Yosra Jarraya (Astran) "La solution d'Astran résout la problématique du Cloud Act "

Le lundi 6 mars, le Forum International de la Cybersécurité (FIC) récompensait cinq start-up. Entretien avec la CEO et cofondatrice d'Astran, Yosra Jarraya, dont la start-up a été couronnée du Prix Coup de Cœur du Jury ex-aequo.

JDN. Votre solution a reçu le Prix Coup de Cœur du FIC 2023. Pouvez-vous nous expliquer en quoi elle consiste ?

Yosra Jarraya cofondatrice et CEO de Astran © Astran

Yosra Jarraya. Le produit qu'on développe chez  Astran, créé il y a deux ans, a pour nom Astran S5, et il se nomme ainsi car il se base sur la technologie de la fragmentation, qui s'appelle secret sharing et qu'il est S3 compatible. Il a pour objectif de permettre aux entreprises d'utiliser librement toutes les technologies cloud de leur choix tout en apportant les plus hauts niveaux de confidentialité sur leurs données. Jusqu'ici, cette équation semblait insoluble, on le voit par ailleurs avec les débats sur les clouds souverains. Ce qui se passe actuellement, c'est que le marché du cloud est dominé par des acteurs extra-européens et qu'ils sont soumis au Cloud act. Ce qui crée une problématique d'un possible accès non autorisé à la donnée des clients de ces providers de cloud. Notre solution résout cette problématique, nos clients peuvent travailler avec n'importe lequel des provider cloud, tout en ayant un plein contrôle sur qui a accès à leurs données stratégiques.

Votre technologie est-elle pour l'instant réservée aux grands comptes ?

Astran S5 va dépendre du niveau de maturité des entreprises, car bien qu'elle soit très simple d'utilisation, c'est une API S3 compatible qu'on peut connecter à des milliers d'applications d'entreprise. De plus, elle ne requiert pas d'avoir en interne une grosse équipe informatique pour la mettre en route. La question qui pousse les gens à venir nous voir est la suivante : ont-ils conscience de la valeur de leurs données dites stratégiques ? Par nos retours terrain, on s'est rendu compte que pour le moment, cette prise de conscience est vraiment présente chez les grands comptes car ils sont confrontés à cette problématique au quotidien. Mais à terme, notre solution est destinée à être utilisée par toutes les entreprises. Particulièrement dans des secteurs qui charrient des données sensibles comme le secteur bancaire ou celui de la santé.

Combien d'entreprises utilisent actuellement votre solution ?

Un peu plus d'une dizaine d'entreprises qui sont exclusivement des grands comptes ou alors de grands organismes publics. Par exemple, nous avons comme clients Eiffage, LVMH et Sanofi.

Comment se compose votre effectif ?

Aujourd'hui, nous sommes une équipe de 16 personnes. De plus en cette semaine du 8 mars qui est la journée internationale du droit des femmes, je tiens à souligner que nous sommes 100% paritaire. Nous sommes une compagnie de cryptographie avancée, ce qui n'est pas un secteur très féminisé, on est donc très fier d'avoir cette parité. Pour ce qui est de l'expérience des profils de notre équipe, nous avons 2deux tiers de personnes très expérimentées avec des docteurs en cryptographie et des experts cloud. C'est obligatoire car nous sommes sur des sujets extrêmement complexes. Nous avons aussi des membres dont c'est le premier boulot mais nous avons tout de même un tropisme pour un grand nombre de profils très expérimentés. Nos objectifs de recrutement sont très ambitieux, nous avons besoin de renforcer nos équipes de R&D et commerciales. Nous serons une trentaine à la fin de cette année et autour de 80 personnes fin 2024.

Comment voyez-vous l'avenir pour Astran ?

Nous avons plusieurs projets dans les tuyaux. Pour commencer, je tiens à signaler que le soutien de BPI France et les programmes comme France 2030 sont absolument vitaux pour des entreprises comme nous qui font de la R&D. Ce soutien est une vraie spécificité française et nous pouvons nous en féliciter car tous les pays dans le monde ne font pas cet effort pour soutenir leurs start-up. Nos ambitions ne s'arrêtent pas à la France, nous commençons à avoir des prospects en Allemagne et dans le Benelux, et nous avons aussi entamé des discussions exploratoires aux Etats-Unis. Nous devons aller conquérir ce marché américain avant que des solutions concurrentes n'y soient développées. Notre ambition rejoint celles de programmes comme France 2030 qui nous soutiennent et dont l'objectif est de créer des champions de taille européenne puis mondiale.