Automobile : les constructeurs européens en quête de flexibilité face aux normes CO2

Automobile : les constructeurs européens en quête de flexibilité face aux normes CO2 La baisse des ventes de voitures électriques en Europe met en péril les objectifs climatiques de l'Union européenne. Face à une potentielle crise industrielle, les acteurs de l'automobile demandent un report des normes environnementales à 2027.

À quelques mois de l'échéance fixée pour 2025, l'industrie automobile européenne est en pleine négociation pour obtenir un report des objectifs de réduction des émissions de CO2. Le marché des véhicules électriques, censé soutenir cette transition, montre des signes de faiblesse, et les constructeurs redoutent des amendes colossales si les objectifs ne sont pas atteints.

Les objectifs CO2 de l'UE et la réalité du marché

L'Union européenne a fixé des objectifs ambitieux en matière de réduction des émissions de CO2 pour l'industrie automobile. Adoptées en 2019, les normes CAFE (Corporate Average Fuel Economy) imposent aux constructeurs une réduction progressive des émissions de leurs véhicules.

En 2025, les constructeurs doivent réduire de 15% leurs émissions moyennes par rapport aux niveaux de 2021. Cependant, le marché des véhicules électriques, censé compenser les émissions des véhicules thermiques, connaît un ralentissement inquiétant.

Les ventes de voitures électriques, qui avaient progressé de 118% en 2022, ont reculé de 10,8% en juillet 2023, tandis que les véhicules thermiques hybrides reprennent du terrain. En 2023, seuls 12,5% des véhicules vendus en Europe étaient entièrement électriques, bien loin des 22% nécessaires pour atteindre les objectifs de l'UE d'après Le Figaro.

Face à cette situation, les constructeurs demandent un report de l'échéance de 2025 à 2027. Leur argument repose sur l'insuffisance des infrastructures de recharge et sur la fin des subventions à l'achat de véhicules électriques dans des pays comme l'Allemagne.

Les conséquences financières pour les constructeurs

Le non-respect des normes CAFE pourrait entraîner des amendes colossales pour les constructeurs européens. Selon les estimations, ces pénalités pourraient atteindre 15 milliards d'euros pour l'ensemble de l'industrie, dont 13 milliards pour les voitures particulières et 3 milliards pour les véhicules utilitaires.

Cette perspective pousse certains industriels à envisager des réductions drastiques de production. Luca de Meo, président de Renault et de l'Association des constructeurs européens d'automobiles (ACEA) a mis en garde : "si l'électrique reste au niveau actuel, l'industrie européenne va peut-être devoir payer 15 milliards d'euros d'amende ou renoncer à la production de plus de 2,5 millions d'unités" thermiques.

Ce chiffre reflète un excédent de production observé depuis 2022, avec trois millions de véhicules en surplus chaque année. Dans le contexte actuel de baisse des ventes, la production continue à augmenter paradoxalement. Selon Auto Infos, ce déséquilibre pourrait pousser les entreprises à recourir au chômage partiel ou à fermer certains sites de production. Fiat a déjà dû appliquer ces mesures dans son usine de Mirafiori en Italie.

Pour éviter ces pénalités, certains constructeurs envisagent d'acheter des crédits CO2 aux acteurs les plus performants du marché, comme Tesla ou les fabricants chinois de véhicules électriques. Cette solution est cependant critiquée par les ONG environnementales, qui y voient une manière de contourner les règles sans réellement réduire les émissions.

Une pression croissante sur la Commission européenne

Les constructeurs, par l'intermédiaire de l'ACEA, ont intensifié leur lobbying auprès de la Commission européenne pour obtenir un réexamen des objectifs de réduction des émissions de CO2. Ils proposent d'activer l'article 122.1 du traité de l'Union européenne, qui autorise des mesures d'urgence en cas de crise. 

Parallèlement, certains constructeurs, comme Stellantis, dirigé par Carlos Tavares, refusent de participer à cette demande de report. Il affirme que son entreprise "respecte les lois et règlements" et ce, "sans recourir à l'achat de crédits CO2".