Social publishing : les attentes évoluent

Social publishing : les attentes évoluent L'activité se développe au point de générer les premiers questionnements sur son modèle

Social amplification, social publishing, trusted social ads… Quel que soit le nom qu'on lui attribue, ce nouveau canal de monétisation pour les éditeurs, embryonnaire il y a encore un an, se développe au point que certains renforcent les tests, changent de tactique et surtout de partenaires pour tenter d'en tirer le meilleur parti. Au cœur du modèle, le fait de permettre aux annonceurs de se servir des marques médias pour donner de la crédibilité à leurs campagnes publicitaires sur les réseaux sociaux ("social ads"). Mais comment le faire de manière industrielle sans galvauder l'image des éditeurs et tout en leur assurant des retours financiers satisfaisants ?

A en croire ses promoteurs, éditeurs comme plateformes spécialisées dans cette activité, le social publishing procure entre 30% et 70% de performance incrémentale aux campagnes de social ads. Les éditeurs empochent quant à eux entre 8,5% et 25% de commission sur le montant investi par l'annonceur en pub sociale selon les différentes sources que nous avons consultées. "En social publishing, la marque média apparaît comme si elle était émettrice de la pub, ce qui a une valeur symbolique de recommandation très puissante pour la campagne. Une caution qui arrive à point nommé pour les annonceurs dans un contexte où les performances des social ads déclinent", explique Caroline Duret, directrice exécutive déléguée chez Prisma Media Solutions.

Contrairement à ce que l'on peut lire ici ou là, ces publicités ne sont en revanche pas diffusées auprès des audiences sociales du média sur ses comptes sociaux mais bien aux utilisateurs du réseau social au sens large. Une méthode qu'il ne faut par conséquent pas confondre avec les opérations spéciales et de brand content, où c'est l'éditeur qui diffuse sur ses pages et ses comptes sociaux des contenus éditoriaux élaborés sur mesure pour mettre en valeur une marque.

Mediads, lancée il y a deux ans, revendique la paternité du modèle de la "social ads amplification". Se définissant comme une plateforme technologique business centric, elle permet à l'annonceur d'activer des campagnes sociales cautionnées et pré-validées par des éditeurs premium partenaires de l'adtech. L'annonceur active la campagne directement à partir de son propre compte et interface de pilotage de social ads, par exemple chez Meta. "Dans notre modèle, c'est l'annonceur qui pilote la campagne cautionnée et validée par le média en embarquant ses pixels dans la créa afin de mesurer ses performances en termes de conversions sur son site - leads et ventes. Tous ces signaux nourrissent à leur tour l'algorithme du réseau social, qui optimise en permanence le ciblage de la campagne", résume Alfred Cardinal, cofondateur de Mediads. La promesse est d'unir le meilleur des trois mondes : la caution et la notoriété de la marque de l'éditeur, le volume et la data des réseaux sociaux et les signaux des performances obtenues par l'annonceur sur son site afin de mieux piloter le ciblage et générer un maximum de conversions.

Pour ajouter du piment sur ce marché naissant, de nouveaux acteurs s'y invitent, comme la plateforme Brands to Medias, lancée en juin et également très orientée performance, ainsi que de grands groupes d'agences médias, qui proposent de piloter ce type de campagne pour leurs clients. "Les agences sont très importantes pour le déploiement de l'offre et l'évangélisation. Ceci étant, ce marché étant beaucoup plus large que les top spenders français, il ne faut pas négliger les annonceurs mid et long tail, d'où notre force commerciale directe et nos accords avec les intermédiaires comme Brands to Medias", explique Jérémy Parola, directeur des activités numériques chez Reworld Media, qui revendique une "petite centaine" de campagnes délivrées en 2024.

Mais cette variété d'acteurs pousse certains éditeurs à se questionner : n'ai-je pas intérêt à revoir mes accords pour limiter le nombre de partenaires et éviter que mes commissions s'effondrent ? La réponse n'est pas si évidente que cela car être présent un peu partout permet d'industrialiser les campagnes et dynamiser ses recettes sur le court terme sur un marché en pleine construction ; mais de l'autre, la compétition montant entre les plateformes technologiques, ces dernières pourraient être tentées de tirer vers le bas les commissions afin d'appâter un maximum d'annonceurs, cannibalisant de surcroit les accords en gré à gré.

Certains éditeurs que nous avons consultés s'inquiètent également de l'impact que le modèle peut générer sur leur propre image : à force de défendre un modèle générateur de business pour les annonceurs, les plateformes de social publishing inciteraient à une surexposition publicitaire. Après tout, s'interrogent-ils, combien de fois faudra-t-il afficher la pub pour que l'annonceur aboutisse à des résultats comme des ventes ou des leads ? "Les annonceurs en quête de leads ou de ventes risquent de trop forcer la répétition au détriment de mon image de marque en tant que média", résume un professionnel. "C'est pourquoi je pense que le social publishing ne peut être bénéfique pour l'éditeur que dans le cadre de campagnes visant la notoriété, beaucoup plus rémunératrices pour l'éditeur avec des commissions plus élevées, et moins génératrices d'une trop grosse pression publicitaire", ajoute-t-il. Une vision réfutée par Alfred Cardinal : "Ces campagnes sont une goutte d'eau dans l'océan du social ads, le risque de dégradation de l'image du média n'est pas un sujet. Sans compter que les annonceurs sont aujourd'hui très matures dans leur manière de se servir des social ads en renouvelant leurs créas et en maîtrisant la répétition."

En attendant d'y voir plus clair, les éditeurs n'hésitent pas à tester en variant les partenaires et en essayant plusieurs solutions en parallèle.