L'informatique quantique : la quête du Graal numérique

L'informatique quantique : la quête du Graal numérique Permettant de démultiplier les performances de calcul actuelles, l'informatique quantique pourrait être l'une des solutions à la fin de la loi de Moore.

La notion d'ordinateur quantique est née dans les années 1970 et 1980. Elle est notamment portée par le physicien américain David Wineland - qui a reçu le Prix Nobel de physique pour ses recherches dans ce domaine. Derrière ce concept figure l'idée selon laquelle les phénomènes quantiques pourraient être utilisés pour décupler la puissance de calcul des machines classiques. Alors que les ordinateurs d'aujourd'hui utilisent le bit comme unité fondamentale, le calculateur quantique, lui, s'adosse sur une valeur appelée le qubit (ou quantum bit). Une valeur qui permet non seulement de s'exprimer par le biais de 1 et 0, mais également par une superposition des deux.

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D-Wave serait la première société à avoir commercialisé un calculateur quantique. IBM, Intel ou encore Microsoft se positionnent également dans ce domaine. ©  Capure JDN

La vitesse de calcul se voit ainsi augmenter de manière exponentielle, la machine étant capable de traiter simultanément plusieurs états à la fois. La mesure de puissance du qubit ? Elle est de 2 à la puissance N (N étant le nombre de qubits dans le processeur). Ainsi, une machine binaire reposant sur une architecture à 6 bits pourrait créer une des 64 (2 à la puissance 6) combinaisons possibles (000000, 000001, 000010...). Le qubit pouvant être une superposition de 1 et 0, peut tendre d'un coup vers 64 états. L'informatique quantique permet ainsi de passer outre les limites de la loi de Moore, selon laquelle la complexité des semi-conducteurs d'entrée de gamme double tous les ans à prix constant.

Comment passer du bit au qubit ? That is the question...

Mais comment se présente alors concrètement un qubit d'information ? Très schématiquement, le fonctionnement d'un qubit (que l'on peut comparer à un atome artificiel) repose sur différents phénomènes de physique nucléaire. C'est aussi la raison pour laquelle l'ordinateur est dit quantique. Il fait en effet référence à la physique quantique décrivant le comportement des atomes et particules. Quels sont ces phénomènes nucléaires ? Un qubit peut être créé en s'appuyant par exemple sur la polarisation d'un photon (et la mesure du plan de polarisation), ou bien sur le niveau d'énergie d'un atome, ou les moments cinétiques de "spin", ou révolution, de l'électron autour de lui.

Un obstacle de taille : le système doit rester isolé le temps du calcul

Il existe plusieurs techniques pour créer des qubits. Grâce aux supraconducteurs, ils peuvent être embarqués sur des circuit électroniques dotés de semi-conducteurs fabriqués à partir de méthodes déjà connues, empruntées à la nanoélectronique.

Reste un obstacle technique de taille avant de faire fonctionner un ordinateur quantique. Le système, pendant la phase de calcul, doit être totalement isolé de toute interférence thermique ou magnétique. Du fait de la physique nucléaire qui le met en musique, le qubit est en effet sensible à toute perturbation, notamment les champs électromagnétiques. Les chercheurs appellent le temps de "décohérence" la période pendant laquelle le système reste ainsi isolé, l'intégrité de ses propriétés quantiques étant alors complètes.

Les problèmes de conception sont également très nombreux. Au-delà de la création d'un qubit, il faut notamment aussi être capable de créer des détecteurs pour mesurer l'information portée par le qubit. Cela implique de maitriser les paramètres du flux magnétique (intensité et distribution spatiale), ce qui se révèle complexe.

Souvent ouvertement critiqués par la communauté scientifique, certains chercheurs, et notamment français, ont imaginé la prochaine étape. Simon Thorpe, directeur de recherche du CNRS au CERCO (Centre de recherche cerveau et cognition) à Toulouse, n'hésite pas affirmer l'existence d'un lien entre conscience et physique quantique, en faisant référence notamment aux travaux des chercheurs américains Stuart Hameroff et Roger Penrose. De là à évoquer un futur ordinateur quantique qui serait doué de conscience... Simon Thorpe pose la question de cette éventualité pour le futur (voir sa présentation relative à une conférence donnée en 2013).