Actility lève 16 millions d'euros pour s'affirmer sur le marché de l'IoT

Actility entend bien faire partie des entreprises qui comptent dans l'IoT. L'entreprise française experte des solutions de connectivité LPWAN lève pour cela 16 millions d'euros auprès de ses investisseurs historiques, à savoir des opérateurs de télécommunications (Orange, KPN, Inmarsat, Swisscom), des ventures capital (Bpifrance, BNP Paribas, Ginko Ventures, Indinvest), et des acteurs industriels (Bosch, Cisco, Creadev), qui ont participé à ses quatre tours de table précédents. Une part de ce montant, qui n'est pas communiquée, est constituée d'obligations convertibles en actions.
L'objectif premier de cette levée de fonds est d'atteindre la rentabilité en 2025. "J'ai une bonne vision du moment où Actility atteindra la rentabilité car nous avons une part de revenus récurrents assez forte dans le chiffre d'affaires. Cette levée de fonds ne veut pas dire que nous prévoyons des pertes pour 2024 mais que nous avons besoin d'une impulsion", assure Olivier Hersent, le fondateur et PDG d'Actility. Pour lui, il s'agit du bon moment pour effectuer cette levée de fonds, l'IoT étant en cours d'industrialisation. "Le marché de l'IoT suit la courbe de Gartner. Après avoir été un buzzword qui a suscité beaucoup d'enthousiasme, la technologie a connu un repli, marqué par l'arrêt du réseau LoRaWAN d'Objenious et le redressement judiciaire de Sigfox, explique le dirigeant. Désormais, le marché se structure en vue d'une croissance. Et quand il y a des structurations, seules quelques entreprises survivent. Nous voulons en faire partie."
A titre d'exemple de cette industrialisation du marché de l'IoT, le distributeur de gaz italien Italgas a annoncé lors du salon Enlit le déploiement à grand échelle d'un nouveau compteur intelligent, appelé Nimbus. Ce dernier communique avec le réseau LoRaWAN d'Actility et intègre, en plus de ses fonctions de télérelève, un capteur sismique et un capteur externe de détection de température capables d'interrompre l'alimentation en gaz en cas d'activités sismiques et d'incendies. Huit millions de clients en seront équipés d'ici le second semestre 2025.
Une acquisition à venir
Les villes intelligentes et l'énergie sont les deux marchés porteurs pour l'IoT. "De simples mesures dans ces secteurs engendrent des économies significatives", justifie Olivier Hersent. Actility possède déjà une forte expertise dans l'énergie. Pour rappel, l'entreprise avait une activité dédiée à l'énergie, Flexity, rachetée en 2019 par Veolia. Actility multiplie les partenariats dans ces secteurs, dont un conclu avec Ciricom en novembre dernier pour faire de Paros, en Grèce, une île intelligente. "Les opportunités sont énormes, il y a encore beaucoup de choses à faire dans l'IoT liées à la flexibilité électrique et aux bornes de recharge de véhicule électrique", certifie Olivier Hersent, qui entend diversifier l'expertise d'Actility avec de nouveaux capteurs.
Le deuxième objectif d'Actility avec cette levée de fonds est de consolider son activité par un rachat d'entreprise dans le domaine de l'énergie. La stratégie d'acquisition d'Actility s'est jusqu'à présent révélée judicieuse. En 2017, elle a acquis la start-up française spécialiste de la géolocalisation Abeeway, dont elle commercialise plus de 200 000 capteurs par an. De l'asset tracking, Actility s'est étendu à la détection de présence. Un exemple : l'entreprise a équipé les bureaux de Netflix à Singapour de capteurs de présence d'Abeeway et a permis à ce client, en libérant un étage par l'optimisation de l'espace, d'économiser 500 000 euros sur ses loyers. En août dernier, Actility a racheté la start-up Acklio, dont la technologie SCHC lui a permis de s'implanter davantage sur le marché italien et de finaliser le projet de conception du nouveau compteur d'Italgas.
Un taux de croissance de 80% par an
Créé en 2010, Actility a constitué un réseau de plus d'une centaine de distributeurs à travers le monde et enregistre un taux de croissance de 80% par an. En nombre d'objets connectés, cette croissance se chiffre à 40% par an, avec un mix entre réseaux publics et réseaux privés. Cela représente quatre millions de capteurs actifs dans le monde connectés à sa plateforme ThingPark et 40 000 stations de base. La France représente un quart de son activité. "Il y a une vingtaine d'appels d'offres en cours sur les réseaux LoRaWAN dans les régions, ce qui montre le dynamisme de ces acteurs."
Actility est par ailleurs membre fondateur de l'Alliance LoRa, qui réunit plus de 500 entreprises membres dans le monde. L'entreprise s'investit dans les développements du réseau, dont la prochaine initiative est la spécification d'un capteur de relais visant à rendre les projets de smart metering plus accessible financièrement. En parallèle, Actility opère pour ses clients ses propres réseaux cellulaires, LTE-M et NB-IoT et le CBRS (Citizens Broadband Radio Service) aux Etats-Unis, et collabore avec UnaBiz à la convergence des réseaux LoRaWAN et Sigfox. Un premier contrat vient d'être signé.
Le sujet phare en 2024 aux yeux d'Olivier Hersent est le rôle de l'IoT pour l'essor de l'intelligence artificielle. "Les deux technologies ont un lien fort, l'IA ne peut fonctionner sans données, et notre technologie IoT est le chaînon manquant qui permet de connecter les algorithmes d'optimisation à la réalité du terrain des divers secteurs industriels. Si l'IA était un arbre, l'IoT en serait les racines", certifie Olivier Hersent. Actility utilise en interne de l'IA pour ses services de support technique et pour apporter des réponses automatiques à partir des documents techniques. "Cela sert nos objectifs de rentabilité car les principales dépenses viennent du support technique. On est proche de répondre de manière automatique à 80% des clients", précise Olivier Hersent. La prochaine étape est de finaliser des interfaces avec les plateformes cloud et d'IA native, comme Microsoft Azure, AWS, Cumulocity ou ThingWorx, pour que les "données issues des réseaux LoRaWAN soient immédiatement digérables par l'IA".