L’Influence : l’or digital

L’influence est LA valeur sur laquelle il faut miser en 2015. Et bien qu’elle ne soit pas (encore) cotée sur les places financières internationales, l’influence s’affirme bel et bien comme le nouvel "or digital".

Beaucoup voient une opportunité dans ce nouveau négoce de l'influence digitale. Nous assistons à l’apparition de places de marchés, sortes de brokers de l’influence, dont la proposition est de permettre aux personnes disposant d’une audience captive de faire fructifier leur « capital d’influence» auprès des marques.  Le concept n’est pas si nouveau que ça ; Klout avait bâti son succès initial sur ce même principe. Mais la vitesse à laquelle ces plateformes apparaissent - 15 minutes de recherche sur le net permet d’en dénombrer une cinquantaine -  remet en question  une certaine conception de l’Influencer Marketing. Alors que nous prônions la construction de relations avec les influenceurs sur le long terme, les marques pourraient désormais recruter en quelques heures une armée de leaders d’opinion et créer une campagne de bouche à oreille en deux coups de cuillère à pot. Avions-nous tout faux depuis le début ?

On peut aisément comprendre pourquoi certains influenceurs se laissent séduire par la promesse de ces plateformes. Elles leur offrent un supplément de visibilité et, soyons francs, ils n’ont pas grand-chose à y perdre.  Se poser la question de savoir si les marques peuvent elles aussi y trouver leur compte revient en revanche à se poser la GRANDE question : la rémunération est-elle la clef de voute des relations avec les influenceurs ?

Un besoin de visibilité.  Une histoire de confiance et de transparence

Selon notre récente étude sur « l’Etat et les pratiques del’Influencer Engagement en 2015 », plus d’un tiers des marques rémunèrent les influenceurs avec lesquelles elles collaborent de manière fréquente ou systématique. La tendance est encore plus affirmée en Amérique du Nord, où ce chiffre s’élève à plus de 50%. Au premier abord, l’approche payante est d’ailleurs plutôt séduisante pour la marque : un contrôle plus facile du message, du timing de publication (pour un lancement produit par exemple), et une manière de calculer le ROI similaire à celle adoptée dans la publicité, ce qui comporte un côté rassurant pour beaucoup de professionnels du marketing.

Mais si elle semble plus facile et plus sûre, l’approche sponsorisée est-elle également la plus efficace ? Si l’efficacité se mesure en termes de reach pur (nombre de personnes atteintes), ce sera peut-être le cas. Mais l’effet souhaité du processus d’Influencer Engagement va bien au-delà du nombre d’utilisateurs touchés : il doit se mesurer en termes de confiance générée auprès de l’audience finale.  Un article authentique, obtenu de manière « organique » auprès d’un influenceur convaincu par le message ou le produit de la marque, aura ainsi plus d’impact qu’un billet ou qu’un tweet sponsorisé (certaines études l’ont d’ailleurs prouvé).

Une chose est sure, la transparence reste dans tous les cas de mise.  Machinima, qui a récemment proposé aux Youtubers de son réseau de faire la promotion de la Xbox en échange d’une rémunération financière « confidentielle », n’a pas manqué de se faire épingler par la FTC. Pour Microsoft, qui n’avait à priori pas connaissance des pratiques de son intermédiaire, les conséquences en termes de réputation ont été désastreuses au sein de la communauté des gamers (sans parler de celle des influenceurs impliqués).

Le contenu, la première rémunération

Les influenceurs doivent-ils être rémunérés pour les services qu’ils rendent aux marques ? Bien que certains d’entre eux ne comptent pas sur ces compensations pour vivre (les journalistes, ou certains experts utilisant leur blog comme vitrine d’une activité corporate ou politique par exemple), il existe de plus en plus de personnes qui ont fait de leur influence leur principal outil de travail. Comme le déclarait récemment Jeff Bullas, ces derniers ont travaillé dur pour construire leur communauté, acquérir de la crédibilité auprès de leur audience et gagner peu à peu leur confiance. Les bénéfices qu’ils peuvent apporter aux marques sont énormes et doivent être reconnus à leur juste valeur.  

Mais la rémunération financière est-elle l’unique source de motivation des influenceurs dans le cadre de leur collaboration avec les marques ?  Pas si l’on en croit les résultats de notre étude, où il ressort que l’élargissement de la communauté (55%) et l’obtention de ressources pour créer des contenus de qualité pour leur audience (45%) arrivent bien avant la rémunération financière (25%) sur la « pyramide de Maslow » des influenceurs.

Comment interpréter ces résultats ? Même dans les cas où il existera une rémunération in fine, il faudra tout d’abord convaincre l’influenceur que le contenu que vous lui proposerez sera pertinent et utile pour son audience, et qu’il pourra en tirer profit pour satisfaire les attentes de sa communauté. Il sera donc dans tous les cas nécessaire de créer une relation avec l’influenceur, de prendre en compte son contexte, et réfléchir à la meilleure manière de l’aider à atteindre ses objectifs auprès de son audience.

Mauvaise nouvelle pour les professionnels du marketing qui songeait faire de l’Influencer Engagement en faisant uniquement marcher la planche à billet, et peut-être une des limites des places de marché que nous citions plus haut. Ne perdez jamais de vue que l’influence ne s’achète pas, elle se gagne