Aider les aidants familiaux : le numérique collaboratif au cœur des enjeux

Solutions d'aide au maintien des personnes à domicile, outils coordonnant l'intervention d'acteurs extérieurs, plateformes de renseignements sur les aides financières... les réponses existantes aux besoins des aidants familiaux sont variées.

On estime aujourd'hui entre 8 et 11 millions le nombre d'aidants familiaux en France. Pour ces personnes s'occupant de proches en perte d'autonomie, les difficultés sont nombreuses et les mesures de restriction liées à la situation sanitaire ne font qu'alourdir leur quotidien. En permettant tout à la fois d'agréger les services existants et de coordonner les acteurs, le digital répond à la question de l'amélioration de la qualité de vie des aidants, bien que certaines problématiques persistent.

De l’importance d’une plateforme digitale d’orchestration de services aux aidants …

Qu’il s’agisse de solutions techniques d’aide au maintien des personnes à domicile (barres de maintien, équipements d’aide aux déplacements, à la toilette…), d’outils visant à coordonner l’intervention d’acteurs extérieurs comme les soins infirmiers à domicile, le portage des repas ou la prestation de services ménagers, de plateformes de renseignements sur les aides financières possibles et les démarches à effectuer pour en bénéficier, de services de recherche ponctuelle d’auxiliaires de vie pour se dégager du temps, ou encore d’outils de conseils et de formations pour réaliser correctement les gestes de la vie courante… les réponses existantes aux besoins des aidants familiaux sont variées. Tout l’enjeu réside désormais dans le fait d’agréger ces différents services, tant pour simplifier le quotidien des aidants - souvent en mal de repères parmi le flot des outils et acteurs en place - que pour leur apporter une réassurance essentielle à leur bien-être personnel. Un point d’autant plus important pour ceux qui vivent à plus de 100 kilomètres de la personne aidée et ne peuvent donc pas intervenir physiquement dans un délai restreint en cas de besoin.

Le digital s’avère ici être l’élément clé à une agrégation réussie. Nous pourrions ainsi imaginer la mise en place d’une plateforme web, plus ou moins riche, d’orchestration de services et de consolidation de l’information. En compilant l’ensemble des renseignements utiles en un seul et même lieu mais aussi en permettant la notification en temps réel entre les différents acteurs, cette plateforme – gage de confiance pour les aidants familiaux – pourrait ainsi devenir pour ces derniers un réflexe dès lors qu’ils font face à un nouveau besoin. Outre l’intégration des divers outils évoqués plus haut, cette plateforme pourrait par ailleurs comporter un volet réseau social, de sorte à ce que chaque aidant puisse raconter sa situation et ses difficultés spécifiques, mais aussi partager ses conseils et bons plans dans une démarche d’aide mutuelle. Un échange entre pairs qui peut paraitre anodin mais qui apportera une dose de soutien supplémentaire aux aidants familiaux, dont le quotidien est parfois très lourd. Reste à savoir qui – notamment entre un acteur public ou un groupement d’acteurs privés – doit être à l’initiative du développement d’une telle plateforme, ce pour répondre au mieux aux problématiques de gouvernance et de financement que cela induit.

… mais dont le modèle économique reste encore à trouver

La question du financement d’un tel outil d’agrégation est ici centrale. Alors que le secteur public semble être le plus à même pour répondre à ce besoin, c’est une organisation toute entière qui est à (re)penser de sorte à trouver le modèle économique le plus adéquat pour permettre de développer et surtout de maintenir un tel outil. Si le volet "coaching" des aidants familiaux est un sujet clé, tant d’un point de vue administratif qu’au niveau des gestes du quotidien, ces derniers ne sont le plus souvent pas disposés à souscrire à un service payant. Pour être efficace, l’initiative doit donc être portée par un groupe ayant vocation à traiter ces sujets et disposant de l’assise financière suffisante pour offrir un tel service, à commencer par les acteurs privés ayant une mission de service public comme les groupes de protection sociale, mais aussi plus largement les assureurs et mutuelles. Par ailleurs, une distinction peut être imaginée entre les services primaires proposés en accès libre sur la plateforme et financés par le secteur public, et les services tiers à l’initiative d’acteurs privés, qui pourront y être intégrés de sorte à pouvoir y souscrire directement (avec la possibilité de bénéficier des aides financières existantes comme la réduction fiscale et donc la diminution du reste à charge). Ce système d’intégration à deux niveaux peut ainsi être un facteur permettant de bâtir un modèle économique pour ce type de plateforme.

Enfin, s’il est souvent compliqué pour les aidants familiaux de mener de front vie professionnelle et vie personnelle (40% d’entre eux étant actifs), le premier acteur à devoir les aider est tout simplement leur employeur ! On voit d’ailleurs émerger divers services aux aidants salariés, notamment à travers les plateformes des comités d’entreprise. Déporter ces outils et les rendre accessibles facilement dans le cadre de l’entreprise, qu’elle piloterait et financerait au moins en partie, s’avère ainsi être un modèle porteur et sain. Car les entreprises ont ici un intérêt évident, en ce que cela permet de limiter les risques d’arrêts maladie et/ou de burn out, de prendre soin de leurs salariés aidants, de les accompagner autant que possible pour gérer au mieux leur double rôle au quotidien et ainsi de les soulager d’une charge mentale supplémentaire. L’implication des entreprises dans ces projets de plateforme d’aide aux aidants permettrait donc, en développant un modèle B2B2C, d’accélérer les usages et de résoudre une partie de la question du financement.