Cécile Chambaudrie (Mondadori Mediaconnect) "Nos CPM programmatiques ont crû de 40% depuis que nous avons repris la main sur l'offre"

La patronne de la régie du groupe qui chapeaute les marques Grazia, Closer ou Auto Plus fait le point sur le développement de son activité après le 1er semestre.

JDN. L'observatoire de l'e-pub a fait état d'un excellent premier semestre pour le marché français de la publicité digitale, avec une croissance annuelle de 15,5%. Qu'en est-il pour Mondadori Mediaconnect ?

Cécile Chambaudrie, patronne de Mondadori Mediaconnect. © Cécile Gabriel

Cécile Chambaudrie. Le groupe étant coté, je ne peux pas vous donner de chiffre précis, mais nous surperformons le marché en termes de croissance du chiffre d'affaires. Notre activité est portée par l'explosion des OPS qui pèsent désormais 20% du chiffre d'affaires print et Web de notre régie, avec la marque Grazia comme tête de gondole. Aujourd'hui 15 à 20% du chiffre d'affaires de Grazia provient du digital.

Le bilan est tout aussi positif sur le plan humain avec la transformation amorcée à mon arrivée il y a près d'un an pour changer notre approche client et aller vers plus de conseil. Le cœur de cette nouvelle organisation est le "creative hub" que nous avons lancé. Il s'agit d'un service d'une vingtaine de personnes qui pense les offres sur mesure pour les acheteurs et qui s'articule autour d'un studio de production, un pôle créatif et une équipe digitale composée de spécialistes.

L'autre gros chantier, c'est la reprise en main de la commercialisation de votre inventaire programmatique…

Nous avons effectivement décidé de reprendre la main fin 2017 sur la commercialisation de cet inventaire, qui était jusque-là externalisée à La Place Media. Nous avons recruté un media trader pour restructurer l'activité et permettre à nos commerciaux de proposer aux annonceurs des packages comprenant vente gré à gré et programmatique. Il y a une vraie traction là-dessus, les annonceurs étant demandeurs de ces deals programmatiques sur-mesure qui collent à leur besoin de réassurance sur le contexte de diffusion. C'est aussi la raison pour laquelle j'ai souhaité que nos cinq plus grandes marques médias (Closer, Auto Plus, Grazia, Télé Star, Top Santé) fassent partie de la première vague du label du SRI, Digital Ad Trust" pour le display et la vidéo. Tous ces efforts combinés nous ont permis de tirer les CPM programmatiques vers le haut, avec une hausse de 40% depuis la réinternalisation. L'effet est d'autant plus vertueux que la part du programmatique est en pleine progression depuis janvier et atteint aujourd'hui un peu plus de 30%.

Sur le même sujet, où en êtes-vous de l'implémentation de votre DMP opérée par Mediarithmics ?

"Nous avons réalisé la première campagne test alimentée par notre DMP en août"

Elle est complète depuis septembre et nous avons effectué la première campagne test avec un annonceur en août. Nous avions déjà beaucoup travaillé sur la segmentation de notre audience par l'entremise de notre partenaire Gravity. La connaissance du client est un enjeu fondamental, aussi bien pour nos équipes édito que pour notre activité marketing et de régie. Sur le premier aspect, c'est la possibilité d'être plus pointu en matière de recommandation de contenus. Nous n'y sommes pas encore. Sur le deuxième, cela permet de mieux packager notre inventaire pub et d'être plus performant dans nos activités e-commerce. Cela sert nos boutiques comme celle de "Science et Vie" ou notre activité de vente de croisières thématiques brandées aux couleurs de nos marques : Science et Vie, Pleine Vie, Auto Plus...

La croissance du marché pub digital reste cannibalisée par Facebook et Google. N'est-ce pas inquiétant ?

Chacun a sa place dans ce paysage digital. Et je ne me sens absolument pas en guerre avec Facebook et Google. L'enjeu c'est de réussir à revaloriser nos atouts auprès des annonceurs. En l'occurrence, notre capacité à produire des contenus de qualité. Qu'il s'agisse des contenus éditos auxquels seront associées leurs publicités ou de ceux que nous pouvons créer pour eux. Une récente étude menée par Bearing Point le prouve, les annonceurs sont en attente de brand safety et de contextes sécurisants. Mais ils doivent aussi comprendre l'importance de nous utiliser de manière construite et continue. Et non pas en one shot.

Quand on voit que les annonceurs se tournent systématiquement vers Google et Facebook, même après les scandales de brand safety de Youtube ou ceux de mesure de Facebook, on peut se demander dans quelle mesure ils sont réceptifs à ce discours…

Je vous rassure, on ne va pas rester les bras ballants et se contenter de programmatiser nos inventaires. Car c'est un terrain sur lequel nous avons peu de valeur ajoutée face à Facebook et Google. Attention, ça ne veut pas dire pour autant que nous sommes réfractaires à l'automatisation des process d'achats. Elle est demandée par les acheteurs qui sont à la recherche de productivité donc on y va, même sur print avec le projet Mediasbook qui sera opérationnel en 2019.

Mais notre valeur ajoutée réside dans le conseil et l'accompagnement des marques, notre capacité à décliner des opérations commerciales sur les nombreux points de contact que nous cultivons avec le consommateur. Aujourd'hui cela inclut bien sûr les réseaux sociaux et une plateforme comme Instagram où nous mettons en scène les produits de nos marques partenaires à travers des collaborations avec des micro-influenceuses. Cela peut aussi consister à faire rayonner la marque hors du monde virtuel, comme lorsqu'il s'agit de faire venir les lectrices de Grazia dans des boutiques.

Si Facebook attire autant les annonceurs, ce n'est pas seulement avec sa data. C'est aussi grâce à ses formats innovants. Sur ce sujet-là, les régies n'ont-elles pas  beaucoup de travail à faire pour se détourner de la bannière traditionnelle ?

Vous avez raison et c'est aussi une des missions de notre creative hub : imaginer des formats qui collent aux nouveaux usages et aux nouveaux territoires digitaux comme le mobile. Nous nous sommes conformés aux exigences du Digital Ad Trust et aux recommandations transmises par la Coalition for better ads. Cela veut dire que nous ne commercialisons plus d'interstitiels, plus de pop-up et autres éléments occupants plus de 30 % de la surface sur le web mobile. Sur la partie desktop, nous ne commercialisons plus de publicités avec l'autoplay sonore, par exemple. Nous sommes très vigilants sur ces formats, quel que soit le canal de vente. 

Directrice business et développement Mondadori France depuis 2016, Cécile Chambaudrie a été promue directrice exécutive de Mondadori Publicité en août 2017. Elle a remplacé Valérie Camy à la tête de la régie rebaptisée ensuite Mondadori Mediaconnect. Avant d'intégrer Mondadori, Cécile Chambaudrie a occupé différentes fonctions au sein de régies publicitaires comme La Tribune, en tant que directrice de La Tribune Hub Media, et Le Figaro, en tant que directrice générale de FigaroMedias (Media.Figaro).