La moto, une niche pour clients pressés et fortunés chez les VTC

La moto, une niche pour clients pressés et fortunés chez les VTC Les plateformes VTC se mettent à proposer des trajets en moto-taxi. De quoi conquérir des clients B2B, mais aussi créer un nouveau marché premium, comme l'espère Uber.

Pour diversifier leurs services, les plateformes VTC sont prêtes à se mettre aux deux roues. Depuis la rentrée plusieurs d'entre elles proposent des services de moto-taxis en Ile-de-France. Premier VTC à l'avoir fait dès 2016, Marcel s'est renforcé d'une nouvelle gamme de scooters électriques. De son côté, Uber a lancé cette option en test en Ile-de-France auprès des clients B2B et des particuliers faisant partie de son programme de fidélité. Les deux plateformes font appel au réseau de Félix-Citybird, une appli spécialisée dans les trajets en moto-taxi, dans le cadre d'un système de partage de revenus. Tandis qu'un nouveau VTC lancé en septembre, Nascapp, offre lui aussi des trajets en deux roues avec des chauffeurs recrutés par ses soins.

Première intérêt de ce service, éviter les bouchons, et assurer à des clients à l'agenda chargé un temps de trajet fixe vers, ou depuis, un aéroport. "Les trajets en moto se font la plupart du temps au départ ou à l'arrivée de quatre pôles : les deux aéroports de Paris, La Défense et Boulogne-Billancourt, avec très peu de trajets dans Paris intra-muros", détaille Batiste Pasquet, fondateur de Nascapp. Outre des temps de trajets plus courts et prévisibles, l'ajout d'une option moto, même si elle est peu utilisée, peut venir renforcer l'offre globale d'une plateforme, explique Cyril Masson, directeur RSE chez Marcel. "Cela peut faire levier dans une offre commerciale auprès d'une entreprise, car même si elle compte peu s'en servir, elle se dira qu'elle dispose de cette option pour ses employés en cas de grosse urgence".

40 euros minimum par trajet

Il s'agit donc d'un mode de course très premium, avec des prix de courses minimum élevés (40 euros chez Uber, 50 chez Nascapp), ainsi que des tarifications kilométriques bien plus onéreuses que sur le VTC (1,60 euro par kilomètre chez Uber en moto, contre 1,05 euro par kilomètre en VTC). En revanche, il n'existe pas de tarification à la minute comme en VTC. En pratique, cela donne des trajets vers, ou depuis les aéroports, compris entre 70 et 90 euros, contre plutôt 50 en VTC.

Des prix qui ne s'expliquent pas seulement par la typologie de clients visée. D'abord, il y a très peu de chauffeurs disposant de la licence moto-taxi (environ 400 en Ile-de-France). Ils sont donc difficiles à trouver, explique Cyril Masson. "Il faut posséder un permis moto depuis plus de trois ans pour demander la licence. Et les assurances, qui sont très chères, demandent souvent d'afficher un historique de cinq ans sans sinistre." Impossible donc pour les plateformes de lancer des opérations de recrutement au-delà du cercle restreint des motards confirmés.

Faire travailler les moto-taxis comme des VTC

Pour ces raisons, le moto-taxi reste un marché de niche. Une situation qu'Uber, conscient de ne pas pouvoir faire de miracles, aimerait tout de même optimiser et tourner à son avantage. Alors que ses concurrents fonctionnent plutôt avec de la réservation à l'avance afin d'assurer cette prévisibilité à leurs clients, Uber mise sur la relation en temps réel. Et ce malgré la faible cohorte de chauffeurs et clients disponibles, qui ne lui permettent pas d'atteindre une masse critique garantissant de réunir rapidement l'offre et la demande. "Vous pouvez réaliser beaucoup plus de courses avec 400 moto-taxis qu'avec 400 VTC, puisque les trajets et les temps d'approche sont plus rapides", justifie Roch de Longeaux, directeur des opérations d'Uber en France. L'entreprise assure proposer actuellement un temps d'attente moyen de 10 minutes en moto-taxi.

"Au-delà des aéroports, nous pensons aussi pouvoir développer un usage dans Paris grâce au temps réel et ainsi augmenter le nombre maximum de clients pour les pilotes", explique Roch de Longeaux. "Il faudra cependant voir s'ils peuvent s'habituer à avoir le téléphone qui sonne fréquemment et à être réactifs", reconnaît-il. Aujourd'hui partenaire de CityBird dans le cadre de ce test, Uber a commencé à recruter des pilotes en propre, afin d'améliorer ses marges en se passant d'intermédiaire. Malgré sa taille et son réseau, Uber devra cependant composer avec le même frein que ses concurrents : la perception négative du public envers les deux roues, qui sont impliqués dans un nombre disproportionné d'accident mortels.