Communication de crise : faut-il plaider coupable ?

En cas de mise en cause publique, communiquer c'est avant tout reconnaitre la crise, l’assumer, s'y engager et répondre à l’émotion publique. Mais faut-il pour autant plaider coupable ?

Pour affronter une crise, qui affecte l'opinion publique et dont les medias s'emparent, la communication joue un rôle majeur. Gérer une crise implique donc de définir une stratégie de communication pour limiter les aspects émotionnels collectifs et réduire les impacts négatifs sur la réputation des personnes ou d'organisation publiques ou privées.
Dans une crise,  la communication laisse plus de trace que la crise elle-même. Si l'affaire dite du sang contaminé reste un triste épisode du gouvernement de Laurent Fabius, symbolisée par la formule de Georgina Dufoix "responsable, mais pas coupable", plus personne n'a en mémoire la réalité des faits et des responsabilités. Pourtant, chacun garde à l'esprit les propos d'une ministre qui a cherché à tort ou à raison à se défausser, à désengager sa responsabilité personnelle, alors que l'opinion publique avait besoin de désigner un coupable.
Peut-être aurait-il été préférable de se déclarer "pas responsable, mais coupable" ?

En cas de crise publique, la priorité n'est plus aujourd'hui de chercher à protéger directement son image ou sa réputation. La priorité est de manifester sa capacité à assumer ses responsabilités, puis communiquer en direction de l'opinion publique et des médias pour répondre au besoin d'information.  Enfin, il faut surtout savoir faire preuve d'empathie, être capable d'écouter et de se mettre à la place de celles et ceux, touchés dans leurs biens, leur chair ou leur esprit par l'évènement sujet de la crise.
Par exemple, le début de gestion de crise de BP face à la marée noire qui pollue les  Etats-Unis a été exemplaire et devrait devenir une référence dans les anales de la communication de crise.
Tony Hayward, CEO de BP a très rapidement déclaré "Nous assumons nos responsabilités, nous nettoierons, nous paierons". Puis, BP a recruté des pêcheurs américains, pour participer activement à la dépollution. Cette prise en charge de la crise, cet engagement, ont presque conféré à BP une image héroïque.
Par ces déclarations, simples et efficaces, ne cherchant pas à se défausser, Tony Hayward a coupé l'herbe sous les pieds d'un président américain, dont la réaction attendue, n'aura été qu'un copier-coller des déclarations du patron de BP.
La compagnie pétrolière n'est peut-être pas responsable ou seule responsable. Devant la justice, BP ne sera peut-être même pas légalement responsable. Enfin, après de longues procédures, alors que l'opinion publique aura oublié cette crise, BP n'assumera probablement pas seule le coût de cette catastrophe écologique, et se retournera contre ses partenaires et ses assurances. Néanmoins, aujourd'hui, en ne cherchant pas à se défausser, en assumant la situation, en s'y engageant comme un acteur responsable, BP gère au mieux la situation, ses intérêts et son image. Mais pour cela, il lui aura fallu plaider coupable.
L'association Greenpeace vient de lancer une campagne de dénigrement contre le groupe pétrolier par le biais d'un concours invitant les créatifs à détourner le logo de BP. La gestion de crise sera donc longue et la bataille de l'image n'est jamais définitivement gagnée.