Le Black Friday ne suffira pas à sortir les marchands de la morosité

Le Black Friday ne suffira pas à sortir les marchands de la morosité Avec les bons débuts de la Black Week, le Black Friday se présente sous une note positive pour les marchands. Mais l'événement commercial ne devrait pas permettre de relever les résultats annuels des e-marchands.

Le Black Friday, qui se tient ce 25 novembre, s'annonce un bon cru pour les marchands français. 70% des Français souhaitent participer au Black Friday d'après une étude PwC Opinium Research, menée sur un échantillon de 2 041 personnes entre le 26 octobre et le 1er novembre 2022, c'est un point de moins que l'an dernier. Le budget moyen est en hausse de 8% sur un an, à 256 euros.

Du côté de chez Cdiscount, les équipes se disent satisfaites des premiers résultats enregistrés depuis le vendredi 18 novembre et le lancement de la Black Week qui précède le Black Friday de ce vendredi 25 novembre 2022. "Sur un mois de novembre qui est très animé, nous avons vu une première vague vendredi dernier et les premiers éléments relevés sont satisfaisants, témoigne Hugo Larricq, directeur commercial de Cdiscount. Le Black Friday s'annonce positif, nous l'avons travaillé encore plus en amont que d'habitude pour sécuriser des volumes à meilleur prix". Selon lui, "l'intérêt des clients est le même que l'an dernier d'après ce que nous relevons sur Google et via notre moteur de recherche. Cela nous rassure, nous atteindrons les mêmes niveaux qu'en 2021 et cela s'explique par un contexte défavorable au pouvoir d'achat. Les clients attendent ce moment pour se faire plaisir".

Cela suffira-t-il à relever les marchands français ? Si les services et le tourisme ont retrouvé des couleurs et soutiennent la croissance de l'e-commerce au global, les ventes de produits sont, elles, en berne. Après avoir enregistré une baisse de 15% au premier semestre 2022, d'après la Fevad, elles se stabilisent à leur niveau de 2021, en baisse de 2%. 

Pas de report des ventes

La plateforme de vente en ligne de champagne Plus de Bulles a déjà effectué son Cyber Monday le 7 novembre 2022 et enregistré une hausse de 33% de son chiffre d'affaires sur la journée par rapport à 2021 et de 45% de son nombre de commandes. "C'est un gros succès sur une journée avec des promotions agressives. Ces dernières font réagir les consommateurs qui cherchent des bonnes affaires", confirme Michel de Guilhermier, un entrepreneur qui est aussi président de Day One, un accélérateur de start-up. "Si le Black Friday est à la hauteur de l'opération Cyber Monday que nous avons menée sur Plus de Bulles, il devrait cartonner. Mais, nous ne sommes pas optimistes pour Noël, la fin de l'année sera moins bonne, il n'y aura pas de report de la consommation". Derrière, les ventes des jours suivants ont souffert de ce bon résultat.

Michel de Guillermier est également partie prenante d'Alice's Garden, une plateforme de produits d'aménagement de la maison. Là aussi, les promotions devraient être importantes. "L'ensemble de la profession a énormément de stocks et nous nous attendons à de grosses promotions. Les entreprises auront besoin de déstocker," continue l'entrepreneur. Pour lui, "les promotions vont faire pression sur les chiffres et les prix seront tirés à la baisse". La plateforme de champagne Plus de Bulles anticipe un chiffre d'affaires en recul de 2 à 6% par rapport à 2021 et de 10% en volume.

L'électronique en souffrance

Si les ventes de produits stagnent à -2% sur un an au troisième trimestre 2022, d'après les chiffres de la Fevad, les ventes de produits électroniques, elles, accusent un recul de 15% et se rapprochent de leur niveau de 2019 (+3%). Pour Marc Lolivier, directeur général de la Fevad, le secteur souffre pour deux raisons : "Les consommateurs se sont déjà équipés au début de la pandémie de Covid et la catégorie subit les arbitrage de consommation".

Chez Cdiscount, Hugo Larricq note aussi un retrait de 15% sur les biens techniques. "C'est un marché difficile pour lequel la fin de l'année est un moment charnière," ajoute-t-il. En revanche, Cdiscount assiste à un rebond sur l'image et le son par rapport aux biens techniques. "Il est compliqué d'identifier s'il y a un effet Coupe du monde ou non", avertit le directeur commercial de la marketplace française. Et le Black Friday ne devrait pas réussir à relever les ventes de la catégorie des produits électroniques.

Le poids de l'achat responsable

D'autant que dans ce secteur, le reconditionné prend de plus en plus de place. D'après une étude de GFK publiée le 17 novembre 2022, Internet est devenu le canal de référence pour les achats d'occasion et de reconditionné. "Les consommateurs réalisent jusqu'à deux tiers de leurs achats en smartphones, PC portables et tablettes sur des sites spécialisés, généralistes ou type ventes privées", note Christophe Loyer, consultant GFK consumer intelligence. Pour 87% des personnes interrogées dans l'étude Opinium Research, le développement durable a un impact sur leur comportement d'achat pendant le Black Friday. Chez Cdiscount, l'achat responsable est désormais pris en compte : "Les produits responsables et réparables représentaient 12 à 15% de notre volume d'affaires, cette année 20% de notre offre en propre sera consacrée à des produits avec de meilleures classes énergétiques ou réparables".

Back Market, de son côté, a fait le choix de ne pas proposer de réduction supplémentaire pour le Black Friday, car ses produits reconditionnés restent moins chers que le neuf tout au long de l'année. L'entreprise note un effet de levier sur la période. "Nous avons vu la demande augmenter autour de cet événement sur les deux trois dernières années. Jusqu'à maintenant surtout des smartphones et depuis 2020 les laptop, tablettes et casques audio sont aussi concernés", explique Marine Libaud, senior lead global PR de Back Market.

Black Friday s'annonce sur une bonne note, mais la fin de l'année devrait faire place à plus de morosité. "Si les achats sont anticipés pendant Black Friday, la suite sera plus complexe, confirme Michel de Guillermier. Nous faisons face à une crise de la consommation, les clients ne veulent pas surconsommer", conclut-il.