Que faut-il savoir du régime de TVA intracommunautaire dans la vente à distance ?

Les sites e-commerce qui effectuent des ventes dans d’autres États membre de l’Union européenne ou à l’export doivent appliquer le régime de vente à distance en matière de TVA. Comment facturer ? Quel taux de TVA appliquer ? Comment simplifier ces démarches ?

Voici les principes à respecter, les erreurs à éviter et les solutions à adopter en matière de TVA intracommunautaire dans la vente à distance. L’un des défis majeurs auquel fait face un site e-commerce est son expansion internationale. Les challenges d’une boutique en ligne en phase d’internationalisation sont multiples : contenus multilingues, aspects techniques, habitudes culturelles spécifiques, référencement à l’international… Cependant la gestion des taxes et de la TVA est rarement prise en compte.
Les 2 règles à connaître en la matière 
  • Pour connaître quel taux de TVA appliquer en cas de livraison dans un autre pays européen, il faut prendre en compte le montant annuel des ventes à distance du site e-commerce dans l’État membre destinataire. Si le chiffre d’affaires annuel ne dépasse pas le seuil TVA fixé par l’État membre, l’opération est soumise à la TVA de l’État membre d'établissement du site e-commerce. Si ce seuil est dépassé par le vendeur, dans ce cas le taux de TVA en vigueur dans le pays de destination s’applique. Le vendeur doit alors s'identifier à la TVA dans cet État. Chaque État défini son propre seuil de vente à distance (seuils applicables au 1/1/2018 dans les différents Etats membres).
  • À partir de la date de dépassement du seuil de vente à distance, le vendeur dispose de 30 jours pour s’identifier à la TVA dans cet État. Ensuite, il devra facturer avec le taux de TVA de l’État de destination, déposer les déclarations nationales de TVA de ce pays et reverser la TVA collectée aux services des impôts de celui-ci.
Il est également possible de s’identifier à la TVA de ce pays de destination même si le seuil de vente à distance n’est pas dépassé (cela peut par exemple être avantageux pour les ventes vers les luxembourgeois). Cette option doit simplement être formulée par écrit auprès des services des impôts des deux États concernés.Voici un premier exemple. Une entreprise française a réalisé en N-1 des ventes à distance à destination du Portugal à hauteur de 25 000 € HT. Ces ventes pourront être déclarées au niveau de la TVA en France. En N, le seuil de 35 000 € est franchi au 10 octobre. L’entreprise française devra s’identifier à la TVA au Portugal avant le 10 novembre et déclarer les ventes à distance au Portugal pour la vente qui a provoqué le dépassement du seuil et pour les ventes suivantes.Quelle astuce adopter ? La diversité des seuils oblige les entreprises à prévoir une classification de leurs ventes en fonction des États membres de destination pour mesurer exactement le montant des ventes et le seuil fixé par chaque État.Comment s’identifier à la TVA dans un autre État membre ? Chaque État met à disposition sur le site internet de son administration la procédure à suivre pour identifier à la TVA des sociétés étrangères non établies. Malheureusement ces procédures sont dans 90 % des cas dans la langue locale. Cependant il est parfois possible de trouver des informations en anglais. Pour connaître les sites officiels des administrations de chaque État vous pouvez vous rendre sur le site de la commission européenne.Pour minimiser l’impact de ces lourdeurs administratives, la loi permet de faire appel à un tiers déclarant appelé mandataire fiscal ou représentant fiscal (le terme diverge en fonction de la situation de l’entreprise) qui se charge d’identifier la société étrangère à la TVA et d’effectuer ses obligations déclaratives lui incombant. Ce service est aujourd’hui très fréquent chez les cabinets d’expert-comptable ou les cabinets fiscaux. D’ailleurs plusieurs cabinets en ont fait leur cœur de métier en proposant des services dédiés à cette profession.Quels sont les risques si les règles du régime de vente à distance ne sont pas respectées ?

Dans la théorie, les risques sont importants. Si un contrôle fiscal est déclenché, l’administration de l’État d’origine préviendra l’administration de l’État de destination délaissé et “aucun cadeau ne sera accordé”. Des pénalités seront appliquées pour manquement aux déclarations, des intérêts de retard seront également exigés pour le non-paiement de la TVA. Le contrôle nécessitera de longues heures de travail et les frais d'honoraire de votre conseil s’envoleront. En résumé, le contrôle fiscal sera très onéreux.

En réalité, plutôt peu de redressements sont constatés. Les échanges d’informations entre les États membres sont réduits en la matière et peu de sites e-commerce sont pour l’instant inquiétés si le dépassement n’est guère significatif. La TVA étant erronément collectée et reversée dans le pays d’origine au lieu du pays de destination, il est assez rare de voir le pays d’origine s’en plaindre. Généralement, l’inspecteur en charge du dossier avertit l’entreprise et invite à se mettre en règle sans pour autant en faire part aux autorités compétentes de l’État de destination.

L’évolution du régime de vente à distance : MOSS vs OSS
L’Union européenne a bien conscience que ces démarches administratives sont des freins au développement des e-commerçants. La commission européenne estime que le coût de mise en conformité à la TVA est d’environ 8 000 € pour une PME. Pour simplifier les procédures et réduire les coûts, la commission européenne travaille actuellement sur une proposition législative pour moderniser la TVA dans l’e-commerce.

Cette volonté a déjà vu le jour de façon limitée avec les prestations de services électroniques (ventes d’E-Book, formation en ligne…). Depuis le 1er janvier 2015, les prestations de services électroniques sont imposables dans l’État membre où est domicilié le consommateur. De ce fait, le prestataire déclare et paie la TVA dans chaque État membre de consommation.

Cependant, pour simplifier ces obligations, un guichet unique électronique appelé « mini-guichet unique TVA » (ou « MOSS » pour « mini-one stop shop ») a été mis en place dans l'Union européenne qui permet aux vendeurs de déclarer toutes leurs ventes UE sur une seule et même plateforme en ligne.

L’Union européenne a pour ambition de créer une plateforme similaire pour l’ensemble des activités de vente à distance (OSS). L’étude estime que les coûts liés à la mise en conformité de la TVA seront réduits de 95 % (soit l’équivalent de 2,3 milliards d’euros d'économie pour les entreprises). Enfin, une autre proposition concerne les micro-entreprises. Si leur chiffre d’affaires intracommunautaires ne dépasse pas le seuil de 10 000 €, elles n’auront pas besoin de facturer avec la TVA de l’État de destination. Toutes ces mesures devraient voir le jour en 2021.