Emploi des seniors : un nécessaire électrochoc

Le secrétaire national de l'UMP en charge de l'emploi des seniors, Jacques Kossowski, livre ses propositions pour revaloriser l'emploi des plus de 50 ans.

Pour faire face à la situation dramatique dans laquelle se trouve la France concernant l'emploi des seniors, le gouvernement a annoncé, entre autres mesures, l'instauration d'une pénalité chiffrée de 1 % de la masse salariale pour les entreprises de plus de 300 salariés qui n'auront pas conclu de plan d'action sur l'emploi des seniors avant fin 2009.   Le patronat conteste les modalités de calcul des pénalités qu'il juge déraisonnables et préfèrerait la mise en place d'un système incitatif. Mais est-ce bien réaliste ?   En ces temps de crise et de pénurie budgétaire, une telle piste n'est pas réaliste, pour peu qu'elle soit souhaitable. Ce qui est loin d'être évident au regard de ce qui a été fait jusqu'à présent.   Du côté des entreprises, le "contrat senior" permettant aux entreprises de conclure un CDD sans aucune justification et sans obligation de renouvellement en CDI n'a malheureusement pas marché.   Du côté des salariés, les mesures ont, quant à elles, consisté à exempter les salariés âgés de 57,5 ans de retrouver du travail au titre de la dispense de recherche d'emploi (DRE) sans craindre la radiation et la perte de leurs droits. Ce qui a conforté les entreprises dans l'idée que les seniors constituent la meilleure variable d'ajustement face aux difficultés économiques.   Seulement 38 % des plus de 50 ans ont un emploi en France Il est donc urgent d'envisager le problème différemment. La France est aujourd'hui avec la Belgique le pays où le taux d'emploi des seniors est le plus faible d'Europe : seuls 38,3 % des plus de 50 ans ont un emploi, bien loin de l'objectif de Lisbonne fixé à 50 % d'ici 2010 et bien loin de la moyenne européenne de 44 %.   Et la remontée du chômage risque de ne pas inverser cette tendance. Au contraire, si aucune mesure radicale n'est prise, les seniors seront une fois de plus les premiers touchés. Déjà, en août dernier, le taux de chômage des seniors a augmenté de presque 3 % contre une hausse moyenne de 2,2 %.   Face à ceux qui s'insurgent contre le système de pénalité, il est bon de rappeler une certaine réalité : aujourd'hui, seules 8 % des entreprises se disent concernées par la mise en place d'une politique RH en faveur des salariés seniors et 70 % des plans de Gestion Prévisionnelle de l'Emploi et des Compétences conclus par les entreprises ne prévoient aucun dispositif pour les salariés les plus âgés.   A défaut de carotte, c'est donc malheureusement le bâton qu'il faut agiter. Car aux vues des expériences passées, seule la contrainte pourra créer l'électrochoc dont la France a besoin pour mettre un terme à la discrimination dont sont victimes les seniors.   Mais il est fondamental d'aller au-delà de la question des pénalités. Car il ne suffira pas de contraindre les entreprises à garder leurs seniors, ni les seniors à trouver un travail, si on ne donne pas à ces derniers les moyens de s'adapter à la réalité du marché de l'emploi.   Un bilan de carrière obligatoire pour adapter les seniors au marché de l'emploi Il faut donc aller plus loin et mettre en place des actions concrètes. C'est justement le sens de la proposition en faveur d'un bilan de carrière obligatoire pour tous les salariés de 45 ans et plus dont l'objectif est de permettre à chaque salarié de s'adapter à son métier et, le cas échéant, de bénéficier d'une formation lui donnant accès à une seconde vie professionnelle.   Son caractère obligatoire participe du même principe que les pénalités : il n'y a aucune raison que certaines entreprises adoptent le dispositif et d'autres pas. Cependant, que les entreprises se rassurent, il n'est pas question qu'une telle induise des coûts supplémentaires.   Aujourd'hui, 26 milliards d'euros - 1,5 % du PIB de la France - sont dépensés au titre de la formation professionnelle pour les résultats que nous connaissons désormais. Le bilan de carrière devra par conséquent être financé par cette énorme manne financière dont nous disposons et qui ne porte pas ses fruits. La Cour des Comptes l'a d'ailleurs rappelé dans son dernier rapport sur le sujet : près de 10 % des fonds collectés se perdent en frais de fonctionnement. Rien d'étonnant lorsqu'on sait que la formation continue est gérée à la fois par l'État, les régions, les entreprises, des dizaines de milliers d'organismes de formation privés, sans compter la centaine d'OPCA chargée de collecter les fonds.   C'est pourquoi dans un souci d'efficacité, la gestion du bilan de carrière devra se faire à l'échelon régional. Car c'est aujourd'hui le territoire le mieux placé pour prendre en compte les priorités locales en termes d'emploi et de formation. C'est également le seul capable de réunir l'ensemble des entrepreneurs installés dans les bassins d'emploi et de cerner leurs attentes en termes de main d'oeuvre et de compétences.   Plutôt que d'opposer chacune des parties prenantes, l'objectif du bilan de carrière obligatoire est donc de conjuguer les besoins de chacun des acteurs impliqués dans la problématique de l'emploi des seniors.   C'est ainsi, et non pas seulement en pénalisant les entreprises, que nous parviendrons à juguler ce fléau qu'est le chômage des seniors.