Quelles sont les nouvelles formes d'activisme nées sur le Net ?
Les consommateurs adoptent de nouvelle forme d'outils de social computing pour se défendre de l'intrusion grandissante dans leur vie privée de GAFA (Google Apple, Facebook Amazon). Ces activists social computing permettent aux consommateurs de commencer à se protéger des entreprises qui ont des comportements anormaux.
Mais certains entreprises peuvent aussi utiliser cela pour créer de nouveaux produits plus adaptés à ces activistes dans un cercle vertueux conduisant à un monde meilleur.
Ce matin une
chronique a attiré mon attention. Un jeune homme a tenu son pari de
« manger sans huile de palme pendant un an ». Il a relaté son
expérience et ses découvertes sur son blog et quelle a été sa difficulté parce
que les informations sur les étiquettes des produits alimentaires sont
imprécises. http://vivresanshuiledepalme.blogspot.fr/.
Le succès de ce
jeune homme et de son expérience dans la presse montre l’intérêt grandissant
des consommateurs pour devenir acteur d’une consommation plus responsable. On
est déjà plus dans les incantations d’avant-gardistes bien qu’ils agissent
comme des alerteurs leur impact reste limité. Plus récemment l’affaire des
plats cuisinés Findus soit disant viande de bœuf qui était en fait du cheval
nous rappelle régulièrement cette opacité créée par la mondialisation et les
trop nombreux intermédiaires qui détruisent à petit feu la confiance des
consommateurs.
Ces faits
s’inscrivent dans un mouvement plus large qui va être la réaction des
consommateurs à l’intrusion grandissante dans notre vie privée du marketing
comportemental. Ce marketing va utiliser (ou utilise déjà) les information
temps réel de ce que vous êtes en train de faire à cet instant avec des
informations récoltées sur vous avec votre consentement et enfin avec des
analyses de sentiments via les données agrégées provenant de Google, Apple, Facebook
ou Amazon pour vous micro cibler et vous faire une offre commerciale qu’il vous
sera difficile de refuser. Est-ce mal ? Non. Après tout, certaines de ces
offres seront très utiles et suffisamment attrayantes. Devons-nous nous couper
d’utiliser les téléphones, les objets internet qui collectent ces informations
comme la géolocalisation qui rendent tant de services ? Certainement non.
Mais alors comment protéger sa vie privée ? C’est là que le bât blesse.
Les consommateurs ont découvert la puissance du Web 2.0 avec Facebook, Twitter, les blogs agissant comme une caisse de résonance. Le marketing comportemental est une réappropriation du web par les entreprises. On pourrait le nommer Web3.0 mais cette appellation est déjà largement utilisée par Tim Berners Lee pour le web sémantique, mais c’est certainement une 3ème vision du Web. La réponse des consommateurs est de rejoindre une nouvelle forme de social computing appelé activist social computing qui formera les prémices de la génération suivante du Web. On pourrait l’appeler le Web 4 comme le Web 2 était une réponse au Web 1. Nous l’appellerons plutôt le « values driven customer ». Cette nouvelle forme couple le débat du social computing avec de nouvelles capacités d’action que permet le Web. On a déjà entendu parler des hard activists social computing comme Wikileaks ou Anonymous. Hard car ils utilisent des moyens jugés par les gouvernements comme illégaux mais qui dans quelques années seront reconnus comme légitimes par les populations qui leur seront reconnaissants pour leur rôle d’alerteurs. Il y a aussi des exemples de soft activists social computing qui naissent en ce moment et qui permettent à une majorité silencieuse aujourd’hui d’exprimer leur frustration et d’agir en conséquence. Les modes d’actions pouvant être virtuels ce qui convient très bien à des consommateurs qui en général sont « paresseux » face à tout effort de recherche. Le consommateur moyen dont je fais partie préfère consommer ses produits habituels plutôt que de remettre en question des années de consommation. En France vous avez 3 exemples qui sont mesgouts.fr, Shopwaise.fr et Noteo.info. Ils notent les produits courants sur un certain nombre de critères notamment nutritionnels, éthiques, localisation. Ils permettent de faire vos achats selon vos valeurs et non plus uniquement en fonction du prix. Ils permettent de vivre votre vie suivant vos valeurs et/ou vos croyances. Comme ils mettent leurs applications sur mobile il est facile de scanner le code barre et d’obtenir quasiment instantanément le score et de comparer différents produits en magasin.
Ces softs activists social computing sont fragiles. Ils sont tous à la recherche d’un business model (modèle d’affaire comme disent les Canadiens) qui leur permette de vivre tout en gardant une certaine indépendance. Car de cette indépendance dépend largement leur crédibilité aux yeux de leurs membres. On peut imaginer dans le futur des offres payantes qui testeraient en laboratoire tous les produits et nous permettraient d’être certain de ce que nous consommons. Des sociétés comme Hop-Cube par exemple offre ce service pour les produits gris, c’est-à-dire machines à laver, télé et autres. Ces softs activists social computing sont clés car ils contre-balancent la toute puissance actuelle de GAFA (Google, Apple, Facebook et Amazon). Ils permettent au consommateur de reprendre le pouvoir sur sa vie et ses croyances largement mis à mal par un marketing omniprésent et manipulateur.
Mais il pourra
aussi y avoir des modes d’actions plus physiques comme illustrés par les
« bash mobs » ou les « carrot mobs » aux US. Cette forme de
mobilisation aux US a été introduite par des étudiants qui se sont regroupés et
ont ainsi envahis des magasins (en général de quartier) et en échange d’un
chiffre d’affaires réalisé sur la matinée par la foule obtient le remplacement
d’ampoules à filaments contre des ampoules basses consommations.
Ces approches
très américaines sont plutôt en mode win-win avec les marques et sont plus
optimistes plutôt que l’affrontement stérile. Car après tout est ce que tout le
monde n’a pas envie d’un monde meilleur ? Y compris les entreprises ?