OS sur mobile : une carte à jouer pour l'Open Source

Android, Linux Mobile, et désormais Symbian : le libre agite l'univers des systèmes d'exploitation sur téléphone mobile. Ces environnements tendent toutefois à s'effacer au profit des applications et des services, sources de valeur.

Le marché des systèmes d'exploitation pour mobile est en pleine ébullition, même si pour l'heure la hiérarchie entre éditeurs n'a guère été bouleversée. L'offensive la plus récente a néanmoins été lancée par le finlandais Nokia. Le constructeur, déjà actionnaire de Symbian, éditeur de l'OS éponyme, s'est porté acquéreur du solde du capital de ce dernier.

Mais plus que le rachat, l'événement marquant est vraisemblablement la volonté de Nokia de proposer Symbian OS en Open Source au travers une fondation créée pour l'occasion (la Symbian Fondation) et la mise à disposition d'une plate-forme logicielle. Plate-forme à laquelle se sont d'ores et déjà associés Sony Ericsson, Motorola, NTT Docomo, AT&T, LG Electronics, Samsung Electronics, STMicroelectronics, Texas Instruments et Vodafone. Elle devrait se traduire par l'unification des différentes déclinaisons de Symbian (Symbian OS, S60, MOAP et UIQ).

Les concepteurs d'applications auront ainsi l'opportunité de développer des solutions pour l'environnement Symbian, sans avoir à s'acquitter de frais de licence. Une aubaine pour les éditeurs de logiciels sur mobile puisque Symbian OS est le système d'exploitation majoritaire, avec une part de marché sur les smartphones de 58,7% (chiffre du premier trimestre Canalys Research). Il devance donc largement les OS de Microsoft et RIM détenant tous deux 13,7%. Linux et Apple représenteraient respectivement 5,7% et 5,4%. 

Cependant, le calendrier établi par Nokia prévoit un lancement officiel de la Symbian Fondation au premier semestre 2009, et la finalisation d'une première mouture du système Open Source pour le premier semestre 2010. Si la décision du constructeur finlandais est présentée comme une réaction face aux projets de Google, Microsoft et Apple, ainsi que les travaux autour de Linux, ces derniers ont encore de longs mois devant eux pour partir en conquête.

Un Symbian libre et unifié... mais pas avant 2010

Google prépare en effet sa plate-forme ouverte Android, à laquelle se sont déjà joints de nombreux acteurs au sein de l'Open Handset Alliance. Le projet doit cependant encore aboutir au lancement d'une plate-forme, et attendre que celle-ci encourage les développeurs à concevoir un écosystème applicatif. Selon une récente information du New-York Times, Android rencontrerait des retards qui repousseraient sa sortie à la fin de l'année.

En outre, Google - et désormais Nokia - ne sont pas les seuls acteurs positionnés sur l'Open Source, puisque la LiMo Foundation vise lui aussi à développer une plate-forme libre sur mobile, en s'appuyant ainsi sur Linux. La décision de Nokia est d'ailleurs perçue par certains analystes comme un moyen de fragmenter les efforts de l'Open Source dans la téléphonie mobile.

Symbian OS aura en effet des atouts de poids en étant au même titre que ses rivaux, libre, tout en disposant d'une part de marché bien plus considérable. En effet, contrairement à l'univers PC, la téléphonie mobile se caractérise par son morcellement. Au-delà de l'OS, la valeur ajoutée se situe désormais clairement dans l'opportunité de proposer des services et des applications.

Pour Google, c'est notamment la possibilité de décliner sur smartphone ses applications PC, dont son moteur de recherche, mais aussi de se positionner dans la publicité sur mobile. Microsoft s'appuie également largement sur ses applications pour promouvoir son OS. La firme de Redmond a d'ailleurs commenté l'opération de Nokia en déclarant qu'elle confirmait sa propre stratégie, selon laquelle le logiciel et les services conduisaient l'innovation.

Pour autant, même si Nokia détient 40% des parts de marché, rien ne certifie que ses ambitions seront couronnées de succès. La téléphonie mobile, comme le rappelle nombre d'analystes, a toujours été marquée par une multiplicité d'OS. Il est donc probable que plusieurs systèmes continuent à l'avenir de cohabiter et que les éditeurs, pragmatiques, conçoivent des applications pour différents OS.

Du côté des constructeurs, le développement de l'Open Source pourrait encourager les éditeurs d'OS propriétaires à revoir à la baisse les prix de leur licence. Mais rien n'est certain puisque la licence Windows Mobile 6 coûte déjà plus du double de sa concurrente Symbian : entre 8 et 15 dollars pour Windows contre 4 dollars pour Symbian.

Pour l'utilisateur, grâce notamment aux avancées technologiques, le mobile et ses usages sont de toute façon déjà destinés à croître. Il s'agit donc avant tout pour les éditeurs et fournisseurs de services de décrocher la pole-position. Contrairement au monde PC, le Libre arrive cette fois avant la création d'un monopole propriétaire.