Les dix principales tendances du marché publicitaire en 2025
Montée en flèche de la mesure du ROI, budgets marketing libérés au compte-gouttes, l'année 2025 s'annonce sous le signe de la prudence. "Il est temps que les régies publicitaires le comprennent : les annonceurs ne peuvent plus s'engager sur le long terme. Dans un contexte macroéconomique et géopolitique aussi complexe, incertain et morose, les décideurs marketing doivent être capables de jongler avec leur budget, qui peut baisser à tout moment, faire preuve d'une grande agilité et surtout démontrer des résultats", rappelle Guilhem Bodin, partner chez Converteo.
Cette perspective n'est pas nouvelle, mais elle se renforce en ce début d'année et contribue à accélérer de nombreuses tendances sur le marché publicitaire français dont nous examinons les dix principales à l'aide de la dizaine d'experts que nous avons consultés.
#1 Faire mieux avec moins : le ROI sera sur tous les fronts
Les budgets se renégocient à la baisse, les prestataires sont sommés de faire mieux avec moins. "C'est une tendance générale sur le marché : les entreprises cherchent à couper les dépenses et à étudier comment faire mieux avec moins", confirme Guilhem Bodin. Le corollaire à cela est le ROI : "Sur la moitié des projets sur lesquels nous nous positionnons on nous demande quels seront précisément le ROI et la performance à court terme, c'est inédit !", ajoute-t-il. Même son de cloche chez d'autres interlocuteurs que nous avons consultés. "En 2025, la rentabilité des investissements sera critique pour toutes les agences digitales", analyse Jérôme Cauchard, directeur général de Making Science en France.
#2 Le MMM montera en flèche
En ces temps où le ROI est roi, pour défendre leurs budgets, les directions marketing continueront d'investir en mesure de l'impact de leurs actions sur le business. Parmi les méthodes de mesure, le marketing mix modeling (MMM), qui avait déjà le vent en poupe ces cinq dernières années, deviendra la coqueluche des annonceurs en 2025. Non seulement l'offre d'un MMM plus adapté aux besoins du digital se développe à vitesse grand V comme la demande explose, notamment pour un usage en fil rouge, plus industrialisé et moins cher. Bon nombre d'agences qui ne le faisaient pas le proposent désormais et nous confient l'engouement de leurs clients, observé courant 2024 notamment vers la fin de l'année. "La perspective de la fin des cookies tiers a favorisé ce changement qui consiste à regarder davantage l'impact d'un levier sur son chiffre d'affaires plutôt que de simples KPI médias de campagne. 2025 sera l'année du MMM et des tests d'incrémentalité, qui donneront plus d'autonomie aux annonceurs vis-à-vis des données fournies par les plateformes", confirme Jérôme Cauchard.
#3 L'IA générative, mainstream en création publicitaire
Difficile de trouver en ce début 2025 d'agence qui ne se serve pas d'IA générative à au moins une des étapes du processus de création d'une publicité digitale ou d'un parcours conversationnel. "L'intégralité de nos métiers est touchée par l'IA. La nouveauté en 2025, c'est qu'il n'y a plus besoin de justifier l'intérêt de l'IA générative : tous nos clients le comprennent en testant les outils", déclare Marie Raimbert Galtier, directrice générale de Jellyfish en France. "En 2024, 20% de nos clients se sont servis de l'IA générative pour leurs campagnes. Cette année je m'attends à ce que 80% des plus matures, responsables de 50% de notre chiffre d'affaires, le fassent", ajoute la dirigeante.
Même les plateformes sont challengées par des outils d'IA générative externes. "Nous arrivons à obtenir de meilleures résultats sur Google en modifiant les textes et images à l'aide de l'IA générative afin d'améliorer la personnalisation des messages que nous injectons sur la plateforme", confirme Jérôme Cauchard.
#4 L'IA s'invitera dans l'analyse des parts de voix et le media planning
2025 sera également la première année où de nouvelles expertises et outils vont émerger pour analyser et améliorer la part de voix des marques au sein des résultats des différents modèles et services d'IA générative. "Le marché se dirige vers le 'search everywhere optimisation' avec les moteurs de recherche classiques, les réseaux sociaux et désormais les LLM", résume Marie Raimbert Galtier.
Et ce n'est pas fini : en 2025, le machine learning et les algorithmes vont également outiller le media planning. "Alors que cela se constate déjà sur le social et le search, en 2025 on verra naître des fonctionnalités de media planning boostées à l'IA en télé, tout le monde s'y prépare", déclare Maxime Cerda, fondateur de Stamp.
#5 La publicité search boostée par le social
La recherche en ligne se développe en dehors des moteurs classiques, ce n'est pas nouveau, notamment chez les retailers, Amazon en tête. Mais aussi sur le social et, beaucoup plus récemment au sein des services d'IA générative, dont ChatGPT, qui a ouvert son moteur de recherche à tous les utilisateurs en France le 17 décembre. "Cette année nous verrons à quel point la nouvelle génération de concurrents de Google sur le search (ChatGPT, Perplexity...) représentera ou non une vrai menace pour le premier. Et comment AI Overviews va prendre le relais. Perplexity (le seul à avoir dévoilé son modèle de monétisation publicitaire, ndlr) pour le moment ne facture pas au clic mais au CPM, tout cela est encore très émergent. A terme, il n'est pas impossible que ChatGPT devienne le nouveau géant de la pub", analyse Théo Lion, CEO de Coudac.
En attendant que cela devienne plus palpable, le social continuera de tirer le marché : "L'accélération du marché de la publicité en 2025 viendra du social sur le search", déclare Maïté Dailleau, partner chez Oliver Wyman. Une référence notamment à TikTok, qui a ouvert aux annonceurs l'achat de liens sponsorisés en 2024. Reste à savoir à quelle vitesse cette accélération s'observera vu que le contexte économique risque de frapper de plein fouet les petites et moyennes entreprises en France cette année.
#6 La migration des budgets de la télévision vers la CTV va s'accélérer
La télévision linéaire va continuer de souffrir avec notamment la crise de l'automobile et la migration des annonceurs vers la CTV et le streaming, en quête d'audiences et de prix plus abordables. "En 2025 nous verrons une très claire accélération des transferts des budgets du linéaire vers la TV en streaming, qui devrait capter 20% des investissements, un virage qui s'annonce historique", parie Jérôme Cauchard. "La diffusion de spots visant des audiences jeunes sur le linéaire est devenue impraticable ! Le marché de la CTV est en pleine ébullition, l'offre explose et les gens la consomment", analyse-t-il. Et les annonceurs embarquent. "L'offre publicitaire d'Amazon Prime a réussi à capter des budgets conséquents en France en 2024, de l'ordre de plusieurs dizaines de millions d'euros en à peine 9 mois", déclare Maïté Dailleau.
Que cela plaise à Médiamétrie ou non, c'est bien les plateformes américaines, dont YouTube, qui risquent de continuer de brasser une partie importante des budgets issus de la télévision linéaire. Deux explications à cela. Tout d'abord, l'offre d'inventaires en streaming des chaînes historiques reste limitée. Ensuite parce que "les marques mondiales auront tendance à concentrer leurs deals globaux sur les plateformes américaines comme Disney, Netflix, qui vient de diviser par deux ses tarifs, Amazon Prime et YouTube", précise Jérôme Cauchard. De quoi plaire aux gros comme aux petits. Dans le cas de YouTube, on peut trouver une troisième explication.
#7 Le retail media va attirer certains budgets de la télévision
Pour certains de nos observateurs, le retail media s'affirmera comme une alternative attrayante à la TV linéaire pour les annonceurs des biens de grande consommation. "Le déport des budgets d'annonceurs historiques de la télévision vers les distributeurs ira plus vite que beaucoup ne s'y attendent. Cela explique pourquoi les chaines historiques sont très ouvertes à négocier le linéaire", analyse Guilhem Bodin. Les atouts du retail media ? La proximité avec le "bon" consommateur et surtout l'agilité que la télévision linéaire ne peut proposer. Ce n'est pas un hasard si toutes les plateformes de streaming issues des chaines historiques proposent des segments de données en partenariat avec des retailers pour justement tenter de capter ces budgets. "Mais le retail media n'a pas encore fait ses preuves avec le format vidéo", tempère l'expert.
#8 La vidéo courte verticale va s'accélérer
La part de la vidéo, déjà majoritaire en display en 2024, va croître encore plus fortement en 2025, selon Maïté Dailleau. En dehors des formats adaptés au grand écran, c'est bien la vidéo courte verticale qui connaitra de l'essor : "La part de TikTok dans les investissements publicitaires continue de croître extrêmement vite tandis que YouTube shorts qui était plutôt anecdotique devient une réalité en heures de visionnage et en retombés business ", atteste-t-elle estimant qu'en 2024 les recettes publicitaires de TikTok, 100% vidéo, avoisinaient 200 millions d'euros en France, soit 2% du gâteau publicitaire digital total (accaparé principalement par Google, Meta et Amazon). "Chez certains de nos annonceurs, TikTok représente déjà 30% du mix média digital", précise Théo Lion.
#9 La collaboration entre annonceurs va se renforcer
Une autre forme de retail media verra le jour en France cette année : le commerce media c'est-à-dire la collaboration entre annonceurs qui ne sont pas nécessairement des distributeurs. Concrètement, des marques accepteront de diffuser au sein de leurs propriétés digitales (et offline également) les messages d'autres annonceurs partenaires à des audiences qualifiées pertinentes. "Nous verrons fleurir des offres de type retail media dans les sites d'acteurs de secteurs tels que le tourisme ou l'industrie", prédit Guilhem Bodin. Ainsi une compagnie aérienne ou une chaîne hôtelière diffusera sur son site à des audiences qualifiées la publicité pour des annonceurs venant d'autres secteurs. "Les marques vont se positionner en régies publicitaires et ce phénomène, déjà fortement présent en Amérique et en Asie va se multiplier, c'est une certitude : nous sommes fortement consultés sur ces sujets", ajoute-t-il.
#10 L'expérience client et le marketing relationnel deviendront des priorités
Le marché ne s'attend pas à ce que 2025 soit une année de croissance. Pour tenir bon, les entreprises devront se battre pour garder leurs clients. "Il leur faudra toucher les bonnes cibles plutôt que tout le monde et comprendre comment les faire revenir. Les équipes piloteront leurs initiatives marketing davantage sur la valeur que sur le volume. Cela implique de collecter et traiter des données afin d'orchestrer l'activation omnicanale sur les segments de produits et d'audiences à plus forte valeur", précise Guilhem Bodin. Les outils et tactiques servant à améliorer l'expérience client avant et après l'achat et à susciter l'augmentation du panier moyen deviendront prioritaires. La personnalisation de l'expérience, du message, des parcours et jusqu'au pricing va se renforcer.