Notation de la France : Moody's face à la pression après Fitch et Standard & Poor's
La France connaîtra ce vendredi la décision de Moody's sur sa dette souveraine. Après les dégradations récentes de Fitch et Standard & Poor's, la question n'est plus tant de savoir si la note sera revue que dans quelle mesure.
Un contexte dégradé, des agences déjà passées à l'acte
La note actuelle attribuée à la France par Moody's est de Aa3 avec perspective stable, équivalente à AA- chez les autres agences. L'agence doit décider si elle maintient cette notation, abaisse la perspective à négative, ou procède à une dégradation pure et simple vers A1.
Fitch a ouvert la voie en abaissant la note française à A+ le 12 septembre, invoquant la chute du gouvernement Bayrou et une faible capacité à consolider les finances publiques. Standard & Poor's a suivi le 17 octobre avec une décision anticipée, justifiée par "l'absence de mesures supplémentaires significatives de réduction du déficit budgétaire", malgré l'objectif maintenu de 5,4 % de déficit public pour 2025.
Pour Éric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une décision sans changement "induirait pour l'agence une forte perte de crédibilité", propos rapportés par Capital.fr. Selon lui, même un simple abaissement de la perspective "serait moins facile à expliquer" dans le contexte actuel. L'économiste Norbert Gaillard partage ce point de vue dans Le Figaro : "Moody's peut difficilement se permettre d'être distancée", alors que les autres agences pourraient dégrader de nouveau la France dans les prochains mois.
Budget 2026, réforme des retraites et crédibilité financière en jeu
Malgré l'adoption en cours du projet de budget 2026, l'environnement budgétaire reste instable. Le FMI a abaissé ses prévisions de croissance pour la France en 2026, de 1,4 % à 0,9 %, ce qui compromet l'objectif de réduction de la dette à 116,5 % du PIB d'ici 2027, selon la trajectoire transmise à Bruxelles. S&P estime de son côté que la dette pourrait atteindre 121 % du PIB en 2028.
Le report de la réforme des retraites à 2028, annoncé par Sébastien Lecornu, constitue un élément central dans l'évaluation de Moody's. En décembre 2024, l'agence indiquait déjà qu'un "retour en arrière" sur cette réforme "serait négatif pour le crédit", si cela altérait le potentiel de croissance ou la trajectoire budgétaire. Le coût budgétaire associé est estimé à 100 millions d'euros en 2026 et 1,4 milliard en 2027.
Sur les marchés, les investisseurs anticipent une détérioration. Certains grands fonds, dont le chinois Safe, pourraient cesser d'acheter de la dette française en cas de note inférieure à Aa3, selon Le Figaro. Paul Chollet, chef économiste du Crédit Mutuel Arkéa, tempère toutefois : "Il y a un peu de risque français, mais aussi une très grande confiance du marché dans la capacité de la BCE à réagir rapidement", rapporté par Capital.fr.