Marché automobile européen : entre optimisme et désillusion

Le moins que l'on puisse dire, c'est que les constructeurs européens vivent des moments difficiles, qui vont du pénible au très douloureux. La crise économique est évidemment l'explication la plus logique. Mais est-ce l'unique raison ?

Les récents chiffres publiés par l'ACEA (European Automobile Manufacturers' Association) concernant le marché automobile européen (27 pays) ne sont guère encourageants : le premier trimestre 2013 fait état d'une chute de 9,8 % par rapport au premier trimestre de 2012... lui-même assez peu brillant.
Sur la période, six pays seulement sont dans le vert : Belgique, Danemark, Estonie, Hongrie, Portugal et Angleterre.

Quant aux performances des constructeurs, elle vont de l'apocalyptique à l'inquiétant

  • Ford : -20,1%
  • Mitsubishi : -18,5%
  • PSA : -15,9%
  • Toyota : -14,8%
  • GM : -12,5%
  • Groupe Fiat : -9,1%
  • Groupe Renault -8,3%
  • Groupe VW : -7,6%

Quelques bonnes surprises néanmoins (mais avec un faible impact en termes de volumes)

  • Honda : +16,8%
  • Jaguar Land Rover : +13,7%
Bien entendu, la crise économique que traverse l'Europe est désignée comme la première responsable de ces mauvais chiffres : pour preuve, la dégringolade des constructeurs généralistes (même Volkswagen n'y échappe pas) reflétant les difficultés économiques des acheteurs habituels de véhicules vendus entre 15 et 25 000 euros.
Et pendant ce temps, le low cost (Dacia) ou le haut de gamme (Porsche) fait état d'une insolente santé...

Mais au-delà des seules données économiques, n'est-on pas en train de constater une sorte de mutation du marché ?
Pendant que le marché automobile chinois continue à connaître des taux de croissance enviables, l'Europe semble vouloir passer à autre chose. En effet, si en Chine le faible taux d'équipement automobile laisse encore l'espoir de belles progressions, en Europe (même si les disparités y sont sensibles), la problématique paraît davantage liée au renouvellement et/ou à la multipossession.

C'est pourquoi, hormis les passionnés de la chose mécanique et ceux qui la considèrent comme participant d'un certain prestige social (l'ensemble de cette population ne saurait à elle seule faire tourner l'ensemble de l'industrie automobile !), l'équation de l'achat automobile peut aussi se poser de la façon suivante :
  • il y a ceux qui placent le rapport qualité-prix en priorité : il sont de plus en plus fréquemment les clients naturels des marques low cost ;
  • il y a ceux qui réfléchissent à leurs besoins de mobilité sous l'angle global : dès lors, ils peuvent tout à fait considérer l'achat d'une automobile comme non pertinent et se tourner vers la location ponctuelle, l'auto-partage, l'abonnement à un service dédié (Autolib) ou l'utilisation d'autres moyens de transport.
Car, de façon purement raisonnée, la possession d'une automobile — achat, entretien et "frais de vie" : garage, péage, assurance, amende, etc. — constitue un poste budgétaire qui devient de plus en plus difficile à assumer et/ou à justifier.
Dans ces conditions, le décalage se creuse entre les offres traditionnelles des constructeurs généralistes et le besoin de mobilité des consommateurs.
Multiplicité des modèles, des versions, des références et des options constituent une réponse seulement marketing à des besoins qui sont eux en mutation : nous ne sommes plus sur des niveaux qui coïncident.
Ce décalage se traduit nettement par une tendance à la bipolarisation du marché : croissance du low cost et robustesse du premium.... Et au milieu, la débandade !

Pour une analyse plus détaillée, nous conseillons la lecture de l'ouvrage Les recettes des entreprises qui réussissent édité par Le Journal du Net.