Immobilier : l’impact carbone, un enjeu essentiel

Peu après la COP21 à Paris s’ouvre l’heure des bilans pour tous les secteurs. L’immobilier n’échappe pas à cet état de fait et doit se remettre en question.

Actuellement, de nombreuses règlementations régissent le secteur immobilier - RT 2012, loi Transition énergétique du 18 août 2015, etc. – avec un objectif annoncé : optimiser les économies d’énergie.

Il reste pourtant un axe majeur de pollution engendrée par l’immobilier qui est totalement passé sous silence : l’impact carbone. En résumé, il s’agit de l’énergie grise émise à 4 moments clés de la vie d’un bâtiment : sa construction, son exploitation, sa rénovation et sa déconstruction. Dans une récente interview, Lois Moulas (directeur de l’Observatoire de l’Immobilier Durable) analyse cet impact carbone : "l’enjeu pour un bâtiment, d’un point de vue climatique, c’est certes de réduire sa consommation énergétique pendant son exploitation (…) mais c’est aussi d’intégrer dans sa construction et lors de ses différentes phases de rénovation, la réflexion bas carbone, autrement d’essayer de faire en sorte que les équipes techniques, les architectes les bureaux d’études structures limitent la quantité de matériaux utilisés, essaient de travailler sur des matériaux qui ont des poids carbones plus faibles, etc.". Ce poids carbone est loin d’être anecdotique puisque, à titre d’exemple, pour la rénovation d’un bâtiment de bureaux il faudra près de 35 ans pour compenser les émissions de CO2 du chantier grâce aux améliorations de l’efficacité énergétique.

Financiariser l’impact carbone

Aussi important soit-il en terme d’impact climatique, ce poids carbone n’est pris en compte par aucune des réglementations officielles qui encadrent actuellement le secteur immobilier. Le levier réglementaire est donc inexistant, tout comme la motivation financière puisque, au global, l’énergie ne représente que 2% du coût d’exploitation d’un immeuble. Ce qui signifie que, même en faisant des efforts pour réduire les dépenses énergétiques à 10%, cela ne représenterait que 0,2% d’économies au niveau global.

Pour caricaturer, à l’heure actuelle, polluer ne coûte rien et tenter de polluer moins ne rapporte quasiment rien. Il existe pourtant deux pistes qui pourraient faire bouger les choses : la réglementation et la financiarisation de l’impact carbone.

La réglementation devrait évoluer prochainement puisque RBR 2020 (Réflexion Bâtiment Responsable) intégrera le critère CO2.

La financiarisation de l’impact carbone est une autre piste prometteuse, qui pourrait contribuer à faire évoluer rapidement les habitudes du secteur immobilier. Il existe en Europe un dispositif de quotas carbone pour les industries très polluantes, mis en place avec le protocole de Kyoto. Du fait du nombre restreint de pays participants, ce marché vivote mais le prix du carbone reste peu intéressant. Si ce dispositif était élargi à des "poids lourds de la pollution" comme les Etats-Unis ou la Chine, cela aboutirait à l’émergence d’un réel marché du carbone, avec des enjeux financiers de nature à motiver les acteurs. Ils trouveraient alors un réel intérêt économique à réduire leur impact carbone.