Et si la Grande démission était une opportunité pour mettre définitivement fin à l'esclavage du travail ?

La Grande démission, phénomène de société né après la pandémie, a eu des effets négatifs en matière de recrutement dans de nombreux pays. Elle se fait aujourd'hui ressentir en Europe.

Et si ce phénomène était une opportunité pour les entreprises d’en finir avec le travail-esclavage, d’investir dans leurs collaborateurs en valorisant leur temps et de réinventer leurs modes de management ?

Un phénomène mondial

En 2021, à la suite des premières vagues de Covid et de plusieurs mois de confinement, près de 50 millions de travailleurs américains ont volontairement quitté leur poste, pour changer de travail, rechercher un autre poste ou quitter le marché de l’emploi. C’est la Grande démission. La France est loin d’être épargnée par ce phénomène. Fin 2021 et début 2022, le nombre d’employés qui ont volontairement quitté leur travail a atteint un niveau historique de 520 000 par trimestre. Un chiffre d’autant plus inquiétant que les postes concernés sont en majorité des CDI. Une récente étude de la Dares relativise ce taux de démission de 2,7 % en précisant qu’il est inférieur à celui d’avant la crise financière de 2008-2009. Pour la Dares, ce nombre élevé est une conséquence d’un marché du travail dynamique, où les salariés bénéficient d’un meilleur pouvoir de négociation.

Des entreprises qui se transforment pour gagner la course aux talents

Pourtant, rien ne dit que cette tendance ne va pas s’amplifier dans les mois qui viennent, sachant que depuis quelques années, une nouvelle génération est entrée sur le marché du travail, en quête de sens et plus soucieuse du bien-être au travail que ses aînés. Une situation qui a d’ores et déjà généré des changements profonds au sein des entreprises. Pour être en meilleure position d’attirer et de conserver les talents dont elles ont besoin, nombre d’entre elles font des concessions. Elles augmentent les salaires, proposent de meilleures conditions de travail et une organisation plus flexible, comme l’opportunité de télétravailler. Mais cela ne semble pas suffisant, dans un monde en plein changement, où l’innovation rapide conditionne la survie des entreprises. La solution est de valoriser les talents en recherche de développement personnel et professionnel, en leur donnant les outils pour que le temps passé dans l’entreprise leur permette de se transformer. Ils pourront ainsi devenir le collaborateur qu’ils souhaitent être, augmenter leur capital de connaissance, leur expérience et leur réseau.

La fin de l'esclavage

De nombreuses entreprises, convaincues que le contrat de travail se limite à fournir un travail en échange d’un salaire, tiennent pour acquis le fait que le salarié restera en poste, quelles que soient les conditions de travail, ce dernier n’ayant pas le choix et étant en situation de nécessité. En conséquence, ces collaborateurs restent mais au prix de leur démotivation et de la dégradation de leur santé physique et mentale. L’entreprise est donc perdante. Bien qu’elle leur achète leur temps, elle déresponsabilise les salariés de leur développement et elle les déconnecte de leur ambition. Agir ainsi, c'est également nier l’importance du capital humain. Avec l’émergence du digital et de l’innovation rapide, la richesse apportée par les salariés est précieuse. Seule une relation de partenariat véritable, basée sur un alignement entre les objectifs de développement personnel et professionnel du collaborateur, et les objectifs et ambitions de l’entreprise, libérera leurs capacités. Ils pourront ainsi apporter un regard différent sur les problèmes rencontrés et mettre en lumière de nouvelles opportunités et perspectives.

Des salariés qui progressent font progresser l’entreprise

Est-ce à dire que tous les salariés sont en recherche de défis professionnels et impatients de faire progresser leur entreprise ? Pas nécessairement. Certains d’entre eux n’ont pas envie de s’impliquer outre-mesure, ni de progresser. Et ceci est tout à fait respectable. Pourtant, moins ces collaborateurs s’impliquent, moins ils progressent, et plus ils s’ennuient. De plus, ils risquent d’être mis de côté par un management qui promeut la volonté d’implication et de progrès. Le rythme rapide imposé par la transformation digitale et les start-ups contraint les entreprises à adopter un rythme rapide, et à s’entourer de collaborateurs capables de changer et de s’adapter tout aussi rapidement. Dans ce contexte, les collaborateurs connectés au monde, qui investissent dans leurs compétences et qui s’approprient leur parcours de carrière réussiront mieux que les autres.

L'argent n'est pas le vrai capital

Si le capital financier est une somme d’argent ou un actif qui s’accroît dans le temps, il en est de même du capital humain. Il doit s’accroître et s’enrichir avec le temps. C’est cette perspective de progression que l’entreprise doit apporter au salarié pendant et après le recrutement, afin qu’il monte en compétence, qu’il soit plus connecté à son environnement et acquiert de l’expérience. C’est cela la vraie richesse. Quel professionnel souhaite-t-il devenir ? C’est la réponse que le collaborateur apporte à cette question et la manière dont il évoluera dans le temps qui compte le plus. 

Une discussion transparente est la fondation d’un partenariat employé-entreprise viable

Quelle que soit la situation, qu’il s’agisse d’un nouveau collaborateur ou d’un collaborateur de longue date, l’entreprise doit le questionner sur ce qu’il souhaite pour son avenir et la manière dont il se voit évoluer au sein de l’organisation. Si la réponse est cohérente avec un rôle et une mission existante au sein de l’entreprise, alors celle-ci a toutes les cartes en main pour proposer à l’employé cette perspective de développement. Ce dernier en retirera une valeur tangible qui grandira avec le temps, et augmentera son employabilité. Mais si la réponse du collaborateur n’est pas en phase avec ce que l’organisation est en mesure d’offrir, mieux vaut une réponse claire plutôt qu’une collaboration pénible et infructueuse, qui se soldera inévitablement par une démission. 

Aujourd'hui, les start-up sont de plus en plus nombreuses à devenir des scale-up. Elles doivent sans cesse relever de nouveaux défis, acquérir de nouvelles compétences et se transformer. La Grande démission est inévitable lorsque les collaborateurs ne souhaitent pas changer ou ne sont pas encouragés à évoluer. Ces derniers finiront à terme par s’ennuyer ou bien par en vouloir à l’entreprise. Démotivés, ils n’apporteront en tout cas que très peu de valeur à l’organisation. Les entreprises doivent agir pour inverser la tendance… Vive la fin de l’esclavage, bienvenue au capital humain !