Comment l'Europe cherche à promouvoir la 5G

Comment l'Europe cherche à promouvoir la 5G Pour rattraper son retard sur l'Asie et les Etats-Unis dans la 5G, Bruxelles injecte 700 millions d'euros dans un partenariat public privé (PPP) avec les industriels du secteur.

Alors que la 4G n'est pas encore totalement déployée - loin de là même, la 5G aiguise déjà les appétits des industriels et des opérateurs de télécommunications. Son arrivée prévue pour 2020, dans le meilleur des cas, la pression est d'autant plus forte sur les acteurs européens que l'Asie et les Etats-Unis font la course en tête.

Cela n'empêche pas le Vieux continent et la Commission européenne de se mobiliser. Notamment sous la houlette du 5G PPP, un partenariat public privé (doté d'un budget de 700 millions d'euros) entre  Bruxelles et l'industrie européenne du numérique et des télécommunications. Un cadre dans lequel l'écosystème européen vise autant le grand public que les applications industrielles (santé, énergie, automobile, transports, logistique, sécurité publique) ou l'Internet des objets (IoT).

Concrètement, les premiers tests sont prévus dès cette année dans l'Union européenne avec des essais "pré-commerciaux" l'année suivante. Avec pour objectif de disposer d'une couverture 5G complète dans au moins une ville importante de chaque pays d'Europe fin 2020. Enfin, l'ensemble des zones urbaines et des voies de communication terrestres devraient être couvertes d'ici 2025.

Les Asiatiques seront les premiers à proposer des services 5G à 10 Gbit/s

Pour le moment, le 5G PPP, dirigé par le Français Jean-Pierre Bienaimé, qui a longtemps présidé l'UMTS Forum, a un calendrier particulièrement chargé. Notamment en matière d'animation et de coordination des différents acteurs. Avec plus d'une soixantaine de membres - opérateurs (Deutsche Telekom, Eutelsat, Orange, SES, Telecom Italia, Telefónica...), industriels (Ericsson, Nokia...), entreprises de services (Atos, Indra Systema...), PME (Interinnov, Sequans...), centres de recherche, filiales européennes d'acteurs non- européens (Huawei, IBM, Intel, NEC, NTT DoCoMo, Samsung, ZTE), le 5G PPP n'aura pas le temps de s'ennuyer.

Ajoutons-y  quelques grands industriels (Airbus, Leonardo, Thalès) dont certains réclament des fréquences 5G pour leur usage propre. Seule lacune pour cet organisme, l'absence du géant Vodafone, qui multiplie les partenariats avec Huawei, Nokia, Ericsson, Intel ou Qualcomm, et de l'industrie automobile, futur grande utilisatrice de la 5G. Cette dernière s'est en partie réunie (Audi, BMW, Daimler) au sein de la 5G Automotive Association (5G AA) où elle côtoie Ericsson, Huawei, Intel, Nokia et Qualcomm.

Malgré cette mobilisation européenne, les Asiatiques seront vraisemblablement les premiers à proposer des services 5G à 10 Gbit/s (de l'ordre de 100 Mbit/s avec la 4G actuelle), voire davantage, à l'occasion des Jeux olympiques d'hiver à PyeongChang, en Corée du Sud, en février 2018, puis à Tokyo à l'été 2020. Korea Telecom, SK Telecom et NTT DoCoMo sont en première ligne, soutenus par Samsung, NEC, ZTE et Huawei  (avec pour ce dernier un budget R&D de 600 millions d'euros pour la 5G sur la période 2013/2018).

De l'autre côté du Pacifique, les américains Verizon et AT&T Wireless sont également très actifs avec notamment l'appui industriel d'Intel ou de Qualcomm et le partenariat récemment passé entre ce dernier et Verizon autour de la 5G et de l'IoT.

"Le véritable sujet, ce sont les applications et les services"

Relativement prudent, Orange joue plutôt la carte du pragmatisme. Marie-Noëlle Jégo Laveissière, la grande prêtresse du marketing et de l'innovation chez l'opérateur, dont une première expérimentation 5G autour d'une chambre anéchoïque dans son laboratoire de Belfort vient de s'achever, mise sur des usages réellement disruptifs afin de ne pas se limiter à un banal passage d'une génération à l'autre. "Même si la 5G est encore un puzzle, le véritable sujet, ce sont les applications et les services", déclarait-elle récemment lors d'une conférence organisée par l'Agence nationale des fréquences (ANFr).

Une conférence au cours de laquelle François Coulloudon, PDG de Teeptrak, une start-up spécialisée dans l'IoT et le suivi de la performance en temps réel, insistait sur le fait que "toutes les entreprises sont concernées par la 5G et pas seulement les grands groupes", tout en réclamant une "nécessaire démocratisation de l'usage des fréquences". Quant à l'ANFr, elle pousse volontiers vers des solutions de "partage du spectre" tout en parlant de "solution simple qui pose des problèmes compliqués".

Quelles bandes de fréquences sur quel continent ?

Non encore harmonisée au plan mondial, la 5G pose aussi la question des fréquences à lui attribuer. Un dispositif qui sera décidé lors de la prochaine Conférence mondiale des radiocommunications (CMR), présidée par le Français François Rancy, qui plaidait récemment pour un large spectre de fréquences hautes (entre 1 et 10 GHz), voire la bande des 28 ou 40 GHz aux Etats-Unis, alors qu'un consensus se dégage en Europe autour du 3,4/3,8 GHz ainsi que du 26 GHz. Sans oublier l'IoT et les applications critiques qui pourraient se réfugier dans la bande 700 MHz. Une réunion intermédiaire de la CMR est prévue en octobre 2017 afin de caler le dispositif. 

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