Comment Schneider Electric déploie l'IA générative à tous ses métiers

Comment Schneider Electric déploie l'IA générative à tous ses métiers Le groupe s'est lancé dans un vaste chantier de transformation visant à injecter de l'IA générative du support interne à la relation client en passant par les équipes de développement.

Schneider Electric prend le sujet de l'IA générative à bras le corps. "Nous nous sommes rendu compte que la Gen AI allait être un véritable game changer", insiste Philippe Rambach, chief AI officer du groupe industriel. De mi-juin à début août 2023, l'entreprise de Rueil-Malmaison a passé en revue l'ensemble de ses process en analysant lesquels seront potentiellement impactés. Une fois ce travail réalisé, les processus pouvant être transformés via des solutions du marché sont identifiés. Ces derniers sont distingués de ceux nécessitant un développement interne, soit du fait de l'absence d'applications adaptées disponibles sur étagère, soit compte tenu de besoins métier bien particuliers. Au chapitre de cette seconde catégorie figure notamment un ChatGPT privé.

En amont, Schneider Electric n'a pas attendu ce vaste plan de transformation pour prendre des décisions opérationnelles liées à l'IA générative. Dans la foulée du lancement de ChatGPT fin 2022, le groupe a édicté des règles sur le bon usage du bot d'OpenAI. "Nous avions identifié deux risques : l'hallucination d'une part, la fuite de données d'autre part", rembobine Philippe Rambach. Etant une société technologique, le groupe choisit de laisser ses salariés accéder au service. "Cependant, nous poussons systématiquement une notification demandant aux utilisateurs de ne communiquer aucune donnée non-publique, et de ne jamais utiliser les réponses sans avoir le moyen de les vérifier", précise Philippe Rambach, avant de confier : "Nous allons fermer l'accès à ChatGPT très bientôt. Nous le remplaçons par une solution interne, déjà déployée, qui s'appuie sur la même technologie mais connectée au service OpenAI privé hébergé sur le cloud Azure de Microsoft. Ce qui nous évitera toute fuite de données."

Quels sont les cas d'usage de ce nouveau bot interne ? Chez Schneider Electric, on peine à répondre à la question. Pour des raisons de protection des données personnelles, le groupe se refuse de surveiller ce que font ses salariés sur l'assistant. Parmi les quelques cas d'usage évoqués par Philippe Rambach figurent cependant la gestion de traduction ou encore la réalisation de résumé.

La gestion des connaissances à l'honneur

Autre projet de générative AI porté par un développement interne : une interface de gestion des compétences conçue à destination des salariés pour interroger les procédures, notamment financières ou de gestion des ressources humaines. Sur ce plan, Schneider Electric est également déjà passé en phase de production. "Nous avons été capables d'agréger tout notre savoir-faire qui était disséminé dans des questions-réponses, des modes d'emploi... Et d'y donner accès via cette interface en langage naturel", détaille Philippe Rambach. En coulisse, Schneider Electric s'adosse à Langchain côté orchestrateur et à GPT-3.5 pour le large language model.

Un choix qui n'est pas figé. Le groupe se laisse en effet la liberté de se tourner vers d'autres modèles. "La qualité des résultats joue, certes, mais pas seulement, explique Philippe Rambach. Nous n'utilisons pas GPT-4 car il est trop onéreux à la fois en termes énergiques et de coûts d'exploitation." Aux LLM géants, le chief AI officer préfère des modèles de taille plus modeste, moins énergivores et impliquant des ressources machines plus faibles en termes d'entrainement et d'exploitation.

"Concernant la génération automatique de code, nous sommes prêts"

Evidemment, un gros travail a été réalisé autour de GPT-3.5 en amont de la phase de déploiement. Le modèle a notamment été fine tuné. Schneider Electric a par ailleurs favorisé la retrieval-augmented generation pour l'adapter à ses besoins.  Une technique qui permet d'injecter de nouveaux contenus dans la base vectorielle du modèle par le biais d'invites. Principal avantage : cela évite un réentraînement complet ou partiel. Une fois cette tâche réalisée, le modèle peut ensuite glaner directement ses réponses au sein du corpus de contenus injectés.

Quant à l'idée d'un assistant GPT orienté vers le client final, Schneider Electric planche sur le sujet. La société a d'ailleurs déjà déployé une première interface conversationnelle sur ce terrain. Elle a été intégrée à Resource Advisor, son service de suivi de la consommation énergétique des bâtiments industriels et tertiaires. Elle permet aux clients de formuler leurs requêtes en langage naturel. En amont, GPT 3.5 (exécuté sur Azure OpenAI) décrypte la question posée. Via une API, la demande est transmise à Resource Advisor qui y répond par le même canal. En aval, le modèle d'OpenAI reprend la main pour retranscrire le résultat dans le flux conversationnel. Via ce canal, le client pourra par exemple solliciter son bilan carbone sur telle ou telle infrastructure située dans telle ou telle zone.

Qu'en est-il des cas d'usage pouvant passer par des applications du marché ? Schneider Electric en identifie principalement trois : la génération automatique de code, le support aux équipes de vente, et la génération de contenu marketing. "Concernant la génération automatique de code, nous sommes prêts, sachant que tous nos développements sont déjà centralisés sur GitHub. Cette centralisation va nous permettre de facto de passer plus rapidement à cette nouvelle phase", commente Philippe Rambach. Evidemment, on pense à GitHub Copilot qui pourrait bien être un outil tout trouvé pour Schneider Electric. Reste que le choix final de la solution n'a pas encore été réalisé.

Des squads agiles

Côté support aux équipes de vente, Schneider Electric pourra capitaliser sur le déploiement de Salesforce auprèsde l'ensemble de ses équipes commerciales. Mais également sur celui d'Oracle CPQ qui gère l'ensemble de ses cotations transactionnelles. La question est maintenant de savoir quelle solution d'IA générative va coiffer l'ensemble. "Nous sommes actuellement en phase pilote sur deux à trois offres du marché", confie Philippe Rambach.

Comme pour tous ses projets d'intelligence artificielle, Schneider Electric a fait le choix pour l'IA générative de plonger ses équipes de data science au cœur des métiers. Tous les chantiers en question sont mis en œuvre par le biais de squads agiles, c'est-à-dire de mini-équipes pluridisciplinaires et autonomes, avec des représentants de l'IA, de l'IT et évidemment du business. Des équipes qui sont en capacité de réaliser des produits de A à Z. "On part systématiquement du cas d'usage métier avec un suivi sur l'ensemble du cycle de vie du développement. Cela maximise les chances de réussites du projet", conclut Philippe Rambach.