Les impressions fantômes, nouveau mal de la publicité en ligne
Les éditeurs commencent à peine à prendre la mesure d'un phénomène qui peut leur coûter jusqu'à 40% de leur chiffre d'affaires display.
Nombreuses sont aujourd'hui les publicités jamais affichées… malgré un emplacement prévu pour accueillir une création qui reste désespérément vide. Ces impressions publicitaires dites fantômes ont un impact qui est, lui, bien réel sur le chiffre d'affaires des éditeurs. Le manque à gagner peut aller jusqu'à 40% des revenus selon Thomas Objois, CEO de Moneytag, entreprise qui accompagne les éditeurs dans leur monétisation en ligne. Et cela peut concerner jusqu'à 20 à 40% des inventaires display et vidéo. "Le problème, c'est que les outils de mesure classiques ne remontent pas cette information", explique le dirigeant de la société. Car pour s'en rendre compte, il faudrait que l'éditeur croise en permanence le nombre d'impressions disponibles sur l'adserver avec les statistiques de pages vues données par son analytics. Compliqué.
"Quand une nouvelle norme est publiée, la chaîne de valeur se complexifie, favorisant l'apparition de ces impressions"
Une impression est fantôme lorsqu'elle n'arrive pas à accéder à l'adserver pour être proposée aux annonceurs. De nombreux facteurs en sont la cause, liés à des dysfonctionnements dans le site de l'éditeur, à des mauvaises connexions dans la chaîne publicitaire ou encore au comportement et au device des utilisateurs. "Un template de page mal conçu qui génère un emplacement non adapté à la réception de la publicité ou un système de lazy loading mal configuré sont autant de sources d'impressions fantômes", détaille Thomas Objois.
Lorsqu'ils sont liés au site de l'éditeur, ces dysfonctionnements peuvent être rapidement corrigés. Mais quand le blocage vient de l'écosystème publicitaire ou de l'utilisateur, c'est beaucoup plus compliqué. "Quand une nouvelle norme est publiée ou une couche technologique lancée, la chaîne de valeur se complexifie, favorisant l'apparition de ces impressions", déclare Thomas Objois. C'est ce qui se passe quand un wrapper de header bidding est mal configuré pour gérer les retours d'une plateforme de gestion du consentement (CMP) ou que les API des acteurs de la chaîne ne communiquent pas bien entre elles. Aussi, lorsque les internautes refusent le dépôt des cookies publicitaires ou qu'ils ont recours aux ad blockers, ils génèrent des impressions fantômes. Des solutions à certains de ces problèmes existent, comme l'adoption du ciblage contextuel, moins dépendant des cookies, et la sensibilisation des lecteurs à l'importance de la publicité, mais elles ne portent de fruits que sur le moyen ou long terme.
Euronews a réussi à identifier et récupérer 17% de son inventaire display mondial dès les premiers essais
En attendant de trouver une solution durable à ces problèmes, Moneytag a lancé une fonctionnalité permettant à l'éditeur de récupérer tout de suite le manque à gagner. Bcovery agit en renvoyant automatiquement vers l'adserver l'impression fantôme détectée. Utilisée par une centaine de sites de médias, tels qu'Orange, Sciences et Avenir, El Economista en Espagne, ou Ströer en Allemagne, Bcovery permettrait de récupérer entre 70 et 80% des impressions perdues. "Tout dépend de la capacité de monétisation de chaque éditeur", précise Thomas Objois. Raison pour laquelle la technologie est facturée sur la base d'impressions récupérées et effectivement monétisées. Le type d'appel est programmé selon des critères préétablis par l'éditeur. "Il peut par exemple décider que le nouvel appel se fasse avec un stack différent, afin de tester une autre stratégie de monétisation", explique Thomas Objois.
C'est comme cela que la chaîne Euronews a réussi à identifier et à récupérer 17% de son inventaire display mondial dès les premiers essais, démarrés au printemps dernier. Depuis, la chaîne mène une analyse approfondie pour comprendre les causes de ce manque à gagner et investit dans des standards de qualité pour optimiser son inventaire. "Nous avons également étendu notre partenariat en mettant la demande de Bcovery en concurrence avec celle de nos partenaires programmatiques et de nos campagnes directes", explique Sophie Toth, global programmatic et ad tech lead chez Euronews. " Nous estimons que notre inventaire incrémental monétisable est de 14%, en plus des 17% obtenus dans la phase de configuration personnalisée ", conclut-elle. Bcovery n'est pour le moment disponible que pour le display. La solution pour inventaire vidéo est en cours de développement.
Cet article a également été publié dans Adtech News, supplément papier du magazine CB News, dédié à l'adtech et au martech. Dans l'édition de février , un dossier sur la régulation des GAFA, l'interview de la directrice marketing France de Made, un focus sur la start-up Datakili, une analyse de l'impact des impressions fantômes et le baromètre du programmatique.