A quand la généralisation du NFC ?

Le NFC mobile fait les gros titres depuis 5 ans, avec un ‘décollage’ annoncé par les médias. Si cette technologie a vu l’émergence de pilotes dans plusieurs villes en France, elle est loin d’avoir généré une adoption massive. L’essor n’est pas au rendez-vous malgré les 250 millions de smartphones désormais équipés dans le monde.

Le NFC (Near Field Communication), technologie dérivée du RFID permet l’échange de données entre deux puces de façon intuitive et sécurisée, en utilisant la gamme de fréquence 13,54 MHz sur une distance limitée. Cette technologie est principalement utilisée dans le transport avec, par exemple, le pass Navigo de la RATP.
Concrètement, le NFC mobile représente l’utilisation de la technologie au travers d’un smartphone, via la présence d’un composant supplémentaire au coeur du terminal. Si le Japon utilise depuis 2004 des services de paiement via le NFC mobile, la France demeure dans une phase d’expérimentations, avec plus d’une soixantaine de tests pilotes menés dans les domaines du paiement, du transport ou encore de l’information. Les retours sont positifs, 90 % des clients se montrant très satisfaits des usages d’après le Forum Services Mobiles Sans Contact.
Utilisable dans différents domaines, le NFC mobile présente des avantages incontestables. Le consommateur voit son expérience utilisateur simplifiée, entrainant un gain de temps significatif dans différents types de transactions. Grâce à son mobile, l’utilisateur pourra en une fraction de seconde payer ses achats, valider son titre de transport ou encore s’identifier au bureau.
En sus, l’utilisateur pourra bénéficier de services informatifs, en badgeant par exemple sur la borne d’un transporteur pour avoir des informations en temps réel sur l’état du trafic, ou encore des services de partage avec des fonctionnalités d’appairage (musique, applications,…). Des avantages se présentent aussi pour les fournisseurs. La réduction de coûts issue de la dématérialisation de supports (tickets, coupons,…) est prometteuse. De plus, les fournisseurs peuvent accroitre leurs interactions/‘touchpoints’ avec les clients en offrant plus d'informations sur les produits via des affiches équipées de tags. Enfin, c’est l’occasion rêvée pour cumuler des données sur les usages et comportements des clients, données qui pourront être utilisées afin d’améliorer les services existants ou, le cas échéant, monétisées vis-à-vis des tiers.

Aujourd’hui, plusieurs facteurs freinent la démocratisation du NFC mobile

  • Premièrement, l’application reste quasi-figée à l’univers du paiement. Le NFC promet pourtant des horizons fonctionnels plus larges au travers d’univers adjacents (couponing, programmes de fidélité,…) ; mais aussi avec des activités différentes comme la culture ou la santé. Par exemple, la présence de bornes NFC dans les hôpitaux permettrait la consultation du dossier médical via le mobile.
  • Deuxièmement, l’écosystème des acteurs, aujourd’hui très fragmenté, n’offre ni rationalisation des normes ni vision claire de la chaine de valeur : opérateurs télécoms bien sûr, mais aussi les banques ou encore les acteurs « Over-the-Top ». Du côté des constructeurs, même constat : aucune marque n’a réussi à faire décoller le NFC mobile. Ni Nokia, ni Blackberry, ni même Samsung, qui ont équipé leurs smartphones de puces NFC, n’ont réussi à faire sensiblement décoller le marché. Le sud-coréen a même signé un partenariat avec Visa, dans le but d’accélérer les usages en s’adossant à une marque forte. Google s’y est également aventuré avec son portefeuille électronique sans contact Google Wallet, repositionné depuis sur le paiement en ligne.
    Le NFC mobile reste aujourd’hui boudé par Apple, qui a préféré équiper son Iphone 5S d’un capteur d’empreinte digitale. Enfin, le frein technologique de standardisation reste aujourd’hui non négligeable. Le « Secure Element », composant du NFC mobile qui héberge et régit les applications NFC téléchargées, peut fonctionner selon plusieurs modèles industriels, compliquant ainsi les enjeux d’interopérabilité.

Pour accélérer l’envol de cette technologie, plusieurs leviers sont à activer

L’écosystème des fournisseurs doit être harmonisé. Les opérateurs peuvent se positionner au cœur de ces travaux en proposant des solutions NFC interopérables. Ils peuvent s’appuyer sur leur base d’abonnés afin de diffuser les usages, et les positionner au cœur de leur expérience client. De plus, chaque acteur doit pouvoir capter une partie des revenus cohérente avec son rôle au sein de la chaine, jusqu’au commerçant utilisant la solution.
La dynamique globale demeure encourageante : le parc de terminaux équipés a dépassé la taille critique et la mobilité est au cœur des usages quotidiens. Les voyants sont au vert en France, avec un engagement public important - 20 millions d'Euros de fonds disponibles – et des tests nationaux stimulés par les opérateurs. Cityzi en est le parfait exemple.
Cette initiative rassemblant notamment Orange, SFR et Bouygues Telecom, mais aussi des acteurs des secteurs de la banque ou du transport, a pour objectif de promouvoir le déploiement du NFC mobile, via des terminaux spécifiques Cityzi et sur différents services (transport, culture, paiement). Gageons pour que les opérateurs poursuivent leurs efforts pour jouer un rôle majeur dans l’éducation des clients.

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Chronique rédigée par Jean-Michel Huet, Directeur Associé BearingPoint, Antoine Schmidt, Manager BearingPoint, et Youssef el Shaarany, Consultant BearingPoint