Les femmes sont l'avenir de la Tech

Pionnières dans l'histoire de l'informatique, les femmes délaissent aujourd'hui ce secteur pourtant clé de l'avenir. Comment expliquer cette faible représentation des femmes et comment y remédier ?

A l’heure des débats sur la parité et l’égalité homme/femme dans la société, force est de constater que les femmes sont peu représentées dans le secteur informatique. Selon les chiffres, on compterait seulement 17% de femmes dans le secteur des TIC. Comment expliquer que les femmes, qui ont joué un rôle majeur dans l’histoire de l’informatique, tendent à déserter un secteur pourtant en plein essor ? Pourquoi est-il clé de leur redonner une place plus importante ? Que faire pour inverser la tendance ?

L’informatique, une histoire de femmes

Il y a quelques semaines, Katherine Johnson, mathématicienne de la NASA dont les calculs furent essentiels dans la conduite des missions de la navette spatiale américaine, dont Apollo 11, nous quittait à 101 ans. Elle, et tant d’autres, comme Ada Lovelace mère du premier programme informatique au 19e siècle, Joan Clarke, qui aux côtés d’Alan Turing, décrypta la machine Enigma qui codait les communications chiffrées du Troisième Reich, ou bien encore Hedy Lamarr qui, dans les années 1950, a développé un système de cryptage encore utilisé aujourd’hui dans la défense, ont toutes joué un rôle majeur dans l’histoire de l’informatique.

Ces femmes, véritables modèles, sont pourtant aujourd’hui moins connues du grand public – et peu mises en avant dans les enseignements scolaires. A l’heure où les femmes s’éloignent petit à petit du secteur informatique, il me semble important de redonner à ces grandes figures la place qu’elles méritent dans les contenus pédagogiques, pour éveiller de nouvelles vocations.

Chute du nombre de diplômées en France

Aujourd’hui, 1 élève sur 10 seulement dans les classes d’informatique est une femme. C’est le constat sans appel dressé par Isabelle Collet dans son ouvrage "Les oubliées du numérique". La gente féminine qui pourtant représentait 25% des effectifs dans les écoles d’informatique à la fin des années 80 en Europe occidentale, désertent les bancs des écoles d’informatique.

L'étude "Gender Scan", publiée en fin d’année 2019, confirme cette tendance en particulier en France : le nombre de femmes diplômées de la tech (enseignement supérieur, numérique et ingénierie) a baissé de 6%, passant de 35.746 à 33.709 entre 2013 et 2017, alors que sur la même période, la proportion augmente de 2% en Europe.

Un constat d’autant plus étonnant que l’étude montre la satisfaction globale des femmes françaises travaillant dans ce secteur (90% se disent satisfaites vs 74% en Europe) et qu’une majorité d’entre elles souligne l’engagement de leur entreprise pour plus de mixité.

Des causes identifiées et connues

Plusieurs raisons expliquent que les filles s’éloignent de l’informatique à commencer par la représentation genrée des métiers : dans les années 80, l’arrivée du micro-ordinateur s’est accompagnée de campagnes de communication et de stratégies marketing mettant en avant l’homme. L’image du "geek" sous les traits d’un jeune adolescent s’est développée dans la société, tout comme celles des groupes composés uniquement de jeunes garçons partageant une passion commune pour les jeux sur ordinateur.

L’auteure Françoise Vouillot dans son ouvrage "Les métiers ont-ils un sexe ?" pointe également l’idée que les stéréotypes, dès le lycée, conduisent les garçons vers des filières scientifiques et techniques, là où les filles s’orienteront vers des formations dans la santé.

Enfin, il ne faut pas oublier qu’au sein de ces formations essentiellement masculines, le quotidien des femmes semble être compliqué. Les comportements machistes reportés par plusieurs médias par exemple au sein de l’école 42, ou les agissements sexistes dont se disent victimes 7 femmes sur 10 dans les formations tech, peuvent expliquer le fait qu’elles donnent la priorité à d’autres formations et d’autres métiers.

Aux femmes de jouer !

Nous le savons le secteur de la Tech va générer le plus grand nombre d’emplois au cours des années à venir. Personne n’imagine construire le monde numérique de demain sans les femmes. Et ce n’est d’ailleurs pas souhaitable. Aujourd’hui, moins d’un entrepreneur sur 10 est une femme dans le secteur digital.

Les initiatives éducatives menées par les pouvoirs publics pour encourager l’enseignement du code de manière obligatoire dans les collèges et sous forme d’options dans les lycées français ont le mérite de mettre filles et garçons sur un même pied d’égalité en matière d’apprentissage de l’informatique. Le contenu pédagogique doit être mettre en avant les pionnières qui ont joué un rôle majeur dans l’histoire de l’informatique.

Bien sûr, les effets de cet enseignement ne seront visibles que d’ici une décennie. C’est pourquoi les nombreuses initiatives visant à promouvoir les femmes dans la Tech – à l’image de Femmes@Numérique ou de Girls in Tech – pour susciter des vocations et encourager les femmes à s’impliquer dans l’informatique doivent être encouragées.

En valorisant les réussites féminines, les média ont un rôle à jouer, tout comme les entreprises en instaurant la parité comme une priorité. Et même s’il n’y aura donc pas de parité à court terme dans le monde de l’IT, c’est ainsi que les femmes pourront se réapproprier les filières d’enseignement de l’informatique et faire tomber le stéréotype de genre. C’est donc bien aux femmes de jouer : car, non, les métiers de l’informatique ne sont pas réservés aux hommes ! Développeur back-end, développeur front-end, business analyste, et bien d’autres, sont autant de métiers aujourd’hui accessibles aussi aux femmes. A vous mesdames de les saisir !