12 clichés de pigeons autour du Projet de loi de finance

Retour sur 12 clichés ou rumeurs entendus à la machine à café depuis la fermeture de la page qui avait rassemblé plus de 70 000 pigeons contre le projet de loi de finance 2013.

1- Les pigeons ont fermé leur bec parce que, repus, ils avaient obtenu ce qu'ils voulaient.
Faux :
certains amendements ont en effet été apportés à la loi de finance 2013 mais ils ne répondent pas à la question qui était posée, celle du financement des PME de croissance (les start up). En effet les conditions sont tellement contraignantes que moult entrepreneurs s'en trouvent exclus. Ne serait-ce qu’à cause de la durée de vie de l’entreprise retenue par la loi : 10 ans minimum.
Dans une économie de croissance cette durée semble héritée de la 1ere révolution industrielle...

2- Les pigeons ont abandonné le combat par manque de « testicules » politiques ?
Faux :
l'énergie inédite démontrée par ce mouvement a permis en très peu de temps de sensibiliser l'opinion, les média puis la classe politique sur la question des entrepreneurs en France. Après le printemps arabe, l'automne entrepreneurial ! Mais un tel mouvement de colère ne génère pas d'idée  et ne permet pas de négocier avec le législateur. Sa nature anarchique finit par lui nuire et les tentatives de récupération finissent par le rendre inaudible.

3- Le combat continue, underground !
Vrai :
dans les corridors des institutions, il est nécessaire de faire comprendre les effets pervers des amendements. Le gouvernement a manœuvré de manière exemplaire en matière de communication politique, laissant entendre que le problème était résolu. Mais aujourd'hui la réalité est que les start-up ont du mal à trouver des financements. La destruction d'emplois et les dépôts de bilan seront des conséquences tangibles d'un manque de discernement qui aura découragé les investisseurs. Les pigeons doivent céder la place aux taupes, qui creusent des galeries entre les assemblées.

4- Le gouvernement ne peut pas perdre la face
Vrai :
il y a eu des promesses dogmatiques faites en campagne. La situation pourrait laisser entendre …
- soit que le gouvernement a reculé, ce qui est critiqué par sa gauche malcomprenante de la réalité entrepreneuriale; 
 - soit que la réponse n'est pas adaptée, ce qui lui est reproché par sa droite sociaux-démocrates pragmatiques. Bref un compromis insatisfaisant, un "cul-entre-deux-chaisisme" délétère sur le plan économique.

Pour en sortir par le haut, il faut du courage et la vision d'une France moderne qui cherche à attirer les financements pour devenir la Silicon Valley européenne.

5- Les entrepreneurs sont tous les mêmes !
(Sous-entendu : on ne va quand même pas faire une loi spéciale pour les start-up ?)
Faux :
si la CGPME défend les PME traditionnelles, ce n'est pas critiquable en soi, mais relève d'une vision patrimoniale "à la papa", la PME que l'entrepreneur dirige toute sa vie, qui lui vient de son père, qu'il cédera à ses enfants ou revendra au moment de sa retraite. Cette PME investit peu, croit lentement et n'a donc pas les mêmes besoins de financement. La loi de finance traite bien cette PME-là.
La « PME de croissance » connaît un cycle de financement différent, plus rapide : elle peut opérer des augmentations de capital qui invitent à son tour de table de nouveaux investisseurs tous les 2 ou 3 ans. A l'issue de ce cycle, certains fondateurs peuvent se retrouver détenir moins de 2 % du capital.

6- Les entrepreneurs ne veulent pas payer d'impôts : ils se battent égoïstement pour leur plus-value. (Sous-entendu c'est un mouvement corporatiste et poujadiste voire futile qui se désolidarise de la chose publique).
Faux:
l'enjeu des plus-value est le symbole d'une industrie qui a du mal à se financer en France.
Cette économie de croissance a besoin d'attirer des entrepreneurs et des investisseurs, plutôt que de les laisser:
-
se diriger vers des écosystèmes moins risqués,
- ou se délocaliser. Aujourd'hui déjà les plus-values sont davantage taxées en France que dans le reste de l'Europe.
La plupart des entrepreneurs français et leurs business angels accepteraient certainement un effort fiscal supplémentaire à condition qu'il ne soit pas décourageant.
Mais :
-
Aujourd'hui,  pour un investisseur, les abattements sur les dividendes sont plus favorables. Pourquoi les épargnants prendraient le risque de s'aventurer à financer des sociétés qui doivent réinvestir en pariant sur le moyen terme plutôt que distribuer des dividendes pour enrichir leurs actionnaires à court terme ?
- 
Aujourd'hui, pour un entrepreneur la création d'entreprise est un choix peu rémunérateur. Saviez vous que les écarts salariaux dans les start-up sont nettement inférieurs à ceux observés dans les grandes boites ? Il faut donc un environnement attractif si l'on souhaite que de jeunes diplômés prennent ce risque. ce n'est pas un combat de millionnaires isolés, c'est la construction d'un tissu économique fragile, mais porteur d'espoir de sortie de crise.

7- Les pigeons se sont tus car ils se "cassent" à l'étranger !
A confirmer :
on a parlé de "Taux confiscatoire" c'est même le point de départ de la grogne.
Or, pour bâtir une économie innovante en France, trois ingrédients sont nécessaires :
-
un niveau d'enseignement de qualité,
- un état d'esprit (créativité et combattivité),
- et des financements.

La France est très bien placée sur le premier. Sur le second il nous faut travailler l'image de l'entrepreneur : tandis qu'aux États-Unis, les Américains placent 3 entrepreneurs parmi leurs 10 personnalités préférées, l'IFOP n'en recense aucun parmi les 50 favoris des Français en 2012. Le troisième ingrédient nous manque cruellement. Le cycle de financement est plus facile à amorcer à l'étranger. Il semble que nous ne recensions que 8 000 business angels français, à comparer aux 50 000 anglais. Je vous invite à comparer le casse-tête du parcours fiscal français à celui de nos voisins, cela peut prêter à sourire, mais…
Nul chantage, les 3000 signataires du manifeste ont payé leurs impôts en France. Mais le gouvernement ne peut pas raisonnablement faire ses calculs pour 2013 en considérant la même assiette fiscale qu'en 2012, comme si une telle loi de finance n'aurait aucun impact sur les comportements des contribuables visés.

8- Les start-up c'est de la croissance ? Des emplois  ou du bluff ?
Vrai :
ce n'est pas une rumeur, l'association France Digitale a mené une étude sur 108 start ups, leur croissance moyenne est de 33%, et le nombre d'emploi a augmenté de 24%.
On manque de statistiques et de définitions sur cette économie,
qui était un secteur peu revendicateur jusqu'à cette année. Mais il apparait évident que ces emplois par nature sont ceux de demain... Ce combat pour le financement en vaut la peine !
La Mairie de Paris a revendiqué cette année 1800 start-up, 50% de plus qu’à Londres. Répétons-le, l’enjeu est de créer la « Silicon valeur » à la française...

9- Une plus-value n'est pas un revenu comme un autre : les business angels sont des victimes collatérales...
Vrai et vrai :
la plus value n'est pas un revenu du capital, c'est un revenu exceptionnel, non récurrent, et très incertain au moment de l'investissement.

Dans l'immobilier, les revenus fonciers sont les loyers perçus par le propriétaire, mais si on imposait au moment de la revente la plus-value immobilière à 62,5%, on tuerait le rêve d'accès à la propriété qui permet à une famille de commencer par un studio puis de revendre pour racheter pour agrandir sa famille. Personne n'y songerait !
Alors pourquoi les business angels et les entrepreneurs, qui prennent des risques, n'arrivent pas à se faire entendre ?
A partir du moment où ils créent des emplois et de la valeur en France, ne devrait-on pas encourager ce rêve-là aussi ?

10- François Hollande n'a pas accusé réception du manifeste des 3000 entrepreneurs.
Vrai :
il semble que cette difficulté à se faire comprendre et entendre ait plusieurs origines.
A l'aile gauche du PS « on » nous traite avec démagogie de "quarteron de millionnaires connectés", en nous opposant aux vrais "canards boiteux" qui font la noblesse de la mission politique. Mais la très vieille logique originelle de gauche semble bloquée sur la nécessité de se méfier du « Capital », au mépris des conséquences pragmatiques. Bien sûr le rôle de l’Etat est d’encadrer l’économie qui ne redistribue pas « spontanément ».  Mais il s’agit aussi d’encourager le risque en pensant la loi de façon incitative et non privative.

11- Les patrons, tous les mêmes ?
Faux :
la caricature de la figure de l’entrepreneur par certains socialistes ou à l’opposé par le MEDEF, ne rendent pas justice à une catégorie qui pourrait faire de la France un champion d’Europe. On ne parle pas ici des grands patrons surprotégés par des contrats en béton, mais de jeunes qui prennent un risque patrimonial maximum.

Le mouvement des pigeons, imité par tout le monde ces derniers jours à travers un bestiaire en folie, a fini par rendre le roucoulement agaçant et sans nuance.
Il s’agit dorénavant de calmer les « je » et de clamer le jeu collectif ! Investir dans des jeunes PME non cotées en bourse, c’est collectif et non spéculatif ! Mais le seul espoir de revenu dans ce type d’investissement c’est bel et bien la plus-value espérée à terme. Donc il faut rendre ce rêve d’enrichissement accessible à tous. Ce n’est pas jouer au loto, ni à la bourse, c’est productif !

12- Il y a d’autres problèmes que les plus-values des entrepreneurs !
Vrai :
coûts du travail et cotisations patronales, choc de compétitivité, statut d’auto-entrepreneurs, TVA sociales, flexibilité du travail, taux de chômage désespérant, dette publique affligeante, ascenseur social en panne…  autant de terrains de jeu pour aider la gauche à progresser dans la compréhension du monde de l’entreprise, pour sortir de la crise. Mais bon, commençons par la question du financement des PME, et comment le rendre attractif : en créant plus d’emplois, donc moins de chômeurs, en payant plus de cotisations sociales, peu à peu nous allons contribuer à un rééquilibrage de nos dépenses publique (à notre petit niveau) et nous allons redonner espoir à une jeunesse déprimée avant qu’elle n’aille voir ailleurs si j’y suis.

Ah oui, pour rappel, je ne défends pas ma plus-value, mes actions PriceMinister ont déjà été revendues en 2010... Et d'ailleurs à l'époque mon profil ne répondait pas aux critères de l'entrepreneur tels que définis aujourd'hui par les amendements votés à l'Assemblée Nationale cette année.
Si cette loi avait été votée il y deux ans, entre nous, je n'aurais pas pu réinvestir dans 15 nouvelles start-ups... A qui veut l'entendre, le comprendre ?