Pourquoi votre candidature part à la poubelle : secrets de recruteurs
Vous avez 15 ans d'expérience, un CV impeccable, vous gagnez 80 000 euros et vous envoyez vos candidatures. Silence radio. Pendant ce temps, un recruteur vient de recevoir 187 candidatures...
Camille arrive à 8h30 au bureau. D'ici 17h, elle doit lire 187 candidatures pour une offre d'emploi CDI de responsable marketing. Elle en passe 40 à sa N+1, Valérie.
Valérie regarde le premier profil. Parfait... sauf le salaire dépasse le budget de 10k€. Rejet. Deuxième : très bien... mais vient du secteur automobile, pas e-commerce. Rejet. Troisième : exactement ce qu'il faut... sauf une suspicion sur une zone d'ombre en 2019. Rejet.
À 16h30, verdict : "Aucun ne correspond vraiment." Camille rentre chez elle avec une migraine. Elle sait qu'elle passera demain à dire à son ATS de dire non à tous les candidat(e)s. Le piège : Camille passe 80% de son temps en administratif, 20% en vrai recrutement. Elle est prisonnière de critères impossibles à réconcilier et d'une hiérarchie qui exige la perfection.
Sophie, chasseuse de tête : oublier de fermer la short-list
Sophie a 25 ans de métier. Elle reçoit ses candidats uniquement en face à face. Vendredi dernier, elle a commis l'impensable : convoqué un candidat sans vérifier que la short-list était déjà finalisée. Sébastien, 15 ans d'expérience en marketing digital, gagne 85k€. Il voit le mail mardi : rendez-vous jeudi 14h à Paris. 3 heures de TGV, 150 euros, un jour de congé. Il arrive à 14h. Sophie blêmit. Elle comprend : le client vient d'écrire qu'il ne veut pas plus de 2 candidat(e) pour les entretiens.
"Je suis vraiment désolée. La short-list est fermée depuis dimanche." Sébastien rentre à Marseille le moral en berne. Sophie rentre chez elle avec la culpabilité qui la ronge. Le problème : Sophie a adopté un nouvel outil IA. Mais le système a buggé. Elle n'ose pas trop se plaindre : elle approche de la soixantaine, sa retraite par capitalisation n'est pas prête, et elle a peur que son cabinet migre entièrement vers de l'automatisation..
Marcus, manager : victime de la RH qui envoie des "non"
Marcus dirige une équipe et demande à la RH un profil : 8-12 ans d'expérience, 60-75k€, secteur SaaS. Facile non ? En trois mois, il a reçu 18 CVs. Il en a retenu 3 pour entretiens. Le premier : profil parfait sur le papier. Mais en entretien, Marcus réalise qu'il a passé 5 ans dans une boîte qui s'est effondrée. Pas motivé. Rejeté.
Le deuxième : excellent en entretien. Mais ses références révèlent un red flag sur le travail en équipe. Rejeté. Le troisième : compétences solides, bonne énergie... mais demande 82k€, Marcus n'a que 75k€. Fin. Les 15 autres CVs ? Marcus ne les a même pas ouverts.
Il appelle Camille : "Tu m'envoies des profils qui ne collent pas. Avant le prochain, peux-tu vraiment vérifier que les critères sont là ?" Camille rougit. Elle sait qu'il a raison. Mais elle a 187 candidatures qui attendent. Le cycle infernal : Marcus énervé contre la RH. La RH énervée contre les candidats. Les candidats énervés contre les recruteurs qui ne répondent pas.
Le recrutement s'est cassé en trois actes
Acte 1 : L'avalanche de candidatures sans filtre
Une offre réunissait 50-100 profils pertinents avant. Aujourd'hui : 200-500. Les plateformes amplifient la portée, pas la qualité. Résultat : Camille noie sous le volume, pas sous les bons profils.
Acte 2 : Les critères impossibles
Chaque manager veut LE profil parfait. 8-12 ans, spécialiste du secteur, anglais courant, idéalement 2 ans dans "une boîte comme la nôtre". C'est chercher une aiguille dans une botte de foin. Et pendant ce temps, les candidat(e)s vraiment pertinents se font jeter d'office parce qu'un critère ne colle pas parfaitement.
Acte 3 : La tech qui bug et la peur du changement
Parfois les outils déraillent et personne ne se synchronise vraiment avec les candidat(e)s.
3 conseils concrets pour aider les recruteurs
1. Un pitch de 10 lignes maximum, pas une lettre copier-coller
Oubliez les lettres de motivation. Écrivez un pitch concis :
- Votre envie en 1 phrase
- Les 3 résultats concrets, concis, précis dont vous êtes fier(e)
- Vos 3 compétences clés
Exemple : "Responsable marketing SaaS avec 10 ans d'expérience je souhaite travailler pour une ETI avec des clients BtoB. J'ai triplé les leads en 18 mois chez [entreprise]. Votre offre m'attire pour la gestion du pipeline B2B. Parlons-en vendredi à 16h ou 18h ou lundi à 12h30 ? "
Dix lignes. Valérie comprend en 30 secondes si ça fit.
2. Un CV lisible en 10 secondes + LinkedIn complet
- CV : une page max, titre aligné avec le poste, résultats chiffrés
- LinkedIn complet avec un titre et un bandeau attractifs : utilisez les 220 caractères du Titre LinkedIn pour avoir un job do score élevé !
- Photo professionnelle
Camille scanne votre CV en 10 secondes. Si elle doit chercher vos résultats, vous êtes grillé.
3. Une relance courte si pas de réponse après 5 jours
Un seul mail. 3 lignes maximum : "Bonjour [Prénom], Avez-vous pu consulter ma candidature pour le poste de [Titre] ? Un phrase qui crée de la valeur et une formule de politesse.
Une relance. Pas trois. Sophie l'oubliera pas dans ses archives.
Le vrai sujet : qualité, pas volume
Les recruteurs ne sont pas des méchants. Ils sont emprisonnés dans des processus qui n'ont pas scalé. Camille perd 80% de son temps en tri administratif. Sophie gère son agenda comme en 1995. Marcus dépense son énergie à critiquer ce qu'il reçoit.
La clé : qualité du signal, pas volume. Un CV taillé sur mesure, un pitch honnête, des attentes claires. Ça ferait passer les 187 candidatures de Camille à 80. Ça ferait gagner 3h à Valérie. Ça ferait que Sophie ne rate plus personne. Et que Marcus reçoit vraiment du bon.
Être recruteur, c'est être victime du système. Mais c'est aussi être responsable de celui-ci. Vous, candidat(e), avez une part du pouvoir : celle de faire de la sélection par la qualité. Les recruteurs vous remercieront. Même s'ils ne vous le disent jamais.