Emma Recco (Ikea) "Il faut proposer une plus-value au client qui fait l'effort de venir en magasin"

La directrice stratégie et développement d'Ikea France intervient lors de la Paris Retail Week qui se tient du 19 au 21 septembre, sur la thématique du commerce omnicanal. Pour elle, il faut gommer les frontières entre points de vente physiques et virtuels.

JDN. Vous êtes mentor de la conférence "Mentoring commerce omnicanal" lors de la Paris Retail Week. Comment voyez-vous le commerce omnicanal ? 

Emma Recco, directrice stratégie et développement Ikea France. © Géraldine Aresteanu

Emma Recco. Le commerce omnicanal, c'est le fait de jouer pleinement sur la complémentarité des canaux physiques et virtuels. Ces deux canaux ne doivent pas être opposés. Il n'y a pas un consommateur off line et un consommateur on line. Chaque consommateur navigue d'un canal à l'autre et l'entreprise doit s'adapter pour proposer une expérience fluide du début à la fin. L'omnicanal ce n'est pas une fin en soi, c'est avant tout un moyen de satisfaire le client en lui proposant une expérience agréable, aussi bien en point de vente physique qu'en point de vente virtuel.

Les points de vente physiques sont-ils toujours appréciés des clients ?

Tout à fait. Les clients ont toujours envie de se rendre dans des magasins. Chez Ikea, avant le covid, 10% de nos ventes étaient réalisées en ligne. Après le covid, elles sont passées à 20%. Certes les ventes en ligne ont progressé mais, chez nous, elles restent à des niveaux assez bas. Elles sont encore loin de terrasser les ventes physiques. Et ce n'est pas une question d'âge des clients. On n'a pas constaté que les jeunes désertaient les points de vente physiques. Les magasins sont toujours appréciés des clients. Simplement, leur rôle a évolué. 

Dans quelle mesure ?

Il y'a quelques années, quand le client venait en magasin, il n'avait pas forcément une idée en tête. Aujourd'hui, quand il franchit la porte d'entrée du magasin, il sait déjà quel produit il veut acheter car il s'est renseigné en amont sur internet. Si le client se déplace dans un commerce physique, souvent, c'est pour tester et expérimenter un produit qu'il a repéré sur le site web d'une enseigne. A Ikea, le client d'avant venait pour faire le parcours découverte. Aujourd'hui, on lui propose des raccourcis pour le mener directement vers le produit qu'il a sélectionné. On voit clairement la complémentarité entre le canal physique et le canal numérique. Et le magasin doit s'habituer aux nouvelles pratiques d'un consommateur qui a des exigences qui évoluent également.

Comment un magasin peut-il répondre aux nouvelles exigences du client ?

Quand un client fait l'effort de venir dans un point de vente physique, il faut lui proposer une plus-value pour récompenser cet effort. Pour cela, il faut lui mettre à disposition des outils digitaux pour améliorer son expérience. A l'inverse, il faut savoir aussi proposer aux clients une interaction humaine dans une relation à distance. C'est clairement une attente du consommateur de vouloir interagir avec une marque à n'importe quel moment de la journée. Au final, le client va choisir ce qui lui correspond le mieux entre le on line et le off line qui ne sont pas du tout deux mondes qui s'affrontent, mais deux canaux complémentaires. Il ne faut surtout pas opposer ces deux canaux. Une enseigne qui réussit sa transformation omnicanale, c'est une enseigne qui gomme les frontières entre les canaux.

Comment Ikea parvient à gommer les frontières entre ces deux canaux ?

Pour ajouter de l'humain dans la relation avec nos clients, on propose par exemple de prendre des rendez-vous à distance. On a également multiplié les points de vente de petite taille un peu partout en France pour être proche de tous nos clients, pas seulement ceux qui habitent dans des grandes villes. Et pour offrir une expérience digitale aux consommateurs qui viennent sur place, on a développé le click and collect. Dans nos magasins aux dimensions plus modestes, on a mis en place des projections pour que le client voit tous les produits comme s'il était dans un magasin de 20 000 mètres carrés.