Docker, pour créer un environnement de cloud hybride. Grâce aux containers, nous pourrons porter une même application aussi bien sur notre cloud privé, que sur des clouds publics ou de partenaires", indique le décideur IT. Là encore, OpenStack a été retenu comme infrastructure de référence. "Docker n'apporte pas seulement des avantages en matière d'interopérabilité. Il permet de motoriser l'intégration et le déploiement continus, et contribue par conséquent à accélérer le 'time-to-market'. Dans le même temps, Docker est capable de s'acclimater à la diversité des applications", ajoute encore le DSI, avant de confier : "quand nous avons présenté cette technologie à la direction financière, ils ont immédiatement compris et adhéré."

Des risques maîtrisés

Aux côtés des avantages des logiciels libres, la question des risques d'une politique open source n'a pas pour autant été passée sous silence. "Le mode open source, en favorisant 'une maintenance collective' du code, permet certes de renforcer la fiabilité et la sécurité des composants. Mais en même temps, il engendre un foisonnement des offres logicielles qui n'est pas toujours positif. On peut avoir du mal à s'y retrouver, ou être tenté de passer d'une application à l'autre", pointe l'un des témoins. Face à cette problématique, un début de solution consisterait à décentraliser la prise de décision au plus proche des acteurs capables de faire les bons choix : les développeurs. "Dans cette optique, il est important également de créer des équipes pluridisciplinaires, en combinant métiers et IT avec des objectifs communs", complète un autre DSI.

Un autre risque susceptible, lui, de venir enrailler les politiques open source a été souligné : la démocratisation des applications SaaS s'enrichissant de données de l'entreprise. "C'est l'exemple type de Slack. L'entreprise y place ses données, ce qui fait qu'il est ensuite difficile de s'en extraire", note un décideur informatique. Un scénario d'autant plus difficile à éviter dans le cas de Slack que cette offre SaaS est proposée en freemium : sa version d'entrée de gamme, gratuite, pourra s'immiscer rapidement dans les organisations, sans forcément l'accord de la direction informatique... Et un autre intervenant de remarquer : "il existe heureusement des alternatives à Slack, comme HipChat, qui proposent des offres qui s'installent en interne."