Règlementation européenne : la protection du consommateur en ligne se renforce

De nouvelles obligations doivent être respectées par les e-commerçants de l'Union Européenne depuis le 28 mai 2022. Quelles sont les adaptations à effectuer sur son son e-shop pour rester en ordre ?

Les pratiques commerciales trompeuses ont toujours existé, mais le numérique a facilité la multiplication de certaines d’entre-elles. Citons notamment :

  • la modification très fréquente des prix, parfois même automatiquement sur base d’algorithmes, ce qui est parfaitement licite, sauf si on fait croire au consommateur à une bonne affaire en publiant un prix barré de référence qui n’a jamais été pratiqué sur le site web, ou qui n’a été en vigueur qu’un bref instant par rapport à la durée de la « promo » ;
  • les avis de consommateurs, publiés en masse, qui n’ont en fait jamais été rédigés par des acheteurs effectifs de ces produits, mais générés par des robots, des agences de communication ou par le vendeur lui-même ;
  • des offres mises en évidence dans des résultats de recherche sans tenir compte de la requête.

Le législateur européen a souhaité en 2019 mieux protéger le consommateur contre certaines pratiques trompeuses, et faciliter l’entrée en contact de celui-ci avec le vendeur, à l’avant-vente et à l’après-vente. 

Un paquet de mesures a été voté sous la formule d’une directive 2019/2161 dite Omnibus. Les Etats-membres devaient transcrire cette directive dans le droit national avant le 28 novembre 2021 (beaucoup, comme la France, le Luxembourg et la Belgique ont été en retard), pour une entrée en vigueur partout dans l'Union Européenne le 28 mai 2022. Parmi ces nouvelles obligations :

Les annonces de réduction de prix

Une nouvelle règle s’applique (en ligne, mais également en magasin physique): quand il souhaite signaler une réduction de prix, le vendeur est dorénavant obligé d’indiquer explicitement le prix qu’il pratiquait lui-même juste avant. La période de référence est dorénavant le prix le plus bas au cours des 30 jours précédant la réduction de prix. 

S’il était déjà interdit de faire croire à une réduction en indiquant comme prix de référence le prix pratiqué par un concurrent ou le prix de vente recommandé par le fabricant, la nouvelle réglementation impose donc, en plus, une période de référence antérieure minimale de 30 jours, alors qu’auparavant cette durée était floue (elle devait être juste significative par rapport à la période de réduction).

Il n’est donc plus possible de vendre une paire de chaussure à 90 euros, puis de passer à 120 euros pendant une semaine, puis d’afficher pendant les deux semaines suivantes 60 euros avec une étiquette affichant -50%. Dorénavant, dans cet exemple, l’étiquette devra être -33%. Plus question non plus d’indiquer juste en rouge "promo : 60 euros".  

Cette réglementation a un impact sur le commerce physique, mais encore plus en ligne compte tenu de la multiplication des opérations promotionnelles chez les e-retailers, ainsi que du développement du business-model des ventes momentanées et de dropshipping. Il deviendra nettement plus difficile de faire changer fréquemment les étiquettes tout en annonçant des réductions de prix (faussement) avantageuses. Mais d’un autre côté, cela engendrera une plus grande confiance de la part du consommateur, dont une partie est devenu lasse des fausses bonnes affaires. Cette règle transparente devrait engendrer une concurrence plus loyale entre e-commerçants.

La plupart des Etats membres ont activé dans leur législation nationale la possibilité, lorsque la réduction de prix est progressivement augmentée (succession de baisses de prix, par exemple – 20%, puis -30%, puis -40%), de pouvoir mentionner comme prix antérieur le prix avant la première réduction de prix. Des exceptions peuvent aussi être prises pour les produits susceptibles de se détériorer ou d’expirer rapidement.

Les faux avis de consommateurs

Une nouvelle obligation pèse sur le vendeur (ou la place de marché qui publie ces avis) : celui-ci doit porter à la connaissance de l’internaute les informations permettant d’établir si et comment il garantit que les avis publiés émanent de consommateurs ayant effectivement utilisé ou acheté le produit.

Sont considérées comme des pratiques commerciale déloyales (c’est maintenant explicite, même si auparavant une certaine jurisprudence allait plutôt en ce sens) :

  • affirmer que des avis sur un produit sont envoyés par des consommateurs sans prendre des mesures raisonnables et proportionnées pour vérifier s'ils émanent réellement de consommateurs ;
  • envoyer ou charger une personne physique ou morale d'envoyer de faux avis ou de fausses recommandations de consommateurs ou déformer des avis de consommateurs afin de promouvoir des produits.

Rappelons par ailleurs qu’un professionnel doit s'abstenir de rédiger un avis sur un produit ou service vendu par un concurrent, quand bien même il l'aurait effectivement acheté (pratique de dénigrement).

Les têtes de gondole virtuelles

Si après une requête de recherche portant sur un critère (ou un terme) choisi par l’internaute, le site web affiche un classement de résultats ne respectant pas complètement ce critère, il doit le signaler explicitement (cas par exemple d’une offre mise en évidence dans les premières positions, en tête de gondole, parce que le fabricant accorde au vendeur une marge arrière pour faire ressortir cette offre dans un résultat de recherche interne sans tenir compte des critères ou termes tapés par l’internaute). Rappelons également que, conformément au principe de transparence pour les communications commerciales, le site web doit informer le consommateur de toute publicité.

Les numéros de téléphone dans les mentions légales et sur les réseaux sociaux

Il y a encore d’autres nouvelles obligations entrées en vigueur le 28 mai 2022, certaines s’appliquant spécifiquement aux marketplaces. Cet article visant à fournir les informations qui concernent le plus de professionnels en ligne, notre 4e point d’attention concernera les mentions légales : il est dorénavant obligatoire d’indiquer le numéro de téléphone du professionnel, en plus de l’adresse e-mail.  Le législateur a en effet voulu faciliter le contact direct entre l'acheteur et le vendeur, et s'opposer à une jurisprudence qui s'était établi considérant qu'un numéro de téléphone n'était pas obligatoire si le vendeur fournissait d'autres moyens de communication aisés. Cette information doit figurer avec les autres mentions légales sur tout site web professionnel (marchand ou non), ainsi que dans les éventuelles pages de profil sur les réseaux sociaux.