Au cœur de la "salle blanche" de MicroPort CRM, où sont fabriqués ses pacemakers connectés

Au cœur de la "salle blanche" de MicroPort CRM, où sont fabriqués ses pacemakers connectés La société française de management du rythme cardiaque a ouvert au JDN les portes de son site de fabrication à Clamart.

Nicolas Devos, directeur commercial et expert IoT chez l'ESN française Open en est certain, la santé est le prochain secteur où l'IoT va "connaître un véritable essor". Un avis partagé par Bernardo Cabrera, le directeur d'Objenious, qui considère notamment le pacemaker comme un objet connecté prometteur. Mais comment se fabrique cet appareil médical placé à l'intérieur du corps du patient ? Pour lever le voile sur son premier pacemaker Bluetooth, le groupe MicroPort CRM, seule entreprise française de "management du rythme cardiaque" parmi les cinq spécialistes mondiaux, a invité le JDN à visiter sa "salle blanche". Un site à la concentration particulaire contrôlée où est fabriquée toute l'électronique qui compose les pacemakers et défibrillateurs cardiaques implantables du groupe.

La salle blanche de MicroPort CRM est l'une des plus grandes d'Europe en medtech. © ©DavidCoulon

Située au pied du siège de l'entreprise, un bâtiment tout en verre au cœur de la zone industrielle de Clamart, la salle blanche est un environnement maintenu à 19°C où l'humidité et l'empoussièrement sont également scrupuleusement mesurés. On y accède après avoir revêtu aux vestiaires charlottes, blouse, couvre-chaussure et avoir déchargé l'électricité de son corps en montant sur une sorte de balance. Inspiré du nom des vents des régions intertropicales, le nouveau pacemaker Alizea est fabriqué au son mécanique des 80 machines et automates opérant dans la salle.

Du nom du vent Alizé, le pacemaker Alizea est le premier appareil de MicroPort CRM doté d'une connectivité Bluetooth. © MicroPort CRM

La première étape du processus est la vérification des puces. Reçues par plaques en provenance de STMicroelectronics, elles sont testées électriquement par une pointe robotique. Une opération qui prend près de 180 heures. La microélectronique est alors préparée, c'est-à-dire que les puces sont soudées, câblées et connectées sur un circuit imprimé avec les autres composants électroniques par différentes machines. Une inspection en 3D du positionnement et de la soudure de chaque composant est d'abord effectuée par un automate, avant que les opérateurs inspectent à l'œil nu le produit.

La pile au lithium, qui assure au pacemaker une autonomie de 13 ans, représente les trois quarts du volume de l'objet. L'ensemble est ensuite soigneusement nettoyé et, par un système de chauffe en étuve à 125°C pendant sept jours, l'appareil est vieilli pour en éprouver la résistance et prévenir toute dérive électronique. La fabrication d'un pacemaker prend au total entre 21 et 28 jours. La production en série permet à MicroPort CRM d'en sortir 400 par jour, au maximum de ses capacités. Entre juin et septembre, l'entreprise a produit plus de 8 000 pacemakers Alizea. Les appareils sont ensuite envoyés à l'usine du groupe située à Saluggia en Italie pour l'assemblage final du produit et son packaging.

Objectif : produire 13 000 Alizea en 2021

Nouveauté par rapport aux modèles précédents, l'IoT est au cœur d'Alizea. L'appareil comprend un module Bluetooth et trois capteurs pour déterminer la position, l'activité et les mouvements de l'utilisateur. "Avec l'IoT, nous pouvons proposer des fonctions avancées, comme la détection de l'apnée du sommeil. Nous avons choisi une connexion en Bluetooth car c'est la technologie la plus présente sur le marché", souligne Benoît Clinchamps, président de l'entreprise. Les problèmes de santé comme les arythmies sont détectés par un algorithme développé par le groupe, qui investit plus de 25% du chiffre d'affaires annuel dans la R&D, soit 128 millions d'euros d'investissement en 2021.

Le terminal Android dédié, que l'utilisateur doit placer sur sa table de chevet, a été réalisé par Famoco. © MicroPort CRM

Pour faciliter l'usage du pacemaker, MicroPort CRM s'est associé à Famoco, fabricant français de TPE mobiles sécurisés basés sur Android, pour élaborer le terminal Android dédié, qui fait office de transmetteur de données entre le stimulateur et la plateforme web sécurisée sur laquelle se connecte le cardiologue. Les communications Bluetooth sont cryptées par Famoco. "Cet appareil, destiné à rester sur la table de chevet des patients, contrôle tous les jours l'état du pacemaker (son niveau de batterie) et du patient (sa fréquence cardiaque, ses données physiologiques, sa respiration). En cas de besoin, il envoie des alertes sécurisées au médecin et lui permet d'effectuer un suivi régulier, quand auparavant les patients devaient se déplacer à l'hôpital tous les six mois", raconte Joël Courville, VP strategy & corporate affairs.

MicroPort CRM avait déjà une première expérience dans l'IoT avec la création en 2010 d'un défibrillateur connecté. A terme, tous les produits de l'entreprise ont vocation à devenir connectés pour pouvoir effectuer des actions médicales à distance. Cela demandera au groupe un travail de longue haleine, il lui a déjà fallu cinq années pour pouvoir mettre sur le marché son pacemaker avec l'obtention des certifications et le marquage CE. Alizea est toujours en cours d'homologation aux Etats-Unis et au Japon.

Mais le produit arrive sur le marché au moment opportun : "Le télé-suivi est en plein boom et devient la règle en santé", constate Benoît Clinchamps, indiquant que 50% des porteurs de pacemaker bénéficient d'un télé-suivi, un nombre qui s'élève à 80% pour les porteurs de défibrillateurs. MicroPort CRM, qui détient 26% des parts de marché de pacemaker dans le monde, a commercialisé en 2019 plus de 66 000 appareils en France (1 300 000 l'ont été dans le monde). L'objectif de MicroPort CRM est de sortir d'usine à la fin de l'année 13 000 Alizea, vendus 3 281 euros pièce.