Victor Lugger (Sunday) "L'objectif de Sunday est que plus aucun client n'ait à lever la main pour payer au restaurant"

Après avoir créé la chaîne de restauration Big Mamma, Victor Lugger s'est attaqué à la problématique du paiement en restaurant avec Sunday. Fort de 124 millions de dollars levés cette année, il détaille ses projets pour son application mobile.

JDN. Après avoir créé la chaîne de restauration italienne Big Mamma, vous avez fondé Sunday, une solution visant à simplifier le paiement au restaurant grâce à des QR codes. Comment est né le concept ?

Victor Lugger est le CEO de Sunday et le cofondateur de Big Mamma. © Sunday

Victor Lugger. En tant que restaurateur, ma préoccupation principale consiste à améliorer l'expérience de mes clients. Pendant la crise du covid, alors que nos restaurants étaient encore fermés, d'autres ré-ouvraient en Chine ou aux US. Nous avons alors observé tous ces supports affichant des QR codes sur les tables permettant d'accéder au menu. Nous nous sommes dit : pourquoi ne pas permettre également aux clients de payer en utilisant ce système ? Payer est une expérience souvent pénible et chronophage dans un restaurant. Il faut patienter pour obtenir l'addition, puis patienter de nouveau pour régler et parfois partager la note. Avec Sunday, nous simplifions cette expérience. En juillet dernier, nous avons profité de la réouverture de nos 17 restaurants pour tester ce nouveau système de paiement.

Pour quels résultats ?

Deux mois et demi après, nous avons observé que 80% des paiements étaient effectués via Sunday. Nos tables tournent désormais 15 minutes plus rapidement et notre ticket moyen a augmenté de 12%. Nos équipes nous confient adorer Sunday car la solution leur fait gagner du temps et leur permet de mieux s'occuper des clients. En conséquence, leurs pourboires ont augmenté de 40% en moyenne. Face à ces résultats plus qu'encourageants observés dans nos restaurants de Paris, Lyon, Londres, ou encore Madrid, nous avons décidé de lancer Sunday comme une entreprise à part entière.

Comment fonctionne la technologie derrière Sunday ?

Notre technologie permet de faire le lien entre les logiciels de caisse, les QR codes disposés sur les tables et les téléphones des clients, devenus aujourd'hui des terminaux de paiement. Sunday est compatible avec tous les wallets et moyens de paiement tels que Alipay, Wechat, Venmo, etc. Nous utilisons notamment Stripe pour le traitement des paiements. Notre objectif est de remplacer, non pas la carte de crédit, mais le terminal de paiement à CB.

Quels sont les éléments qui font que Sunday est un concept difficilement copiable par de potentiels concurrents ?

J'en dénombre trois. Le premier élément réside dans la simplicité d'utilisation du produit à la fois pour le client mais aussi pour le restaurateur. En seulement 24 heures nous arrivons à implémenter notre solution dans un restaurant. Le second est que nous venons du monde de la restauration et que nous pouvons facilement nous mettre dans les baskets d'un restaurateur et de son staff. Pour des concurrents qui ne viendraient pas de ce milieu-là, cela sera forcément plus difficile. Nous avons avant tout développé Sunday pour nous-mêmes. Enfin, pour créer Sunday, il nous a fallu développer un certain nombre de fonctionnalités et combiner différentes technologies. Notre solution fonctionne avec tous les logiciels de caisse du monde. Tout cela n'est pas simple à répliquer.

Vous avez annoncé une levée de près de 100 millions de dollars en septembre après avoir réalisé une première levée de 24 millions en avril dernier. Quels sont vos objectifs et quels marchés visez-vous ?

Pour l'instant, nous nous concentrons le secteur de l'hospitalité, à savoir les restaurants, les bars ou encore les boîtes de nuit. Nos marchés sont aujourd'hui les Etats-Unis, le Canada et l'Europe, dont notamment la France, l'Espagne et l'Angleterre. Nous viserons probablement d'autres marchés très rapidement car nous observons une demande importante partout dans le monde. Cette levée de fonds va nous permettre de financer cette croissance car la demande dépasse largement toutes nos espérances. Nous voulons y répondre le plus rapidement possible en proposant une solution toujours plus simple et rapide. Notre objectif est que, d'ici cinq ans, plus aucun client n'ait besoin de lever la main pour payer au restaurant, de la même manière que peu de personne lève encore la main pour commander un taxi.

Pensez-vous déjà à cibler également le monde du retail, à savoir les magasins, salons de coiffure, etc ? Vous deviendriez ainsi un concurrent direct de Sum Up…

Cela fait partie de notre roadmap. A la différence que Sunday coûte le quart du prix de Sum Up. Nous nous rémunérons via une rémunération variable sur les paiements. Cette commission varie en fonction du volume, et peut ainsi varier selon la taille et le nombre de restaurants. A l'inverse de nos concurrents, nous ne prélevons pas de frais fixes, ni de frais d'installation. Sunday ne facture pas non plus de frais de location de matériel, de frais de maintenance ou encore d'abonnements. En moyenne, Sunday revient 50% moins cher aux restaurateurs qu'un paiement effectué par carte bancaire via leur terminal.

Pourquoi avoir choisi d'incorporer Sunday aux Etats-Unis ?

Sunday est une entreprise américaine basée à Atlanta qui détient des filiales en France, en Angleterre et en Espagne. Ce choix s'explique par le fait que les US représentent aujourd'hui notre plus gros marché et que la plupart de nos investisseurs sont américains. La moitié de nos 190 collaborateurs se trouve aux Etats-Unis.

Quelle est votre méthode pour gérer parallèlement la croissance rapide de Sunday et le développement du groupe Big Mamma ?

Je suis le CEO de Sunday et Tigrane Seydoux , mon cofondateur, est le CEO de Big Mamma. Sunday a également intégré une troisième cofondatrice en la personne de Christine de Wendel. Enfin, nous faisons confiance à nos collaborateurs qui sont des gens autonomes et responsables. Tout ne repose pas sur mes épaules, fort heureusement.

Comment voyez-vous Sunday évoluer au cours des prochaines années ? Réservation de tables, prise de commandes ou encore programmes de fidélité font-ils partie de votre roadmap ?

Aujourd'hui Sunday compte plus de 1 500 restaurants clients. Nous voulons que notre solution soit utilisée dans tous les restaurants et, à terme, dans tous les brick-and-mortars. Nous ajouterons évidemment de nouvelles fonctionnalités avec le temps, que ce soit des programmes de fidélité, la possibilité de créer des comptes utilisateurs pour enregistrer un moyen de paiement préféré, etc. Notre objectif est de rendre le paiement toujours plus rapide. Aujourd'hui un paiement prend environ sept secondes, peut-être que nous arriverons à terme à une seconde.

Victor Lugger est le cofondateur et CEO de Sunday, une solution de paiement via QR code qui a vocation à simplifier le paiement au restaurant. Il est aussi le cofondateur de la chaine de restauration italienne Big Mamma, lancée en 2013 avec Tigrane Seydoux. L'équipe de Big Mamma compte aujourd'hui 1 600 personnes.  Auparavant, Victor Lugger a créé l'incubateur Strat Up. Diplômé de HEC, il a également dirigé la plateforme de crowdfunding MyMajorCompany.