L'offshore comme palliatif à la pénurie de compétences IT

Au Royaume-Uni, les entreprises informatiques, en difficulté dans leurs recrutements et confrontées à de fortes augmentations de salaires se tournent plus aisément vers l'offshore. Les jeunes diplômés sont les premières victimes.

Les salariés, et plus encore les jeunes diplômés, du secteur IT ont semble-t-il du mouron à se faire au Royaume-Uni. Nouvel effet de la crise américaine des subprimes ? Non, du moins pas selon l'étude publiée par IDS (Incomes Data Services), qui désigne paradoxalement la pénurie de main d'œuvre dans le pays. Comme chez ses voisins européens, la demande de compétences informatiques est soumise à des tensions que ne peut apaiser le seul marché de l'emploi intérieur.

Pour répondre à leurs besoins, les entreprises se sont donc tournées vers les compétences des pays à bas coût de main d'œuvre comme la Chine et l'Inde, plutôt que d'investir dans une force de travail nationale en diminution, explique IDS. Leur désintérêt n'est probablement pas étranger aux critères financiers puisque la pénurie s'est traduite par d'importantes augmentations de salaires.

En un an, la rémunération d'un technicien en support a progressé de 13% à 24 177 livres (30 263 euros) et de 9,5% pour un ingénieur systèmes (39 000 euros). Quant à un chef de projet IT, au cours des cinq dernières années, il peut prétendre à un salaire annuel 23% supérieur, de l'ordre de 59 000 euros.    

Afin de se soustraire à ces hausses de charges, les entreprises implantées au Royaume-Uni se laissent de plus en plus séduire par l'offshore, qui à mesure que les salaires augmentent, dégagent des économies. Cela se traduit en conséquence également par un recul des opportunités de carrière au sein du secteur pour les jeunes diplômés issus de filières informatiques, mais aussi pour les salariés déjà en poste et dont la mobilité professionnelle se trouve réduite.

+23% de hausse de salaire pour un chef de projet

Le patronat anglais, par la voix du CBI (Confederation of British Industry)  ne souhaite toutefois pas décourager des vocations et encourage même les étudiants à multiplier dans leur cursus les enseignements scientifiques, et ce dès le secondaire. Un appel du pied donc au gouvernement afin que ce dernier entreprenne une réforme de l'enseignement pour répondre à la pénurie de compétences IT et scientifiques.  

D'autres organismes patronaux ont joint leur voix à celui du CBI, soulignant des prévisions pessimistes du marché de l'emploi, dont le recul déjà perceptible des recrutements. Même si les entreprises trouvent en Inde des compétences, elles y sont confrontées également à une pénurie et à la concurrence pour se les approprier. La Chine représente aussi de multiples opportunités. Les SSII indiennes comme Wipro s'y développent d'ailleurs déjà (Lire L'indien Wipro prévoit de décupler ses forces en Chine)

En France, les syndicats de salariés restent particulièrement vigilants en ce qui concerne l'offshore et notamment le développement de la présence des SSII françaises dans ces pays. Le Munci rappelle ainsi que Cap Gemini a passé la barre des 19 000 salariés dans ses implantations offshore (Inde, Chine, Pologne, Maroc), avec un objectif de 40 000 en 2010.

Quant à Steria, il disposerait déjà en Inde de 27% de son personnel, soit 20 000 salariés. La SSII se serait en outre fixée un taux de 40% de ses effectifs d'ici à 2010. Le Munci cite également une étude de 2005 réalisée pour le compte du sénat, et selon laquelle 200 000 emplois de services sont susceptibles d'être délocalisés entre 2006 et 2010 depuis la France, dont 90 000 rattachés au secteur de l'informatique.

Pour le patronat, si l'offshore est une réalité, son ampleur est présentée comme moindre. Ainsi Syntec Informatique dans son bilan 2007 fait état d'un taux de croissance de l'offshore de 50%. Cette croissance place toutefois la part des services externalisés dans une fourchette de 2 à 4%, seulement.