Thierry Petit (Showroomprivé) "Les bons résultats de Showroomprivé en 2020 sont avant tout les fruits de notre plan de performance"

Le co-fondateur du site marchand spécialiste des vêtements invendus explique comment la restructuration des deux dernières années s'avère salvatrice en ces temps de crise, et quelles sont les nouvelles priorités.

JDN. Comment se porte l'activité de Showroomprivé ? 

Thierry Petit, co-fondateur de Showroomprivé. © Showroomprivé

Thierry Petit. Nous avons connu plusieurs années de forte croissance avec un certain nombre de projets stratégiques menés en parallèle mais nous avons entrepris un virage à partir de 2018 avec la mise en place d'un plan de performance au moment où la croissance se tassait et la rentabilité se dégradait. L'idée était de travailler sur trois axes forts pour retrouver des niveaux de rentabilité. L'offre tout d'abord, pour développer notre portefeuille de marques en orientant notamment les ventes sur celles qui font le plus de marges. Ensuite, nous avons repensé la structure financière notamment grâce à une augmentation de capital de 9,9 millions d'euros cet été et le recrutement d'un nouveau CFO. Enfin, nous avons mis l'accent sur nos structures opérationnelles avec le lancement de notre nouveau dépôt mécanisé Astrolab qui est en pleine capacité. Finalement, ces trois axes nous ont permis de renouer avec la rentabilité puisque nous avons annoncé à la fin du premier semestre 2020 une activité de nouveau rentable à plus de 7 millions d'euros alors que nous étions en recul de 23 millions d'euros à la même époque l'année dernière. Et nos résultats du troisième trimestre 2020 sont satisfaisants avec une croissance de 30%.

Le plan de performance vous a donc permis de mieux affronter la crise sanitaire ? 

Nous avions effectivement travaillé sur notre structure en amont afin de la rendre plus saine car après toutes ces années de croissance, notre structure avait grandi et nous avons dû revoir notre stratégie de coûts. Nous pensons que les bons résultats du premier semestre 2020 confirmés au troisième trimestre sont avant tout les fruits de notre plan de performance. Bien sûr, il y a eu une accélération des ventes au cours du confinement mais c'est davantage dû à un travail de fond sur notre organisation. Au premier confinement, nous avions des capacités de transport plus faibles qu'au deuxième confinement où La Poste fonctionne à plein régime et les différents points relais nous permettent de travailler correctement. 

Le Black Friday a été reporté au 4 décembre. Dans quelle mesure cela vous impacte-t-il ?

Avant que le Black Friday ne soit décalé, nous avions pris le parti de ne pas participer à l'opération cette année donc le report n'a pas de conséquence pour nous. Chez Showroomprivé, nous proposons des bonnes affaires toute l'année et il n'y a pas forcément plus de bonnes affaires au moment du Black Friday. En revanche, c'est une période qui concentre plus d'acheteurs en quête de promotions et de cadeaux de Noël et nos pics de trafics se déplacent. Sur cette édition, je pense qu'il était important de changer la date pour laisser du temps aux petits commerces et aux commerces physiques de se réorganiser afin d'éviter un afflux dès la réouverture et je pense qu'il était important de conserver cette opération qui marque le début de la consommation avant Noël. 

Comment Showroomprivé accompagne les nouvelles habitudes de consommation observées pendant la crise sanitaire ?

C'était l'objet de notre rencontre avec Cédric O le 20 novembre au cours de laquelle nous avons annoncé notre plan RSE Move Forward. Nous ambitionnons de placer la RSE au cœur de notre stratégie pour répondre aux besoins des clients, mais aussi parce que les tendances autour du local, du bio et du reconditionné s'affirment de plus en plus. La demande vient aussi de nos marques partenaires engagées elles aussi dans des processus de production éco-responsables et solidaires. Elles mènent des réflexions sur leurs invendus. Depuis le départ, nous recyclons les invendus dans le but de les vendre plutôt que ces produits soient brûlés ou transférés des réseaux de distribution alternatifs ce qui n'est pas très bon pour l'empreinte carbone. Environ 200 personnes en interne redonnent de l'attrait à plus de 300 000 pièces par semaine soit 15 millions de produits par an. C'est un axe qui est pour nous plus intéressant que la seconde main car il s'agit là de produits que l'on vend à -60% mais qui n'ont jamais été portés. 

Concrètement, quelles sont vos ambitions à travers le projet Move Forward ? 

Move Forward doit notamment nous permettre d'investir pour l'environnement et précisément dans des machines logistiques pour réduire le vide dans les colis et en développant le dropshipping. Cela permet à une marque de livrer directement sans passer par nos dépôts avec pour conséquence de réduire l'empreinte carbone. Enfin, nous lançons une marketplace avec Mirakl pour accélérer sur ce sujet de dropshipping et donner la possibilité à nos marques de se digitaliser et à des PME de nous rejoindre et d'utiliser les outils de notre plateforme.

Avez-vous constaté une demande plus forte des marques en raison de la fermeture des boutiques concernant leurs stocks invendus ? 

Nous ne tirons jamais parti d'un mauvais moment de l'économie. Lorsque les marques fonctionnent bien, nous travaillons dans de meilleures conditions car celles-ci doivent produire et assurer leurs stocks en magasins. Même s'il leur reste du stock à la fin de l'année, c'est moins gênant dans la mesure où elles ont fait une bonne année. A l'inverse, si les marques réalisent une mauvaise année en magasin, il y a certes plus de stock mais c'est aussi moins facile de les dealer. Contrairement à ce que l'on pourrait croire, ce n'est pas le meilleur moment pour nous non plus. Nous collaborons avec certaines marques depuis plus de quinze ans et nous souhaitons qu'elles grandissent aussi grâce à nous. Beaucoup de personnes pensent que l'e-commerce profite de la crise mais quand on observe bien la croissance, celle-ci provient avant tout des magasins physiques et de leur accélération sur le digital. L'e-commerce a gagné quelques années de pénétration avec le contexte actuel car les marques et les commerces ont compris que la digitalisation n'était pas un choix et qu'il devient un canal clé.  

Thierry Petit est co-fondateur et co-CEO de showroomprive.com, acteur européen de la vente événementielle en ligne et côté sur le marché Euronext Paris. Entrepreneur et business angel, Thierry Petit possède plus de 20 ans d'expérience dans la création de start-up et investit dans de nombreuses sociétés Internet : Blablacar, Sigfox, Snapevent, Backmarket, Lendix, Cubyn, AB Tasty.